“Pistol” Pete Maravich : le précurseur du showtime

Le 22 juin 2014 à 16:38 par Nathan

Pete Maravich
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Toute sa carrière, il a été décrié. On le jugeait trop fou-fou, trop innovateur, pas assez discipliné pour devenir un vrai basketteur professionnel. Des dizaines d’années plus tard, tout le monde doit se rendre à l’évidence : Pete Maravich, né en 1947, mort en 1988, fut l’un des joueurs qui contribua à la renommée du basketball pendant les années 70. Après une carrière universitaire légendaire à Louisiana State, Maravich passa 10 saisons en NBA aux Hawks, au Jazz et quelques temps aux Celtics avec le rookie Larry Bird, le temps de glaner cinq sélections au All-Star Game et un titre de meilleur marqueur de la Ligue en 1977. 

Il est vrai qu’on parle assez peu de Pete “Pistol Pete” Maravich. Fruit d’une époque un peu oubliée, les années 70, qui au basket occupe une place ingrate – entre la fabuleuse ère Magic-Bird-Jordan et l’époque pré-merchandising où des monstres comme Wilt Chamberlain et Kareem Abdul-Jabbar commençaient leurs carrières. Pourtant, cette décennie était belle, et Maravich y était pour beaucoup. Mais, chose rare, voilà un joueur qui ne détient aucun record. Pas de lignes statistiques historiques, gravées noir sur blanc dans les livres d’or de la NBA. Il est l’un des meilleurs joueurs universitaires de l’histoire, certes : 44 points de moyenne (!) plus 6 rebonds et 5 passes, alors même que la ligne à trois points n’existait pas en NCAA à l’époque. Mais les statistiques, si elles étaient grandiloquentes avec Pistol Pete, ne sont pourtant pas ce qui fait de lui un des grands joueurs de l’histoire de notre sport. Le plus impressionnant et révolutionnaire chez lui, ce n’était pas les résultats, mais la manière de les obtenir.

Son style de jeu en fait le père spirituel des Steve Nash, des Manu Ginobili ainsi que bien d’autres joueurs que l’on classe dans la catégorie un peu lâche des “créateurs”. Maravich, c’était LE créateur comme on l’entend aujourd’hui : un peu fou, imprévisible, chez qui les gestes techniques côtoient les inspirations géniales, chez qui le basket n’est plus seulement un jeu qui se définit par l’ensemble de ses règles, mais plutôt par l’espace, laissé libre entre elles, où les esprits créatifs peuvent s’exprimer – et Pete était l’un d’eux. Il n’a certes pas inventé le dribble dans le dos, les passes aveugles ou les lay-ups acrobatiques : mais il les élevés à un tel niveau, qu’il en a fait des armes pour construire un jeu offensif aussi efficace que spectaculaire.

“On ne vous paye pas deux millions de dollars pour faire des passes classiques.”

Pourtant, Maravich n’avait pas la tête du basketteur. Né en Pennsylvanie d’un père d’origine serbe, il n’a rien du type showtime à la Magic Johnson. Assez grand (1m96) mais au physique chétif, Pistol Pete était un dribbleur formidable. Rapide et très technique, ses contre-attaques à la fac de LSU au milieu des années 60 sont restées dans la légende. Passes tipées, à l’aveugle, entre les jambes, lay-ups pleins de grâce, déplacement intelligents : tout cela faisait de Pete Maravich un joueur unique. Quoi d’étonnant que de retrouver chez toute une génération de joueurs, chez des légendes comme Magic Johnson – plus tard chez Steve Nash, Jason Kidd, et encore plus récemment chez Ricky Rubio (auquel il a été comparé) des mimiques et des techniques popularisées par Pistol Pete. Mais le problème, c’est que pendant longtemps, au sein d’une culture basket encore naissante, son style n’a pas cessé de diviser les observateurs. Beaucoup considéraient que Maravich, c’était du style assurément,  mais pas de substance. Un technicien ahurissant ? Sans aucun doute. Un bon joueur de basket ? Pas sûr. La faute à des résultats collectifs plus que mitigés. Choisi au 3ème choix en 1970 par les Hawks d’Atlanta, Maravich ne réussira jamais à faire de son équipe un véritable prétendant au titre, même s’il éclabousse la ligue de son talent. En 1975, Pistol Pete part au Jazz (alors à la Nouvelle-Orléans) pour des exercices somptueux d’un point de vue individuel (31,1 points, 5,4 passes et 5,1 rebonds en 1977, record de 68 points contre les Knicks) mais pas au niveau collectif. Souvent blessé, Pete Maravich décide de rejoindre les Celtics du jeune Larry Bird en 1980. Après une saison décevante, il prend sa retraite pour cause de pépins physiques. Il décédera en 1988 d’un arrêt cardiaque. En 1996, il est nommé parmi les 50 plus grands joueurs de l’histoire.

D’ailleurs, pourquoi l’avait-on surnommé “Pistol Pete” ? Tout simplement parce qu’il était une véritable gâchette. Son shoot en suspension était un modèle du genre, de près comme de loin : et ses statistiques à la marque deviennent encore plus impressionnantes quand on sait que, lors de la majorité de sa carrière, il n’a jamais bénéficié de la ligne à trois points (intégrée en 1980). Malchance, aléas de l’histoire ou volonté divine : Maravich n’a pas reçu les faveurs du hasard. Mais il a reçu les dons du basket. C’était déjà ça.