Isaiah Austin s’éclate en Chine : sa carrière professionnelle est définitivement lancée, et ça promet

Le 27 août 2018 à 18:51 par Aymeric Saint-Leger

isaiah austin
Source image : Youtube/NBA

Parmi les histoires marquantes estampillées feel good dans le petit monde de la NBA, on retrouve celle d’Isaiah Austin. L’ancien de Baylor en NCAA avait finalement été déclaré apte à la pratique du basket de haut-niveau, malgré le fait qu’il soit touché par le syndrome de Marfan. Malgré les réticences de la part de nombreux clubs, il a débuté sa carrière professionnelle il y a moins de deux ans, et tout se passe pour le mieux pour lui. IA fait des ravages en NBL, la seconde ligue chinoise, une manière de vivre son rêve, et plus généralement, de vivre sa vie comme il le souhaite.

Des joueurs NBA aux parcours rocambolesques, semés d’embûches, on en connaît. Une histoire comme celle d’Isaiah Austin, il n’y en a que très peu. Le jeune joueur a été tragiquement déclaré non-apte à la pratique du sport de haut-niveau trois jours avant sa Draft, en 2014. Il a été diagnostiqué du syndrome de Marfan, une maladie qui fait gonfler l’aorte en cas d’effort physique trop intense. Dans un sport de contact, cette artère, reliée au cœur, peut prendre du volume, et se déchirer, causant une mort subite. Malgré toute sa bonne volonté, le jeune talent de Baylor voit son rêve d’enfance exploser en plein vol et est logiquement inconsolable, malgré le beau geste d’Adam Silver, ou encore la sollicitude de la NBA qui lui offre un job afin d’assurer son avenir. Lui, ce qu’il veut, c’est jouer au basket. Complètement désabusé, il veut trouver une solution. C’est ainsi que fin 2015, en consultant des spécialistes qui font des examens réguliers sur son cœur, il reprend peu à peu les pick-up games, à basse intensité néanmoins. L’objectif : voir si un changement est provoqué par l’effort physique. Les examens sont concluants, son artère n’enfle pas, et le joueur paraît en parfaite santé. Son docteur, Dr. Liang, ne constate aucun changement, aucune complication au fur et à mesure des entraînements et des petits matchs. Son corps répond tellement bien à l’effort, même sans retenue, que ce spécialiste finit par lui autoriser la reprise de la compétition. Il ne s’agit pas exactement d’un feu vert médical, mais d’une analyse poussée des risques, qui est concluante. Il est atteint par cette maladie dite “de Marfan” mais de manière légère, ce n’est pas un cas extrême. Le docteur a exposé les risques à IA, qui les a considéré, et qui a souhaité se lancer à nouveau dans l’aventure, une fois que ces tests physiques ont été effectués. Un soulagement énorme pour le joueur, son entourage, et pour sa mère, qui témoigne :

“Je savais dans mon cœur qu’Isaiah sortait d’un trou très profond, qu’il revenait de très loin. Je l’ai vu sourire à nouveau.”

Mais tout n’allait pas être si facile pour Isaiah Austin. Alors que plusieurs équipes NBA souhaitaient faire des tests avec lui, ou lui faire signer un contrat avec leur équipe affiliée en G League, elles n’y ont pas été autorisées. Pourquoi ? Et bien, la NBA n’interdit pas les joueurs porteurs de ce syndrome en son sein, mais elle suit les recommandations de l’American Heart Association et de l’American College of Cardiology. Ces institutions déconseillent fortement la pratique de sport de contact lorsqu’on est porteur de ce syndrome. D’autres tests sont réalisés, qui montrent une nouvelle fois que Isaiah Austin est atteint par ce syndrome de Marfan. Même si ce n’est pas un cas extrême, la Ligue ne veut prendre aucun risque avec les problèmes cardiaques, d’autant plus actuellement après le triste décès de Zeke Upshaw cette année. Ainsi, IA, aussi atteint de cécité à l’œil droit, voit la NBA s’éloigner de manière sans doute définitive. Sa maladie fait peur, et de nombreux clubs, aux États-Unis ou ailleurs, sont réticents de signer un joueur qui peut potentiellement décéder sur le terrain, question de responsabilités. Période de doute à nouveau, jusqu’à début 2017. La lumière va venir d’un club serbe, FMP, qui accepte de l’enrôler, en ayant acté le fait que le club ne serait pas responsable en cas de problème. Ça y est, le 15 janvier 2017, le mastodonte de 2m16 joue son premier match de basket professionnel. Ses 9 points et 4 rebonds sont anecdotiques, c’est une grande victoire, un triomphe incroyable pour lui et sa famille. Sa carrière enfin lancée, tout s’enchaîne vite pour IA, malgré les difficultés d’être dans de nouveaux pays. Sa compagne le rejoint en Serbie, où ils donneront ensemble naissance à leur premier enfant, à Belgrade. Puis direction la Chine, chez les Guangxi Rhinos. Et là, c’est parti, vraiment. Il casse la baraque en NBL, à l’été 2017. Après un crochet par les Yulon Luxgen Dinos, puis par le Liban cet hiver, il retourne chez les Guangxi Rhinos cet été, et est au taquet, comme il le raconte dans le très bon dossier de Leo Sepkowitz de Bleacher Report.

