C’était il y a seulement 10 ans – Portland Blazers : un tank en route pour une Draft exceptionelle
Le 21 juil. 2016 à 19:50 par Francois M
2006, ça sonne comme hier mais c’était il y a 10 ans. Avoir un MySpace ou un Skyblog était alors top tendance et Daniel Powter cavalait en tête des charts avec “Bad Day”. Alors imaginez un peu à l’échelle NBA, sachant que les joueurs ne restent en moyenne pas plus de 5 ans dans la Ligue. Des dizaines de journeymen ont écumé les terrains pendant ce laps de temps. Certaines stars d’aujourd’hui étaient encore des petits jeunes à potentiel, d’autres rentraient à peine en high school.
Ben Simmons et Brandon Ingram avaient tout juste 8 ans et les jeunes draftés serraient encore la main de David Stern. La NBA venait d’instaurer le Dress Code pour en terminer avec l’invasion du bling-bling et de la culture street, ce qui donnera naissance à des monstres de style – prenez-le comme vous voulez – comme Russell Westbrook. Même la carte des franchises NBA était différente. TrashTalk revient sur cette saison si proche et si loin à la fois, en faisant le bilan pour chaque franchise.
Aujourd’hui, c’est au tour des Portland Blazers
Bilan : 21-61, 15ème à l’Ouest et plus mauvais bilan de la ligue
Le 5 : Steve Blake – Juan Dixon – Viktor Khryapa – Zach Randolph – Joel Przybilla
Le banc : Jarett Jack (rookie) – Sebastian Telfair – Darius Miles – Martell Webster (rookie) – Travis Outlaw – Ruben Patterson – Theo Ratliff –
Le MVP : Zach Randolph, 18 points à 43%, 8 rebonds et 2 passes
A l’été 2005, les Portland TrailBlazers sont en reconstruction. Après avoir joué les premiers rôles à coup de dollars au début des années 2000, la franchise a besoin de tourner la page. En effet, l’équipe surnommée “Jail Blazers” a donné une très mauvaise réputation à la franchise auprès de la ligue mais également auprès des fans de Portland. Et même si le ménage a commencé dès 2003, les dirigeants peinent à rétablir une forme de stabilité. Au cours de la saison précédente, le coach Maurice Cheeks a été viré après une embrouille avec son joueur Darius Miles, et c’est Nate McMillan qui arrive en provenance de Seattle. L’équipe a fini avec un très mauvais bilan de 27 victoires pour 55 défaites, les dirigeants décident donc de laisser partir les vétérans pour laisser place à la jeunesse, que les chances de jouer le titre ou tout simplement les Playoffs sont nulles. Oui, vous avez reconnu la manœuvre, l’opération tanking est lancée du côté de l’Oregon. Exit Van Exel, Abdur-Rahim et Stoudamire, et on file les clés du tank aux jeunes : Zach Randolph, Darius Miles, Sebastian Telfair ou encore Viktor Khryapa. A Portland, on s’attend donc a une année compliquée, centrée sur le développement de ces joueurs prometteurs, tout en espérant enfin ne pas faire la une des rubriques faits divers…
Petit problème dans ce scénario, les “p’tiots” s’appliquent à entretenir la sale réputation créée par leurs aînés : Telfair, Z-Bo ou encore Darius Miles enchaînent les embrouilles sur et en dehors des parquets, entraînant des contentieux avec la NBA et la justice américaine. Comme côté terrain ce n’est pas beaucoup mieux avec la pire attaque de la ligue et des résultats horribles dont un 5-34 pour finir la saison, les tribunes du Rose Garden se vident. Et cela crée encore plus de problèmes : les nouveaux gérants du stade, qui l’ont racheté la saison précédente, sont mécontents de la gestion dès Blazers et trouvent que leur modèle économique n’est plus viable. Embrouilles à tous les étages donc, et c’est le GM John Nash, débarqué en 2003, qui en fait les frais, au profit du président de l’équipe, Steve Patterson, qui récupère la double casquette. Au final, les jeunes déçoivent : Z-Bo est en dessous des standards de sa saison 2003 de MIP, Sebastien Telfair arrose et Darius Miles enchaîne les pépins physiques avant de se blesser gravement au genou…
Mais bon, comme tout tank, la franchise est a, de toutes façons, le canon dirigé vers la Draft. Bien qu’ils aient le pire bilan de la ligue, les Blazers jouent de malchance à la Draft et ne récupèrent que le 4ème choix : probablement un retour de karma. Vu l’état de sa franchise, beaucoup d’observateurs pensent que Paul Allen, le propriétaire qui a tant investi au début des années 2000, va vendre son équipe. Kevin Pritchard, ex directeur du personnel, qui avait assuré l’interim au poste de head coach après le licenciement de Maurice Cheeks, a été promu assistant GM au départ de John Nash. Le proprio va lui demander de faire bouger les choses, en lâchant des dollars s’il le faut, et l’assistant GM va s’exécuter, pour une soirée de Draft légendaire, qui relancera le groupe de façon exceptionnelle…
Le moment marquant de la saison : la Draft 2006 et le génie des dirigeants de l’Oregon. Ou quand Brandon Roy et LaMarcus Aldridge débarquent à la place de Tyrus Thomas et Randy Foye.
