Basket aux Jeux Olympiques – Melbourne 1956 : Bill Russell, l’or des JO avant les triomphes en NBA

Le 14 mars 2024 à 09:59 par David Carroz

Bill russell Jeux Olympiques 1956 Melbourne
Source image : FIBA

27 octobre 1956. Les Boston Celtics ouvrent leur saison en déplacement à New York où il battent les Knicks. Dans cette victoire, un absent de marque : le deuxième choix de la dernière Draft. Bill Russell, que Boston a récupéré aux St. Louis Hawks, n’est pas de la partie. Les Celtes attendront jusqu’au 22 décembre avant de profiter de celui qui va devenir la pierre centrale de leur domination. La raison ? Bill a mieux à faire, avec des Jeux Olympiques à remporter avec l’équipe américaine.

Et oui, si d’habitude les Jeux se déroulent l’été et laissent ainsi le temps aux ex-universitaires de s’offrir quelques jours de stage d’été pour faire du sport et un peu de tourisme à l’étranger aux frais de Team USA, l’édition 1956 diffère. Pour coller à la saison estivale australienne, les Jeux Olympiques de Melbourne sont décalés à fin novembre-début décembre. Soit après le début de la saison NBA. Peu de joueurs sont concernés par ce dilemme car l’amateurisme est encore strict pour les ballers aux JO. L’équipe américaine se compose donc d’universitaires, de soldats ou de joueurs AAU.

Bill Russell vient de boucler son cursus de quatre ans à l’Université de San Francisco par deux titres consécutifs NCAA. Il est entre deux eaux puisqu’il est drafté en NBA. Mais il négocie avec les Celtics pour pouvoir rester amateur. Bilan : Russell fait une croix sur six mille dollars pour les deux mois de NBA qu’il va manquer afin de défendre les couleurs américaines à Melbourne. Meilleur joueur de l’équipe championne, Bill fait logiquement partie de la sélection. Mais si la balle orange ne lui avait pas permis d’être du voyage, d’autres sports auraient pu justifier sa présence en Australie.

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Dans tous les cas, participer aux Jeux Olympiques était tout en haut de la Todo List de Bill Russell. Une opportunité qu’il n’aurait manqué pour rien au monde.

“Depuis mon enfance, il y avait ces icônes sociale et sportives dont j’entendais toujours parler. Et vous pensez à ces choses avec admiration. Et quand j’ai eu l’âge pour me qualifier aux Jeux Olympiques, je voulais y aller. […] L’honneur d’être aux Jeux était de participer. Pas de gagner mais de participer. Je voulais vraiment cela. Si je n’avais pas été pris dans l’équipe olympique de basketball, j’y serais allé pour participer au saut en hauteur. J’étais classé deuxième du pays au saut en hauteur donc d’une façon ou d’une autre, j’allais à Melbourne. Je voulais prendre part à cette expérience olympique. ”  – Bill Russell

C’est donc finalement sur les terrains de basket australiens que Bill Russell va faire profiter les États-Unis de ses incroyables qualités athlétiques. Et déjà poser les bases de la révolution qu’il va apporter en NBA en lui donnant immédiatement un impact international. Meilleur scoreur de Team USA avec 14,1 points – alors que ce n’est pas le domaine où il était le plus attendu – Bill Russell marque la compétition et les esprits adverses. Impossible de trouver les stats au rebond ou au contre, mais même sans les chiffres, d’autres éléments valident le carnage. Un adversaire s’est confié des années plus tard auprès de K.C. Jones – coéquipier de Russell à San Francisco, pendant les JO de 1956 et ensuite à Boston :

“Il se rappelait du match contre les États-Unis et disait qu’il n’avait plus jamais joué après nous avoir rencontré. Je lui ai demandé pourquoi et il a dit ‘parce que tous les tirs que j’ai pris, Bill Russell les a contrés'” – K.C. Jones

Cette verticalité n’était pas commune au basket dans les années cinquante. Pas plus que la vivacité, l’agilité et la vitesse de Bill Russell. Un pivot, c’était avant tout un mastodonte qui squatte la raquette et qui prend de la place. Les Soviétiques avaient d’ailleurs misé une grande partie de leurs Jeux en recherchant cette perle rare pour contrer les Américains. Et ils pensaient l’avoir trouvée en mettant la main sur Jānis Krūmiņš et ses 2m20. Problème : s’il mettait bien une bonne de dizaine de centimètres à Bill, Russ avait le temps de faire trois fois l’aller-retour depuis les vestiaires avant que Krūmiņš ne puisse se mouvoir d’un panier à l’autre.

 

Mais avant de virevolter autour du pivot letton, Bill Russell a mis en difficulté… les arbitres ! Lors d’un match du second tour face à la Bulgarie, les claquettes de Bill Russell sont sanctionnées par des coups de sifflet contre lui. Ce geste, bien que normalement toléré dans le règlement FIBA, prend une toute nouvelle dimension avec le futur intérieur des Celtics. Voir un joueur pousser la balle dans le panier à une telle altitude et avec une telle facilité déroute. Après quelques discussions entre les officiels et la délégation américaine suite au match, les arbitres comprennent qu’ils n’ont pas à siffler ce genre d’action.

Même si Bill Russell avait dû se retenir et se priver des claquettes, cela n’aurait pas suffi à freiner sa domination. Dans la défense agressive mise sur pied par les Américains, le pivot de San Francisco est la tour de contrôle qui dirige les opérations. Entre les tirs contrés et les passes déviées, il lance ensuite de nombreuses contre-attaques. Quand ce n’est pas lui qui les conclut. Oui, un pivot peut contrôler le jeu des deux côtés du parquet, imposant le rythme en défense comme en attaque.

Le titre en poche, Bill Russell peut savourer son triomphe. Et même se marier, une semaine après son retour sur le sol américain. Avant de poursuivre sa razzia avec les Celtics. Champion NCAA en mars 1956, médaille d’or olympique en décembre 1956, titre NBA en avril 1957. Treize mois chargés pour Russell, mais tellement symboliques de son impact individuel via une domination collective.