“Je suis vraiment en pleine forme, c’est pourquoi c’est vraiment blessant que les gens ne me donnent pas une opportunité. […] Même après avoir joué ces épuisantes minutes, et en travaillant, en m’entraînant chaque jour, il n’y a aucune régression au niveau de ma santé. Ma santé va juste de mieux en mieux, je suis en meilleure santé au fil du temps.”

Deux ans après avoir attaqué sa carrière professionnelle, tout va bien pour Isaiah Austin. Son artère aorte ne bouge pas d’un poil, il n’a aucune complication. Il aligne des statistiques remarquables, à coup de 35,1 points à 53% au tir, 10,3 rebonds, 1,8 block et 0,9 steal de moyenne avec son équipe cette saison. Malgré ses 2m16, il prend sept tirs du parking par match.  Il s’apprête d’ailleurs à attaquer les Playoffs de la NBL ce 29 août. Cela apparaît miraculeux, inespéré, mais tout roule pour l’intérieur de 24 ans, et ce malgré le fait qu’il joue un gros nombre de minutes, parfois l’intégralité des matchs, 48 minutes en une soirée. Pour quelqu’un dont la vie est supposée être en danger en cas de gros effort physique, il ne se ménage pas. Ceci dit, il est simplement heureux de pouvoir avoir un ballon orange dans ses mains, de faire de sa passion son métier, et de jouer libéré. Il est d’ailleurs en pleine confiance, et n’hésite pas à le clamer haut et fort.

“Je suis juste heureux de pouvoir rejouer, parce que c’était la chose qui me manquait le plus dans la vie. Cela me tuait à petit feu d’être loin des terrains. Poursuivre une carrière professionnelle et gagner une belle quantité d’argent pour prendre soin de ma famille est quelque chose dont je suis très reconnaissant, pour laquelle j’ai beaucoup de gratitude. […] Je ne pense jamais à ma santé lorsque je joue. Je sais comment je me sens, je connais mon corps, je sais que je suis en bonne santé. […] Je suis un mismatch complet sur le terrain. Je n’ai pas croisé quelqu’un dans cette Ligue qui tient la comparaison avec moi.”

Isaiah Austin cartonne tout, dans l’équipe de Sim Bhullar. Les chiffres sont éloquents, et la santé va bien. À partir de là, peut-on l’imaginer un jour en NBA ? Au niveau du talent, même si le championnat chinois est faible défensivement, il en aurait les moyens. Malheureusement, la réponse est probablement non, tant la position de la Grande Ligue paraît immuable sur ce thème. IA n’ira peut-être pas jusqu’au bout de son rêve, il peut ceci dit faire une très belle carrière en Chine et en Europe. Il a l’avenir devant lui, et son histoire donne vraiment de l’espoir, surtout lorsqu’on voit au niveau auquel il évolue aujourd’hui, où il prend juste du plaisir sur le terrain. C’est tout ce qu’on peut souhaiter à Isaiah Austin, et à Jonathan Jeanne d’ailleursHot TrashTalk. Notre “petit” frenchie de 2m18 est atteint du même syndrome que l’Américain. Le Guadeloupéen avait donc également été refusé à la Draft 2017, de quoi briser son rêve de NBA, alors qu’il était attendu en fin de premier tour de celle-ci. Il a suivi le même chemin qu’Isaiah Austin, en allant consulter le Dr. Liang. Et en suivant le même processus, il a été déclaré apte à la compétition de haut niveau en juin. Il risque d’être confronté au même problème qu’IA pour intégrer la Ligue d’Adam Silver. Malgré tout, on peut souhaiter aux deux jeunes hommes d’avoir des carrières florissantes, pleines de bonheur, et surtout en parfaite santé.

Espérons que Jonathan Jeanne puisse également trouver des clubs qui l’accepteront malgré le syndrome dont il est atteint. Isaiah Austin, lui, a pu vraiment lancer sa carrière, démontrer son talent, et prendre du plaisir sur un terrain de basket. Les choses les plus simples sont parfois les plus belles, et c’est bien le cas pour l’Américain qui semblait perdu pour le basket de haut niveau il y a quatre ans. C’est une sublime histoire qui suit son cours pour IA, et ça ne fait que commencer, pour lui comme pour JJ. Plaisir, santé, lorsque la passion est plus forte que tout, elle peut soulever des montagnes, et réaliser des miracles. Les risques sont réels, mais le jeu en vaut la chandelle, pour ne plus survivre, mais vivre. 

Source texte : Bleacher Report