Old-School : la folle histoire de Michael Jordan et… LaBradford Smith

Le 19 mars 2024 à 15:39 par Céleste Macquet

Michael Jordan
Source image : Netflix

Mesdames et messieurs, est-ce que vous connaissez LaBradford Smith ? Probablement que non. On parle d’un arrière qui a moins de minutes en NBA qu’un Théo Maledon. Comment pourriez vous le connaître, à moins d’être un spécialiste? Pourtant, lors de la saison 1992-1993, ce sophomore va être malgré lui à l’origine de l’une des anecdotes les plus surréalistes de la carrière du grand Michael Jordan. 

Vous savez, quand il s’agit de déterminer qui a été le meilleur joueur de basketball de l’histoire, la conversation tourne souvent autour de LeBron James et Michael Jordan. Les goûts et les couleurs, chères à Daniel Riolo. Il est parfaitement acceptable d’avoir sa préférence pour l’un ou l’autre. Mais même un fan des Lakers avec le pseudo @René_LBJ23-6 sur Twitter serait prêt à le reconnaître : entre les deux, celui qui a la volonté de gagner la plus forte et le mental à toute épreuve, c’est bien Michael. Mais est-ce que l’obsession pour la victoire du numéro 23 originel allait parfois trop loin, c’est une question qui est en droit d’être posée. Pour bien illustrer cela, on peut se rappeler de ce que disait l’ancien coach de Michael Jordan, Doug Collins, quand un jeune Grant Hill était comparé à Air Jordan :

“Grant a tendance à vouloir que les gens l’aiment. Il voudrait rendre les gens heureux. Michael vous trancherait la gorge.”

Pour aller dans le sens de ce bon vieux Doug, laissez nous vous conter l’histoire de Michael Jordan et LaBradford Smith. Connaissez vous l’histoire de Michael Jordan et LaBradford Smith ? Vous l’a-t-on déjà contée ? Présenté comme ça on pourrait croire à une fable, mais croyez nous, elle n’en a de semblable que le nom. Pas vraiment de maxime à retenir à la fin. Il s’agit d’une anecdote qui dépeint parfaitement la mentalité de tueur et le degré de folie qui habitait Sa Majesté Air Jordan.

Tout commence le 19 mars 1993 au Chicago Stadium. Nous sommes au paroxysme de la première période de la carrière de Michael Jordan qui vient d’atteindre son pic de domination. Septuple meilleur scorer de la NBA, Michael est sur la route de son premier three-peat après avoir raflé l’or pour la deuxième fois aux Jeux Olympiques de Barcelone avec la Dream Team. Mais ce soir-là, face aux Bullets issu des profondeurs de la Conférence Est, Michael n’est pas vraiment dans son assiette. Un maigre 25 points et 3 rebonds avec un affreux 9/27 aux tirs. Ça ne rentre pas. Pire encore ! Un bleu, sorti de nulle part, l’a malmené toute la soirée.

“Les Bullets étaient horribles. Ils avaient drafté LaBradford Smith. Mais c’est ce que je dis toujours : ‘on ne sait jamais, ça pourrait être ton soir, on ne sait jamais !’ Ce soir ; c’était le soir de LaBradford Smith” – David Aldridge

LaBradford Smith enchaîne les paniers. Il sort le grand jeu face au MVP en titre. 37 points à 15/20 aux tirs et 3 passes décisives pour le jeune sophomore de Washington. Face à Michael Jordan. Quelle soirée pour LaBradford Smith! Il vient de faire la leçon à un défenseur de l’année et a fait dérailler l’adresse du meilleur scorer qu’on ait jamais vu en NBA alors.

LaBradford Smith scores a career-high 37 (15-20 FG) against Michael Jordan! #TheLastDance pic.twitter.com/JC8dWQiltW

— Ballislife.com (@Ballislife) May 11, 2020

Après le match, Michael Jordan déclare que LaBradford Smith lui a donné l’accolade et lui a dit “Bien joué, Michael” en sortant de la salle. Aïe. Dans le genre mauvaise idée… Quand on sait à quel point Michael Jordan a tendance à prendre les choses personnellement… Le fait est que : Michael Jordan l’a mal pris, Michael Jordan l’a même très mal pris.

