Le Bilan “tout ça pour ça” des Bulls : tant d’efforts pour une sortie précoce

Le 05 mai 2014 à 13:05 par David Carroz

Alors que la déception de l’élimination au premier tour des PlayOffs par les Wizards est encore fraiche, essayons de prendre un peu de recul sur la saison des Bulls qui a ressemblé aux montagnes russes. Candidats au titre (ou du moins outsider) avec le retour de Derrick Rose en début de saison, la nouvelle blessure de leur meneur couplée au trade de Luol Deng les a plongés dans le doute, et le mot tanking a même fait son apparition chez les fans. Sous l’impulsion de Joakim Noah et de D.J. Augustin entre autres, les hommes de Thibodeau ont remonté la pente pour proposer depuis le nouvel an le meilleur bilan de la conférence Est sur cette période, au point d’être considérés comme “l’équipe que personne ne souhaite rencontrer en PlayOffs”. Avant de s’effondrer donc face à Washington. Bilan d’une saison une fois de plus éprouvante pour les Bulls.

Ce que TrashTalk avait annoncé :

Derrick Rose était là, 18 mois après sa rupture des ligaments du genou. Les temps étaient à l’optimisme en début de saison avec ce retour tant attendu. Logiquement, on imaginait les Bulls jouer les trouble-fêtes, eux qui avaient été impressionnants d’abnégation et de solidarité en PlayOffs en 2013. Si Marco Belinelli et Nate Robinson n’étaient plus là pour apporter des solutions offensives, l’enfant prodigue lui revenait, et devait profiter de l’éclosion de Jimmy Butler et de l’arrivée de Mike Dunleavy Jr. pour se décharger un minimum de toutes les responsabilités en attaque. En dehors d’un temps d’adaptation compréhensible, Chicago devait suivre le rythme des Pacers et du Heat pour atteindre les sommets de la conférence Est, avec un effectif solide et l’un des meilleurs coachs défensifs de la ligue. C’était écrit, les Bulls lutteraient pour le titre à l’Est avec Indiana et Miami. Nous annoncions 51 victoires, et la 3ème place de la conférence. Avec 48 succès et le 4ème spot, nous n’étions finalement pas si loin. Sauf que nous n’imaginions pas le chemin que les Bulls auraient à parcourir pour y parvenir.

Ce qui s’est vraiment passé :

Malheureusement, notre boule magique ne nous avait pas prévenus que Derrick Rose se blesserait de nouveau au bout de 10 matchs, en n’ayant même pas le temps de retrouver le rythme (15,9 points à 35,4%, 3,2 rebonds, 4,3 passes et 3,4 turnovers, ses pires stats en NBA) et en entrainant le trade de Luol Deng. Le départ de l’Anglais a énormément touché l’équipe, à l’image d’un Joakim Noah muet pendant plusieurs jours. Le temps de digérer et Jooks lançait sa saison pour porter les Bulls dont il est alors devenu le point center et même le franchise player, au point d’être cité comme candidat aux places d’honneur pour le titre de MVP et d’être élu Defensive Player of The Year.

Bien épaulé par Taj Gibson, l’un des meilleurs 6ème hommes de la saison, et la surprise “Didier” Augustin, les Bulls ont fait plus que résister. Avec coeur, intensité et abnégation, ils ont failli accrocher la 3ème place de la conférence grâce aux principes défensifs de Thibodeau, au prix d’une débauche d’énergie de tous les instants. Alors bien entendu, c’était rarement beau à voir, avec une attaque souvent laborieuse, parfois horrible et même de temps en temps à donner envie de se pendre, mais quand on manque de talent, on fait ce qu’on peut avec ce qu’on a, et on joue tous les matchs comme si la saison en dépendait. C’est ce qu’ils ont fait, au point d’arriver complètement cramés en PlayOffs et de recevoir une leçon de la part des Wizards, plus complets et tout simplement meilleurs qu’eux. Une élimination dure étant donnés les efforts consacrés et les difficultés rencontrées, mais logique. Cette année encore, les fans pourront être fiers de l’investissement de leurs joueurs et se dire “et si Derrick Rose…”

L’image de la saison :

