Le dossier Chris Bosh : un bras de fer avec le Heat, qui pourrait tourner au cauchemar
Le 23 sept. 2016 à 12:33 par Bastien Fontanieu
C’est une histoire dont on a parlé, sur laquelle on s’est posée, autour de laquelle on a discuté, sans prendre le temps de regarder le paysage dans son ensemble. Et à quelques jours de la reprise, Chris Bosh s’est lancé.
Avec le soutien du site Uninterrupted et d’autres athlètes qui ont applaudi l’initiative, l’intérieur du Heat a diffusé un premier trailer concernant une série qu’il développera tout au long de la pré-saison : Rebuilt, le parcours d’un joueur qui se reconstruit et retrouve les terrains, après avoir quasiment touché le fond de la piscine. Ses galères médicales l’emmenant même à devoir considérer sa carrière, avant de retrousser les manches et se jeter sur un chemin des plus ambitieux. Tenter de jouer en ayant d’aussi graves soucis de santé ? Un projet aussi courageux que dangereux, sur lequel il fallait bien se pencher. Car à l’heure actuelle, face à une devanture des plus saines se cache probablement un combat des plus crades dans les coulisses de la Ligue, entre Chris Bosh et le management du Heat, Pat Riley en premier.
Le boss de Miami a été souvent pointé du doigt pour ses décisions parfois dictatoriales. On l’a encore vu cet été, Patoche reste le patron dans sa région et quiconque se met en travers de sa route peut vite se retrouver renvoyé dans les 22. Au revoir LeBron il y a deux ans, au revoir Dwyane Wade il y a deux mois, les fans de la franchise ont pris cher en voyant le meilleur joueur de leur histoire faire ses valises et cela a immédiatement dégradé l’image de Riley auprès du grand public. Enfoiré, aucun respect pour les légendes, pense qu’au business, vieillard. Tout y est passé, et le dos de Pat était une zone de confort particulièrement agréable pour ceux qui souhaitaient se défouler. Seulement, dans le cas de Bosh ? L’approche du gominé est restée la même et, on ne va pas se mentir, il s’agit probablement de la plus sage. Sous un air financier évident, puisque l’absence de Chris des parquets pendant minimum un an résulterait au retrait de son fat contrat des books de Miami, Riley a gardé la main ferme concernant le retour de son joueur sur les parquets. Non, on parle de vie ou de mort ici, donc on arrête les conneries, tu restes assis. Un discours insupportable pour un homme qui souhaite vaincre l’adversité, et semble surtout inaudible pour l’intéressé.
Car à l’heure actuelle, c’est bien déterminé à retrouver les matchs que Chris Bosh se sent au quotidien. Ses pensées sont uniquement axées vers cet objectif, ses efforts également, son dernier projet ne peut que le confirmer en diffusant une telle série. Le problème ? S’il n’y en avait qu’un. Les problèmes sont tellement nombreux qu’on ne sait par où commencer. Du coup, on va installer des bases, afin de rendre le tout bien plus facile à lire comme à digérer. La détermination de Bosh, on ne peut que l’applaudir. L’envie d’un homme et surtout d’un athlète de surmonter les plus grandes épreuves et ne pas abandonner, on ne peut que le comprendre. C’est la nature-même de tout compétiteur, et derrière ce doux sourire se cache le feu d’un sportif qui refuse la défaite. Oui, Chris est un être humain formidable, qui souhaite montrer l’exemple en atteignant le sommet de la plus haute montagne. C’est un père de famille exemplaire, un joueur aussi sensible qu’intelligent, qui a montré tout au long de sa carrière qu’il avait été cuisiné dans cette marmite si rare à trouver : celle des modèles à suivre pour tous, un gentil géant quasiment intouchable.
