Séries cultes, joueurs de légende, rivalités exacerbées, parcours atypiques… Régulièrement, une histoire sur la NBA pour briller en société. Alors profitons de cette période creuse et sans match pour nous cultiver un peu.
Alors que le soufflé Blake Griffin retombe un peu (forcément, quand on ne sait que dunker…) et que “Quake” ne semble pas s’améliorer, souvenons nous d’un autre ailier fort vif et puissant, qui au contraire a connu une progression constante aux Sonics. Malheureusement, l’alcool, la drogue et le surpoids ont fini par le scotcher au sol, loin des envolées de ses premières années. Let’s introduce the Reign Man, Shawn Kemp.
Dès le début ou presque, son histoire est déjà bancale et laisse présager des difficultés pour le futur. Ses parents divorcent alors qu’il est encore en maternelle, il se rase à 13 ans puis grandit de 33 cm en 2 ans pour devenir à 17 ans l’un des meilleurs lycéens de l’Indiana, scruté par tous. Trop grand trop vite, démesuré. Alors que tout le monde l’attend en NCAA chez les Hoosiers de Bobby Knight, il préfère partir à Kentucky. Premier couac, ce départ chez l’ennemi de l’état voisin ne sera pas digéré. Suivi rapidement d’un second. Son niveau scolaire est trop juste. Puis un troisième. Chris Mills, recruté en même temps que Shawn Kemp, s’est vu remettre un chèque par un assistant coach. Les deux joueurs étant amis, le nom de Kemp se retrouve mêlé aussi à l’histoire. Après quelques mois, c’est le coup de grâce. Il est accusé du vol de deux chaines en or appartenant à son coéquipier Sean Sutton, accessoirement fils du coach de l’équipe. Aucune plainte contre lui, mais il doit quitter Kentucky sans avoir joué. Plus tard, suite à une enquête de la NBA, on apprendra qu’il n’était pas coupable du délit mais qu’il avait juste refusé de dénoncer un coéquipier. Trop tard. Il rejoint une université de seconde zone au Texas, où il ne jouera pas plus qu’à Kentucky. Il décide alors de se présenter à la draft, en 1989, à 19 ans.
Choisi en 17ème position par Seattle, il devient le premier joueur depuis 1975 à rentrer en NBA sans passer par la case université. Mais Kemp paraît toujours plus vieux, avec sa carrure imposante. À croire qu’il est passé de l’enfance à l’âge adulte sans connaître la case adolescence.
Pendant huit saisons, il fera les beaux jours de Seattle, progressant année après année avec la franchise, atteignant en 1996 les finals NBA (après quelques désillusions les années précédentes). Les Bulls seront champion, mais les Sonics leur donneront du fil à retordre et Shawn Kemp prouvera – si cela était encore nécessaire – qu’il est l’un des meilleurs joueurs de la ligue. Sa ligne de stats sur cette série : 23 points, 10 rebonds et 2 contres.
Suite à cette finale, Kemp souhaite renégocier son contrat. Le sien date d’avant l’explosion des salaires, et si cela ne le dérangeait pas au début de sa carrière, il pense maintenant avoir fait ses preuves. Dans le même temps, Seattle offre une rallonge à 35 millions de dollars sur 5 ans à Jim McIlvaine (Jim Who ? Pour info, ses stats en carrière : 2,7 points, 3,1 rebonds et 1,7 contres… are you kidding me ?). Il devient alors de plus en plus difficile à gérer. Il a des problèmes avec l’alcool. Il aurait également plusieurs enfants illégitimes. Il sera finalement envoyé à Cleveland.
Sa première saison est assez réussie, il continue sur ses standards et devient même le premier Cavalier de l’histoire à être starter au All Star Game. Mais il ne fera pas illusion bien longtemps. Après le lock out de 99, il est en surpoids. S’il donne le change avec la meilleure moyenne de points de sa carrière, sa descente aux enfers ne s’arrêtera plus. Forcément, essayez de passer 6 mois à Cleveland sans occupation (Demandez à Noah pour voir ce qu’il pense de la vie à Cleveland). Pour un alcoolique comme lui, il y a de quoi déprimer et se changer les idées avec une petite bouteille. Ou plusieurs. Et les rumeurs reprennent concernant les enfants illégitimes. Après trois saisons, sa silhouette et son salaire (98 millions sur 7 ans) deviennent trop encombrants. Le pachyderme présent dans l’Ohio ne ressemble plus à l’ailier explosif qui traumatisait les arceaux à Seattle au début de sa carrière.
Il atterrit alors à Portland. Une chance car l’effectif est de qualité. Une malédiction car il se retrouve au milieu des Jail-Blazers, ces joueurs qui squattent autant la rubrique des faits divers que le Top Ten. Il ne ramasse que des miettes, ce qui ne l’empêche pas de trainer des kilos superflus. Son jeu est aux toilettes. Là où il sniffe de la coke. Sa première saison à portland finira en désintox. À la fin de la saison suivante, il sera coupé par les Blazers. Annoncé dans de nombreuses franchises, il tentera de rebondir à Orlando en 2002 pour le salaire minimum. Il s’agira de sa dernière saison en NBA, qui lui permettra de dépasser les 1000 matchs dans la ligue.
Son retour a été régulièrement évoqué, à Dallas, à Chicago ou à Denver. Mais il annulera les workouts pour les deux premières franchises citées et les Nuggets préfèreront prendre Reggie Evans à sa place. Des mots durs.
Après cela, son nom réapparaitra encore dans la rubrique des faits divers pour possession de drogue et d’armes à feu.
Malheureusement, ce sont les frasques extra sportives de Shawn Kemp que les gens retiennent. Il est cité comme – mauvais – exemple pour ses excès et la manière dont il a gâché sa carrière. Il est l’un des joueurs qui a poussé Stern à mieux encadrer les joueurs en dehors du terrain. L’illustration que le passage par la case université est loin d’être superflue, comme il le reconnaît lui même
« Je n’ai pas eu de jeunesse. J’en ai souffert. J’aurais aimé côtoyer des gens de mon âge, découvrir l’ambiance d’un campus universitaire. J’aurais aimé vivre les joies simples de l’adolescence. Si seulement j’avais eu ce choix… »
Difficile de retracer la vie du Reign Man sans donner un aspect négatif à celle-ci, vue la sensation de gâchis qui entoure sa carrière. Mais il ne faut pas oublier pour autant qu’avant de connaître cette déchéance, Kemp était un ailier fort de grand talent : 6 fois All Star, 3 fois All NBA Second Team, beaucoup de joueurs aimeraient laisser une telle marque dans la ligue. L’alcool, la drogue et autres excès l’auront empêché de briller encore plus. Grâce à Fin7Niels, regardons le meilleur du Reign Man.