Nous avons eu la chance de rencontrer Carlos Boozer cette saison pour constater ses énormes progrès en défense. Source : http://www.casal-basketball.com

Nous avons eu la chance de rencontrer Carlos Boozer cette saison pour constater ses énormes progrès en défense.
Source : http://www.casal-basketball.com

On ne l’attendait pas, il a cartonné : D.J. Augustin

Lors de son arrivée courant décembre après avoir été coupé par Toronto, telle la fosse nous étions sceptiques. Comment un mec qui sortait d’une saison galère chez les Pacers et qui n’avait pas réussi à s’imposer aux Raptors pouvait-il apporter quoique ce soit aux Bulls ? Tout simplement en retrouvant la confiance et en profitant des systèmes de Tom Thibodeau sur-mesures pour les meneurs capables de scorer. Laissons de côté Derrick Rose, mais C.J. Watson, John Lucas III et Nate Robinson ont réalisé leurs meilleurs saisons sous les ordres de Thibs, ce n’est probablement pas un hasard. Augustin a donc suivi leur chemin pour s’épanouir dans le collectif des Bulls en recherche d’un joueur capable d’apporter des points et de l’adresse longue distance.

Avec 14,9 points par match, à 41,9% aux tirs et 41,1% à 3 points, il a très bien rempli ce rôle, ajoutant en plus 5,0 passes, à peine moins que “Jooks” (5,2). Malheureusement, sa post season a été beaucoup plus compliquée puisqu’il n’a shooté qu’à 29,2% (26,9% à 3 points), pour 13,2 points et en terminant même la série par un affreux 1/10 lors du dernier match. Une doublure intéressante l’an prochain pour Derrick Rose ? On pensait la même chose de KryptoNate, mais Chicago ne l’a pas prolongé. Quid du meilleur marqueur de la saison de Chitown ? Réponse cet été.

On l’attendait au taquet, et il a abusé : Jimmy Butler

Je sais, certains vont me trouver dur. Comment tailler Jimmy Butler alors qu’il réalise sa meilleure saison aux points (13,1), aux rebonds (4,9), aux passes (2,6) et aux interceptions (1,9) tout en s’imposant comme l’un des meilleurs défenseurs extérieurs de la ligue ? Comment parler de lui et laisser Boozer tranquille dans son coin ? Pour la deuxième question, tout simplement parce que plus personne n’attend quoique ce soit de la part du power forward. Par conséquent, pas de déception lorsqu’il sort l’une des plus mauvaises saisons de sa carrière, qu’il se fait bouffer du temps de jeu par Taj Gibson et qu’il est une fois de plus transparent en PlayOffs. Pour répondre à la première, regardons un peu mieux.

Après d’énormes PlayOffs l’an dernier, tout le monde attendait Jimmy Butler au tournant. Il devait prendre la place du shooting guard tant recherché par les Bulls pour accompagner Derrick Rose dans le back court. Excellent défenseur, pas maladroit à 3 points (38% l’an dernier), il n’a pas non plus besoin de toucher beaucoup la balle. Voilà pour la théorie. Pour la pratique, Jimmy est un ailier, pas un arrière, et son adaptation à ce poste est plus difficile que prévue. Manieur de ballon moyen, il ne peut pas soulager son meneur pour remonter la gonfle. Avec les circonstances déjà évoquées (blessure de Rose et trade de Deng pour ceux qui ne suivent pas et qui étaient sur une autre planète cette saison), il devait prendre plus de responsabilités offensives.

Et là, c’est le drame. Une adresse médiocre (39,7% et 28,3% à 3 points. Parmi les joueurs ayant pris au moins 240 tirs from downtown, seul Josh Smith a une moins bonne adresse), l’augmentation de ses stats n’est qu’une illusion donnée par le gonflement de son temps de jeu. Si on ramène tout cela à 36 minutes pour les deux dernières saisons, Butler prend 1 rebond en moins et score seulement 0,3 point en plus… la progression n’est pas là. Dans une attaque des Bulls digne d’un film d’horreur, il n’a pas su – pas pu – tirer son épingle du jeu. Mais il est encore jeune (24 ans) et à l’instar d’un Taj Gibson qui a explosé cette année, il peut bosser sur son jeu offensif (son handle et son tir en particulier) pour devenir une vraie menace.