Mais aujourd’hui, c’est comme si sa détermination l’aveuglait de sa réalité. Celle qu’il vit et qui a été confirmée par des faits rationnels. Du palpable, du médical, pas un pari jeté en l’air. Lorsque le staff médical du Heat a découvert un second problème de caillots de sang en février dernier, celui-ci a dit à Bosh que sa carrière était probablement terminée. La réponse du joueur ?
Lorsque j’ai vu les médecins de l’équipe, ils m’ont dit que ma saison était terminée, que ma carrière était probablement terminée, comme ça. Je me suis tout de suite senti effacé, comme si on me mettait de côté. Si un docteur me dit que les choses sont ainsi et que je n’y crois pas, je pense avoir le droit de ne pas être d’accord. Je sais qu’au fond de moi j’ai énormément de talent et de capacité, je sais que j’ai tout ça. Ce n’était donc pas une question concernant la possibilité que je revienne, mais plutôt quand cela allait se produire. Du coup on a pris le taureau par les cornes.”
Que Bosh possède ce droit au doute, c’est une évidence. Mais comment faire, si le joueur refuse d’entendre un autre médecin qui lui donne le même diagnostic ? Refusera-t-il de l’écouter, jusqu’à en trouver un qui lui dise ce qu’il souhaite entendre ? Prendra-t-il la place du médecin privé déjà engagé, quitte à continuer dans son aveuglement ? Certes, il existe une chance pour que Bosh soit un exemple et retourne sur les terrains. Qu’il devienne le premier athlète en NBA à utiliser des anticoagulants de façon efficace, qu’il résiste au calendrier infernal de la Ligue et possède un futur statut de héros pour ceux qui se battent contre les mêmes problèmes, comme on a pu le voir dans d’autres sports. Mais il existe aussi une autre chance, et celle-ci est insupportable par sa simple mention. Il se peut que l’intérieur se prenne un sale contact, à la tête, aux hanches, aux coudes, et qu’un drame se produise sur les terrains. Que le Heat laisse partir le joueur et que celui-ci décide de faire appel à des équipes médicales dont le staff est nettement moins compétent. Que le père de famille subisse un tragique accident, et que cette abnégation ne le mène qu’au désastre.
L’interrogation ne se situe pas autour de l’envie de Chris Bosh de retrouver les parquets, il a le droit et veut faire les choses à sa façon. Mais dans la bataille qu’il mène avec le Heat, c’est comme si un divorce avait déjà été acté et l’athlète se retrouvait en roue-libre, à tourner des documentaires avec LeBron à la prod (Maverick Carter) pendant qu’on met la vie d’un homme en danger. Lorsqu’un athlète et son équipe sont dans une bonne entente, un processus saint et exemplaire peut prendre place, avec des matchs surveillés et des absences programmées. Cependant, en voyant la réaction de Bosh et cette lutte qu’il semble mener frénétiquement face aux décisions qui lui sont imposées, c’est comme s’il essayait de se convaincre de pouvoir rejouer 79 matchs par saison, redevenir All-Star et mener le Heat jusqu’au titre. On n’a pas besoin de ça pour nous prouver sa grandeur, Chris a déjà démontré qu’il était exceptionnel sur comme en dehors des terrains. Et comme il le dit justement dans son trailer : “que feriez-vous, si vous ne pouviez pas faire ce que vous aimez par-dessus tout ?” On commencerait par se réveiller, et tenter une reconnexion avec le management de Miami. Puis on regarderait sa famille, et on prendrait le temps de bien peser le pour comme le contre, sous peine de foncer droit sur son chemin, et possiblement dans un mur.
Le chemin parcouru par Chris Bosh est exceptionnel, son combat remarquable, et on doit le soutenir dans ses efforts. Mais pour un retour à la compétition, et aux risques potentiellement mortels qui l’entourent, il faut faire la part des choses. Ne blâmons pas le Heat pour jouer la carte de la sagesse, et essayons de voir la réalité avec discernement : CB est en train de prendre une direction qui pourrait le mener loin, trop loin.