On dit souvent des joueurs qu’ils sont “in the zone” quand ils rentrent tous leur tirs et qu’ils réussissent tout ce qu’ils entreprennent. Ce soir du 28 Juin 2006, au Madison Square Garden, c’est l’équipe dirigeante des Blazers qui va entrer dans la zone, enchaîner les bons choix et reconstruire la franchise en presque un soir. Resituons un peu : la front office de Portland ne dispose au final que de peu de matériel. Un peu avant le soir de la cérémonie, ils ont échangé Sebastian Telfair et Theo Ratliff en échange du 7ème choix, accompagné du contrat boulet – plus de 24 millions sur 2 ans – de Raef LaFrentz ainsi que Dan Dickau. Ils disposent également de leur 4ème choix et de quelques jeunes assez prometteurs mais n’ayant pas montré de potentiel vraiment intéressant, à part Z-Bo au caractère trop instable.
Le soir même de la cérémonie, ils vont tout simplement aller chercher deux de leurs futurs franchise players. D’abord ils récupèrent le 6ème choix, Brandon Roy, contre leur 7ème choix, Randy Foye, et du cash. L’arrière sénior vient d’une petite fac, et s’il semble très fort, plusieurs observateurs doutent de sa capacité à s’adapter au niveau NBA. Ensuite, Pritchard échange Viktor Khryapa et Tyrus Thomas, choisi avec le 4ème pick, contre le numéro deux de la Draft, LaMarcus Aldridge. L’ailier-fort montre déjà beaucoup de toucher offensivement, mais est moins athlétique que Thomas. Enfin, ils sélectionnent Joel Freeland avec leur 30 ème choix et achètent les droits sur Sergio Rodriguez, le 27ème choix, contre du cash.
En une soirée, les Blazers ont complètement relancé leur franchise alors que pourtant cette classe était assez pauvre en talents, et que plusieurs équipes ont eu de sacrés déceptions : Andrea Bargnani en 1, Adam Morrison en 3 et Shelden Williams en 5, c’est vraiment pas tiptop. L’année suivante Roy est nommé … ROY (Rookie of the year) tandis que Aldridge l’accompagne dans la All Rookie 1st team. L’ailier fort a aujourd’hui quitté Portland mais est le 2ème meilleur marqueur et meilleur rebondeur de l’histoire des Blazers. L’arrière lui aura été plus malchanceux avec les blessures mais aura cumulé 3 sélections au All-Star Game, un bon paquet de games de légende et une place très particulière dans le cœur des fans. Avec les résultats de cette Draft, Kevin Pritchard sera nommé General Manager l’année suivante quand Patterson démissionnera. Il sera néanmoins, beaucoup, beaucoup moins chanceux dans son choix à la Draft suivante avec la sélection – logique le soir de la cérémonie – de Greg Oden en 1ère position, devant Kevin Durant.
10 ans après, la franchise a encore prouvé que les reconstructions ne s’éternisaient jamais dans l’Oregon. Les paris réalisés à l’été 2015 ont presque tous fonctionnés et les Blazers ont surpris toute la ligue en réalisant une superbe saison régulière avant de se hisser jusqu’en demi-finales de conférence. A cette intersaison, les dirigeants ont sorti le carnet de chèque et ce groupe encore très jeune pourrait une fois de plus nous surprendre…
Source image : sixfouls.com