La vidéo de la saison :

Pour ne pas rester sur la déception de l’élimination face aux Wizards, petit souvenir d’une grosse victoire des Bulls sur le Heat, avec un Joakim Noah omniprésent (20 points, 12 rbds, 7 pds et 5 contres) devant les yeux du paternel qui ne peut retenir son enthousiasme devant la prestation de son fils et sa défense sur LeBron James.

Ce qui va bientôt se passer :

Quel futur pour les Bulls ? Aujourd’hui, tout le monde parle d’une saison ratée. Certes, les objectifs initiaux ne sont pas atteints, mais ils avaient été largement revus à la baisse en janvier. Donc même si l’élimination par Washington peut être une déception, parler de cette saison comme d’un échec est dur, trop dur pour les joueurs qui ont tout donné et qui ont fièrement représenté Chicago en 2014. Comme le dit Thibodeau

Nous avons pris beaucoup de coups ces deux dernières années. En fait, ces trois dernières années; l’année du lockout, Derrick a manqué la moitié de la saison. Ils se sont battus comme des fous cette année. Il a manqué toute cette dernière saison et cette année avec le trade de Luol… nous étions à 12-19. Vous êtes là et vous vous demandez “Ok, qu’est ce qu’on va faire ?” Ces gars se sont battus comme des fous pour être sûrs que nous réussissions une bonne saison. Quand une équipe s’engage à jouer comme une équipe, à jouer ensemble et à jouer les uns pour les autres, et vous donne tout ce qu’ils ont il n’y a rien que vous puissiez demander. Beaucoup de personnes se serraient couchées, mais notre équipe n’a pas fait cela.

Mais que restera-t-il de cette équipe dans quelques mois ? Joakim Noah, Taj Gibson, Jimmy Butler sont assurés ou presque de porter l’uniforme des Bulls l’an prochain. Mike Dunleavy Jr. probablement aussi. Ils ont besoin de shooteur, pourquoi se débarrasser de leur meilleur qui en outre possède un salaire intéressant (environ $3millions). Derrick Rose bien entendu, mais dans quel état ? Et Carlos Boozer, va-t-il être finalement amnistié ? Nikola Mirotic va-t-il traverser l’Atlantique pour devenir le nouveau Kukoc ? Quel free agent les Bulls vont-ils réussir à attirer ? Melo, Lance Stephenson ou un autre ? L’été qui arrive va être chaud dans l’Illinois.

Il va commencer par la draft où les Bulls possèdent deux choix au premier tour. De quoi ajouter de la profondeur au banc à moindre coût, à l’image de ce qu’ils ont fait en récupérant Greg Smith avant les PlayOffs. Si l’intérieur est toujours blessé, il pourra servir de backup intéressant à Joakim Noah la saison prochaine pour moins d’$1 million. Nazr Mohammed devrait lui prendre sa retraite après 15 ans de bons et loyaux services dans la ligue. Les deux meneurs Kirk Hinrich et D.J. Augustin sont unrestricted free agents. Ils ont tous les deux exprimé leur envie de continuer à Chitown, mais à quel prix ? On en revient toujours à la question Boozer. Tant qu’il est sous contrat avec les Bulls, la marge de manoeuvre est quasi nulle. S’il part ou est amnistiée, elle s’agrandit sans être pour autant exceptionnelle.. un sacré casse-tête pour Gar Forman et John Paxson. Pour Thibs, cet été est crucial :

Nous étions à court de joueurs cette saison, mais nous sommes bien placés. La manière dont nous entourerons Derrick sera primordiale.

Une chose est sûre, cette équipe a besoin – en plus de Derrick Rose – d’un joueur capable de scorer et de créer son propre shoot. On ne passera pas une saison de plus à regarder cette horreur de jeu offensif, et surtout les Bulls ne pourront pas viser plus haut sans cela. Des points, de l’adresse longue distance et un marabout pour protéger Rose. Tels sont les objectifs de l’intersaison. C’est bizarre, ça ressemble étrangement au discours de l’an dernier…

Source image couverture: USA Today Sports