En cette fin août où l’actualité NBA est aussi faible que le pourcentage aux lancers francs de Dwight Howard, TrashTalk en profite pour revenir un peu dans le temps. Au programme aujourd’hui, le début des années 2000 avec les Portland Trail Jail Blazers, cette équipe mythique qui restera à jamais championne dans la catégorie des faits divers.
Asseyez-vous confortablement, fermez les yeux, et imaginez-vous Gilbert Arenas, Gérard Smith, Michael Beasley, Delonte West, DeMarcus Cousins et Greg Oden faisant tous partie du même vestiaire. « What the f*ck, c’est une blague, vous rigolez ? » Oui et non. Désolé de vous faire peur comme ça dès le début de semaine, mais figurez-vous que la NBA a déjà vu passer ce genre d’équipe improbable, remplie de phénomènes les plus tarés les uns que les autres. Au début des années 2000, pendant que la ligue était au cœur de la culture hip-hop et gangsta, on avait les Portland Trail Blazers, ou plutôt Jail Blazers, vous savez cette équipe qui avait gagné une telle réputation que leur blase avait changé. Les pionniers étaient devenus les prisonniers, et de 2000 à 2005, la franchise de Portland était considérée comme le symbole même de cette mauvaise image du basket US post-Jordan, que David Stern a tant combattue.
Les Portland Jail Blazers, c’était donc cette association de joueurs avant tout reconnus pour leur capacité à faire n’importe quoi, plutôt que pour leur talent basket. Pourtant, le talent était bien là : Rasheed Wallace, Zach Randolph, Bonzi Wells, Damon Stoudamire, Ruben Patterson, Darius Miles, Qyntel Woods, Shawn Kemp. C’était du beau monde. Le point commun de tous ces joueurs ? Du basket plein les mains, mais un cerveau quelque peu endommagé. Scottie Pippen et Arvydas Sabonis étaient bien là pour tenter de rehausser un peu le niveau du professionnalisme, mais c’était comme essayer de faire comprendre à Raymond Felton qu’il fallait faire attention à sa condition physique. Sur le parquet, les Blazers du début du XXIè siècle étaient plutôt compétitifs. En 2000, ça joue les Finales de Conférence, puis ça participe aux PlayOffs pendant les trois années qui suivent. Mais là où ils brillaient le plus, c’était après le match, en dehors du parquet, là où personne ne pouvait rivaliser avec eux. Bref, des génies, des champions comme on en voit peu. Voici la liste de leurs nombreux exploits sous les couleurs de Portland. Attention, il y’a du lourd :
DAMON STOUDAMIRE
Date et lieu de naissance : le 03/09/1973 à Portland
Taille : 1m78
Poids : 78 kgs
Surnom : “Mighty Mouse”
Chez les Jail Blazers de 1998 à 2005. Palmarès :
– arrêté en 2002 au volant de son Hummer pour excès de vitesse et conduite sous influence de marijuana, le tout en compagnie de son coéquipier Rasheed Wallace.
– arrêté en 2003 dans un aéroport en Arizona, après avoir tenté de passer au détecteur de métal avec 43 grammes de drogue cachés dans du papier aluminium.
– entre en cure de désintoxication en 2003.
RUBEN PATTERSON
Date et lieu de naissance : le 31/07/1975 à Cleveland
Taille : 1m96
Poids : 101 kgs
Surnom : “Kobe Stopper” (really ?)
Chez les Jail Blazers de 2001 à 2006. Palmarès :
– arrêté en 2002 pour violences domestiques sur sa femme.
– en 2003, altercation avec son coéquipier rookie Qyntel Woods, puis victime « d’une droite » de la part de Zach Randolph.
– refuse de quitter le banc quand son coach Nate McMillan fait appel à lui. C’était au cours de la saison 2005-2006, lorsque Patterson n’était pas content par rapport à son temps de jeu limité.
ZACH RANDOLPH
Date et lieu de naissance : le 16/07/1981 à Marion
Taille : 2m06
Poids : 118 kgs
Surnom : “Z-Bo”
Chez les Jail Blazers de 2001 à 2007. Palmarès :
– frappe son coéquipier Ruben Patterson au visage en 2003.
– arrêté en 2003 pour conduite en état d’ivresse et sous influence de cannabis.
QYNTEL WOODS
Date et lieu de naissance : le 16/02/1981 à Memphis
Taille : 2m03
Poids : 100 kgs
Surnom : –
Chez les Jail Blazers de 2002 à 2005. Palmarès :
– altercation avec Ruben Patterson en 2003.
– arrêté en possession de marijuana en 2003.
– arrêté en 2003 pour conduite sans permis (suspendu à l’époque).
– arrêté pour cruauté envers les animaux en 2005. A organisé des combats de chiens à son domicile.
BONZI WELLS
Date et lieu de naissance : le 28/09/1976 à Muncie
Taille : 1m96
Poids : 95 kgs
Surnom : “The Bonz”
Chez les Jail Blazers de 1998 à 2003. Palmarès :
– déclare en 2001, après que son équipe ait été sifflée par le public de Portland, que « les fans n’ont aucune importance pour nous ».
– auteur d’un geste obscène envers un fan après une défaite contre Philadelphie en 2003.
