Zoom sur la Pace, et sur ces équipes qui jouent le pied sur le frein : rien ne sert de courir, il faut défendre à point

Le 29 déc. 2019 à 11:06 par Alexandre Taupin

Source : Youtube

Alors que tout va toujours plus vite, certaines équipes ont décidé d’aller à contre-courant en ralentissant le tempo. Un bon moyen d’éviter de se prendre des valises de points mais aussi une nécessité pour s’adapter à des profils de joueurs qui n’ont pas forcément les cannes pour faire du sprint non stop. Allez, dossier.

Sur les dernières années, lorsque quelqu’un parlait d’équipes rapides, tous les regards se tournaient vers Golden State, Houston ou le Milwaukee version Budenholzer. Toutefois, la tendance semblait se propager et désormais beaucoup de squads peuvent être catalogués comme des TGV, hors période de grève bien sûr. Pourquoi ? Une question de rythme privilégié sans doute mais aussi l’importance de faire du spectacle. Quitte à être une équipe bancale, autant perdre 130 à 120, au moins vous offrez du show et vous remplissez la salle (poke les Hawks, les Wizards, les Grizzlies). Malgré tout, cette vitesse de jeu chère à Mike D’Antoni n’a pas atteint tous les staffs et certains ont préféré opter pour un tempo bien moins soutenu. Voilà pourquoi on a décidé d’analyser certaines franchises sur les dernières années pour voir l’évolution de leur Pace et surtout se rendre compte de qui a une vraie continuité dans son projet tactique et qui varie pour s’adapter.

Premier candidat à la lenteur : les Denver Nuggets. Solide deuxième de la Conférence Ouest, le groupe de Mike Malone ne brille pas par sa vitesse ou son goût du spectacle mais les victoires s’enchaînent et c’est tout ce qui compte. 29èmes au classement de la Pace, les hommes du Colorado ont connu un vrai changement de style ces dernières années. Qui ne se rappelle pas du Denver tout feu tout flamme il y a deux ou trois ans qui jouait pour gagner 140 à 139 avec des match-ups contre Golden State où on annonçait des records de points à venir… Sixième au tempo en 2016-2017, puis quinzième en 2017-2018, vingt-sixième la saison passée et avant-dernier aujourd’hui : comment ne pas y voir une vraie volonté de ralentir le rythme ? Derrière ce choix, il y avait une double nécessité qui se voit sur le terrain mais aussi dans les chiffres. Premièrement, avec une raquette Millsap – Jokic, vous ne pouvez pas espérer courir dans tous les sens ou alors vous aurez une possession sur deux à jouer à trois contre cinq en attaque vu que les deux seront en train de ramasser leurs poumons. Autre motif : la défense. Qui dit moins de Pace dit moins de possessions pour l’adversaire et peut-être plus de jus pour revenir défendre. Sur la même période 2016-2020, le défensive rating des Nuggets est ainsi passé de la 29ème place à la seconde aujourd’hui avec des améliorations constantes. Difficile de ne pas y voir une corrélation hein ?

Deuxième équipe à qui nous intéresser aujourd’hui : le Magic. La franchise d’Evan Fournier est également connue pour son rythme “lent”, pas le genre à envoyer des matchs à 130 points toutes les semaines. En gardant le même créneau d’évolution 2016-2020, on constate que le Magic était tout d’abord dans la première moitié du classement de la Pace sur la période 2016-2018 avant de plonger dans les profondeurs. Pas besoin de faire HEC pour découvrir la raison de ce changement, elle tient en deux mots : Steve, et Clifford. L’ancien gourou des Hornets a débarqué en juin 2018 et a immédiatement posé sa patte à Disneyland, ramenant par la même occasion la franchise en Playoffs, une première depuis 2012. Tout comme Denver, on peut voir une amélioration drastique des stats défensives de l’équipe (huitième au rating l’an dernier contre vingtième la saison d’avant), et “étrangement” les résultats suivent.

Dernier exemple au programme : les Sacramento Kings, choix assez original mais qui s’imposait. En effet, nos amis de Sactown sont derniers niveau Pace en 2019-2020. L’équipe qui joue le moins de possession par match, l’équipe qui joue le plus lentement si vous préférez. Quoi ? L’équipe avec De’Aaron Fox, l’un des mecs les plus rapides de la ligue, joue à deux à l’heure ? Quel non-sens. Et pourtant… Ce qui est le plus intéressant avec les Kings c’est l’inconstance de leur Pace. En 2017-2018, ils étaient derniers en tempo, probablement dû au fait qu’ils avaient Zach Randolph dans le cinq et qu’on l’aurait retrouvé en petit morceau à trop accélérer. 2018-2019, on vire les dinosaures et ça pique du sprint à fond pour remonter à la troisième place. Un vrai bolide. Et puis cette année, changement de coach, nouveau rythme et on repart dans les bas-fonds. Vous allez probablement vous dire que, comme les autres, on va sortir le fait qu’ils ont bien fait car leur défense est meilleure mais en fait… pas exactement. Certes, leur défense est meilleure que l’an dernier (16ème rating contre 21 il y a un an) mais elle est surtout bien meilleure qu’il y a deux ans et pourtant ils étaient aussi lents à l’époque…

Comme l’expliquer alors ? Tout simplement parce que la Pace n’est qu’un indicateur de rythme de jeu et pas de force défensive. Vous pouvez aller à deux à l’heure, défendre comme des pieds et vous en prendre 120 (exemple : Cleveland et Charlotte). Un tempo contrôlé doit aller de pair avec une vraie identité défensive que les Kings ne possédaient pas en 2017-2018, du fait qu’ils avaient alors un très jeune groupe sans vrai stoppeur. Ce n’est en rien une critique contre Sacramento car Denver était également médiocre défensivement avant de prendre ses marques et de devenir une vraie équipe de chieurs sur le plan défensif. De même, une Pace élevée peut aller avec une excellente défense. Milwaukee a le meilleure défensive rating de la ligue tout en jouant… à fond les ballons. On a malheureusement tendance à trop allier les deux du fait des exemples qui se présentent à nous : Wizards, Hawks, Pelicans… Des équipes qui ont clairement tendance à délaisser une moitié de terrain sur deux alors que l’équilibre parfait serait de combiner vitesse ET ténacité défensive comme le font les Bucks mais aussi les Clippers. Deux modèles qui ne font pas tâche dans l’optique de viser haut.

Le combo Pace / Défense n’est pas une science exacte, mais croire qu’un rythme de fou entraîne inévitablement une défense pourrie c’est un non-sens total, tout comme s’imaginer qu’il faut traîner des pieds pour mieux défendre son panier. Le tempo s’adapte aux joueurs, la défense doit être une constante.  


Tags : NBA, Pace