L’acte manqué de Lenny Cooke, ce gamin frivole qui osait défier Carmelo et LeBron du regard

Le 03 déc. 2014 à 19:43 par Leo

Dans la sélection 2013 du très éclectique Tribeca Film Festival, on pouvait retrouver en tête d’affiche un documentaire poignant, intitulé Lenny Cooke. Autrement dit, l’histoire tragique d’un diamant brut qui, par insouciance et multiplication des mauvais choix, n’est jamais parvenu à se plier aux exigences du passage au monde professionnel…

Retraçant plus d’une décennie de la vie du héros tourmenté à l’honneur, cette œuvre saisissante de Joshua et Benny Safdie dévoile les dangers préjudiciables que rencontrent bon nombre de talents placés sur un piédestal à la sortie de leurs années fastes au lycée. Stars avant l’heure, ceux-ci subissent de plein fouet les avances vénales d’un prisme du dollar à double tranchant : à la fois, celui-ci développe leur arrogance et sculpte leur propre culte de la personnalité mais, à l’inverse, les détourne radicalement de l’éthique de travail exemplaire à adopter dans le but de matérialiser avec justesse leur rêve le plus fou en réalité. Ainsi, détruisant sans scrupule ni possibilité de faire machine arrière leur rapport assidu à toute forme d’effort et de violence sur soi afin d’y parvenir, les attraits diaboliques de cette luxure accolée à la Grande Ligue conduisent à la ruine les plus fragiles de ces présumés prodiges de manière inaltérable, profondément dupés par tant d’artifices illusoires et de trésors fascinants à portée de main dont ils ne verront jamais la couleur. Ici, au lieu de s’apparenter à un simple long-métrage descriptif sur l’univers macabre de sportifs juvéniles fauchés avant même leur envol, ce récit exalté de l’existence de Lenny Cooke leur confère une voix singulière, ébranlant le silence qui enveloppe d’ordinaire le malaise destructeur de ces never been de la balle orange, tombés progressivement dans l’oubli.

Grâce à ses pouvoirs didactiques, le docu propose une réflexion aussi soignée que pertinente sur les choix cruciaux que doivent entreprendre ces pépites au potentiel inestimable, alors au carrefour de leur vie. En l’occurrence, joueur classé parmi les plus dominants de sa génération, Lenny Cooke, véritable chef d’œuvre de la nature à la mobilité étonnante, n’avait rien à envier aux LeBron James, Carmelo Anthony et Amar’e Stoudemire en 2001. Mieux encore, les scouts et autres superviseurs de l’époque l’encensaient davantage que les noms tapageurs (cités plus haut) qui font constamment la une de l’actualité NBA aujourd’hui. Cependant, la faute à une Draft ratée en 2002, à l’abus d’un élixir bien trop enivrant de négligence et de désinvolture, à de nombreux écarts de conduite et à des blessures frustrantes à répétition, une descente aux enfers foudroyante a guetté cet enfant de Brooklyn, pris au piège de ce cyclone abyssal et salement abandonné dans son échec par ses anciens frères de jeunesse. Par ailleurs, au-delà de l’évocation de cette virtuosité tristement partie en cendres, ce témoignage de Cooke, qui prend des allures de testament, a pour dessein de ressembler à un “sacrifice” expiatoire pour les années futures, à l’exemple mémorable du modèle avilissant par excellence à ne surtout pas suivre. Un cri du cœur à jamais immortalisé par les paroles récitées à haute voix du classique Let Me Love You de Mario, toujours teintées d’une souffrance sensible du passé…

Entre un spectre de remords qui plane tout au long du visionnage et un fort parfum de mélancolie, plongez dans la biographie touchante d’un grand espoir de notre sport qui, fuyant un temps à l’étranger et errant ensuite dans les méandres des ligues mineures, n’a pas su révéler à la planète entière de quoi il était réellement capable. Un conte moderne au puissant goût d’inachevé et à la morale significative qui ne vous laissera pas indifférent, loin de là.

Pour plus d’infos sur le documentaire, cliquez ICI.

Source image : indiewire.com


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