– perd son statut de co-capitaine (what ??) après avoir maudit son coach Maurice Cheeks en 2003.
RASHEED WALLACE
Date et lieu de naissance : le 17/09/1974 à Philadelphie
Taille : 2m11
Poids : 104 kgs
Surnom : “Sheed”
Chez les Jail Blazers de 1996 à 2004. Palmarès :
– meilleur joueur de l’histoire pour prendre des fautes techniques.
– menace un arbitre en 2003.
– menace un journaliste dans le vestiaire en 2003, après une défaite en PlayOffs contre Dallas (voir plus bas).
Mentions :
– SHAWN KEMP (chez les Jail Blazers de 2000 à 2002) : contraint d’arrêter prématurément sa saison NBA 2000-2001 afin de rentrer en cure de désintoxication, dans le but de combattre son addiction à l’alcool et à la cocaïne.
– DARIUS MILES (chez les Jail Blazers de 2004 à 2006) : insulte raciste envers son coach Maurice Cheeks en 2005 (alors qu’il est afro-américain, comme lui).
Cela fait beaucoup quand même pour une seule équipe non ? Et encore, ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. Heureusement pour notre santé mentale, on ne connait pas tout ce qui s’est passé dans le vestiaire des Jail Blazers à l’époque. Cependant, quelques anecdotes ont fuité, et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elles valent leur pesant de cacahuètes. C’est John Canzano, journaliste à The Oregonian, qui raconte ces scènes hallucinantes :
Dès que les Blazers signent un joueur pour un contrat de 10 jours, le responsable d’équipement lui offre un bagage pour cadeau de bienvenue. Donc, quand Omar Cook avait été signé en 2004, le bagage avait été placé devant son vestiaire. Cook n’était pas encore arrivé car il était encore en vol. A ce moment là, Ruben Patterson, qui avait vu le bagage, décida de prendre ce dernier, d’enlever le nom qui était dessus et de le garder. Personne n’a rien dit. Il n’y a rien de violent là dedans, mais ça démontre le manque de décence et de respect qui existait.
C’est d’ailleurs lui qui avait été menacé par Rasheed Wallace lors des PlayOffs 2003 :
J’étais dans le vestiaire visiteur à Dallas. Rasheed Wallace m’a menacé de m’en mettre une après une défaite en PlayOffs. J’étais le seul journaliste dans le vestiaire, et je lui demandais des questions. Il m’a dit de m’enlever de son espace sous peine de me prendre un coup de poing. Tous ses coéquipiers regardaient pour voir comment je réagis. Il était hors de question que je fasse marche arrière. […] Donc je lui dis que je ne bouge pas. Je reste debout en tenant mon bloc-notes et mon enregistreur, et on a commencé à se regarder fixement les yeux dans les yeux. Finalement, il m’évite brusquement pour aller se doucher, et pendant ce temps, il y’a Zach Randolph, rookie à l’époque, qui vient chez moi et me dit ‘Quand ‘Sheed revient, soit sûr de ne pas être dos à lui, parce qu’il va te mettre un coup bas’.
Un mois plus tard, c’est justement Zach Randolph qui allait en mettre une à Ruben Patterson lors d’un entrainement. Pendant plusieurs jours après l’incident, Randolph s’était caché dans la maison de Dale Davis (le pivot des Jail Blazers à l’époque), car il avait peur que Patterson essaye de lui tirer dessus pour se venger. Bref, c’était de la folie pure. Vous comprendrez bien qu’il n’y en avait pas un pour rattraper l’autre. C’était plus un concours pour savoir qui ira le plus loin, qui sera le plus stupide. Cette concurrence saine pour savoir qui a la plus grosse, ça forçait presque le respect. Difficile cependant de dégager un gagnant, tant ils ont agi en équipe. Chacun a rempli son rôle, chacun y est allé de son petit fait divers. S’ils avaient gardé la même solidarité sur les parquets qu’en dehors, sans doute que Portland aurait remporté un titre durant ces années là.
L’époque Jail Blazers prendra peu à peu fin à partir de 2004. Après tant d’années de coups foireux, la direction de Portland en avait sans doute assez de ces cas sociaux, et on les comprend. Bonzi Wells et Rasheed Wallace sont transférés au cours de la saison 2003-2004, alors que Damon Stoudamire est laissé libre à la fin de son contrat après la saison 2004-2005. A ce moment là, Nate McMillan devient le nouvel entraineur de l’équipe, et réussit à amener une toute nouvelle culture dans le vestiaire. Le front office était donc officiellement passé à autre chose, puisqu’il décida dorénavant de miser sur la jeunesse et sur des joueurs au bon comportement, comme LaMarcus Aldridge et Brandoy Roy, tous les deux récupérés lors de la draft 2006.
Si les Jail Blazers sont l’exemple même de l’équipe à problèmes, on ne peut s’empêcher de les regretter. C’est vrai quoi, vous imaginez bien à quel point TrashTalk aurait pu se faire plaisir avec ce genre de phénomènes. Déjà qu’on se régale avec les péripéties de Gérard, si en plus vous en avez cinq dans un seul et même vestiaire, c’est carrément l’extase !
Source couverture : artkor7 de TrashTalk