Le lendemain, 20 mars 1993, back-to-back entre Bullets et Bulls, au Capital Centre de Washington. Avant le match, Michael Jordan déclare : “A la mi-temps, je vais avoir autant de points que ce gamin a eu à la fin du dernier match”. Pour rappel, il en avait 37. Smith et Jordan se serrent la main, le match commence, et là, c’est le déluge. On a rarement vu un joueur s’en prendre à ce point personnellement à un autre dans un sport collectif.

Michael Jordan inscrit 36 points dans la seule première mi-temps. Conclusions de alley-oops, finitions acrobatiques, tirs à 3-points en sortie de dribble, fade-aways tout y passe. LaBradford Smith semble perdu, hagard, sur le terrain. Il finit la nuit avec 15 points à 5/12 aux tirs, 1 rebond, 0 passe décisive, 0 interception et 0 contre. Et il s’est fait marcher dessus. Michael Jordan a pris tant d’offense d’un simple “Bien joué, Michael”, qu’il a humilié un jeune adulte devant 19 000 personnes.

Après cet épisode, LaBradford Smith n’atteindra plus jamais la barre des 20 points dans un match de NBA. Il ne participera jamais aux Playoffs et environ un an après cet épisode, il fut coupé et ne trouva jamais plus de contrat en NBA.

Shouts to LaBradford Smith though! 😂🙌#TheLastDance pic.twitter.com/UoLvQI17ud

— NBA on ESPN (@ESPNNBA) May 11, 2020

Sauf que.

LaBradford Smith n’a jamais tenu ces propos à Michael Jordan.

Quelques décennies plus tard, une rumeur se propage. Et si toute cette histoire était fausse ? Si LaBradford Smith n’avait jamais dit ça à Michael Jordan. Pleins de confusion, quelques journaleux se rendent alors auprès de Michael Jordan pour lui poser la question ; Est-ce que cette histoire s’est jamais produite ? Michael esquissa alors un sourire et il leur répondit  :

“Non, j’ai tout inventé.”

Tout cela, Michael Jordan l’a purement et simplement inventé, de A à Z. C’était faux. Bien sûr que c’était faux. LaBradford Smith n’a jamais mis ses bras autour de Michael Jordan pour lui dire “Bien joué, Michael” après le match de saison régulière entre Bulls et Bullets. Bien sûr qu’un sophomore sans grade ni histoires n’a pas nargué un triple MVP après un seul bon match face à ce dernier. C’est la même conclusion qu’on pourrait avoir à la fin d’une vidéo YouTube médiocre, l’anecdote était donc fausse. Cette histoire, révélée dans The Last Dance, nous dit presque tout ce qu’on a besoin de savoir sur l’esprit de compétiteur hallucinant et le joueur qu’était Michael Jordan. Il ne reculait simplement devant rien pour se mettre dans un état d’esprit adapté pour annihiler son adversaire.

The mentality of Michael Jordan | The Labradford Smith story #NBA #BullsNation pic.twitter.com/Nv2mCoXtIM

— The Jordan Rules (@Rules23Jordan) July 3, 2023

Il n’y a absolument rien que Michael Jordan ne ferait pas pour prendre un ascendant psychologique sur son adversaire. S’inventer des scénarios, écouter des voix dans sa tête, il ira jusqu’à céder à la folie si ça lui permet d’avoir plus de points que vous à la fin du match. LaBradford Smith plus que quiconque, en a fait les frais. En attendant, nous on vous laisse sur cette fable, qui en dit long sur cette histoire. Elle est de La Fontaine, si si!

La chèvre et le labrador :

L’esprit malade toujours l’emporte sur la raison,

Qu’il s’agisse de la réalité ou de pure motivation.

Pour arriver à ses fins mieux vaut s’imaginer,

Gagner, que se voir perdre et la défaite encaisser.

Au bord d’un précipice, ma foi ;

Se trouvait une chèvre et un labrador.

“Gageons, dit celui-ci, qu’en sautant par là

Avant vous j’atteindrai l’autre bord !”

L’animal s’élança et franchit le ravin,

Rit brièvement, et vers la chèvre se tourna.

La chèvre, vexée de l’offense du canin,

Bondit de ses sabots, et sur le labrador dunka.

“Voilà ce qu’il en coûte, de se montrer narquois”

Déclara la chèvre à son homologue, pantois.

En effet, dans mon histoire, j’ai omis de déclarer,

Que le détail du rire, la chèvre l’avait inventé !