Run and gun façon “tiny ball” chez les Suns : trop petit pour aller en Playoffs ?
Le 12 janv. 2015 à 18:16 par Alexandre Martin
Quand ils ont fait signer Isaiah Thomas en juillet dernier, les Suns ont toujours affirmé que leur but était bien de garder Goran Dragic ainsi qu’Eric Bledsoe. L’idée : instaurer une rotation entre ces 3 joueurs afin de toujours en avoir au moins un voire deux sur le parquet et ainsi pouvoir maintenir un rythme de jeu très élevé pendant 48 minutes sans jamais laisser l’adversaire souffler.
Jeff Hornacek s’en donne d’ailleurs à cœur joie. Il a même décidé de pousser l’expérience encore plus loin puisqu’il n’hésite pas à mettre ses trois meneurs simultanément sur le parquet. Dans ce cas, Isaiah Thomas est celui qui occupe le poste 1, Eric Bledsoe le poste 2 et Goran Dragic le poste 3 si tant est qu’on puisse encore considérer les postes comme bien définis dans cette configuration. Thomas mesure 1m75, Bledsoe 1m85 et Dragic 1m91… Oui, c’est petit ! Alors quand, par séquences, Coach Hornacek leur adjoint carrément P.J. Tucker (1m98) en guise d’ailier fort et Markief Morris (2m07) au poste 5, on ne peut même plus parler de “small ball” mais bien de “tiny ball”. Avant, on jouait “petit” à Phoenix mais ça, c’était avant. Maintenant, on joue “tout petit”. Le but ? Jouer vite, jouer ultra vite et pour cela, il faut donc avoir plusieurs manieurs de ballons sur le terrain. Le but du coach des Suns est donc de faire jouer son équipe le plus vite possible sans hésiter à prendre des tirs très tôt dans l’horloge. Cette une philosophie qui, de toutes façons, est en place depuis longtemps à Phoenix…
“Nous devons jouer ainsi.” Jeff Hornacek
Et oui, il ne faudrait pas oublier que si l’ami Hornacek est le plus souvent connu comme un ancien Jazz, il a été drafté par les Suns et a passé ses 6 premières saisons en Arizona de 1986 à 1992. C’est même sous le maillot de Phoenix, que cet arrière shoteur très efficace a réalisé sa meilleure saison statistique en 1991/1992 avec 20,1 points (51% au tir dont 44% à 3 points !) accompagnés d’un peu plus de 5 rebonds, 5 passes décisives et 2 interceptions de moyenne. Et croyez moi, à l’époque, les Suns ne faisaient pas de le jeu placé ou dans les gros systèmes à multiples écrans. C’était contre-attaque sur contre-attaque, pick-and-roll sur pick-and-roll et ce bon Jeff jouait les tireurs d’élite. Bref, le jeu rapide, il connaît sur le bout des doigts Hornacek…
Par ailleurs, en se penchant rapidement sur certaines statistiques concernant ces Suns, on peut en relever quelques unes assez significatives. Par exemple, les Suns prennent un peu plus de 25% de leurs tirs dans les 6 premières secondes de l’horloge et leur réussite sur ces shoots est de 56% dont un excellent 42,2 derrière l’arc ! On remarque également que ce pourcentage diminue au fur et à mesure que l’horloge défile pour carrément tomber à 27,8% à 3 points dans les 4 dernières secondes ! Les tirs pris en première intention seraient-ils les meilleurs que les Suns puissent se procurer ? Hornacek semble en être plutôt convaincu comme il a pris soin de le rappeler récemment :
“Parfois cela va nous jouer des tours (de jouer si vite et de shooter en première intention). Cotton Fitzsimmons (coach des Suns de 1988 à 1992, paix à son âme) m’a toujours dit que si j’avais un tir ouvert à 6 mètres avec 22 secondes sur l’horloge, il fallait que je le prenne parce que ce serait peut-être le meilleur tir que nous allions avoir.”
En clair, plus les Suns jouent vite, mieux ils shootent donc plus ils scorent et ont de chances de remporter un match ! La raison ? Thomas, Bledsoe et Dragic sont tous les trois extrêmement rapides balles en mains, ils sont tous les trois capables d’attaquer le cercle à tout moment, de distribuer sur des shooteurs ouverts et bien sûr de prendre eux-mêmes le tir s’il le faut. En structurant ses rotations autour de ces trois dragsters, Coach Jeff s’assure d’en avoir toujours au moins un sur le parquet, très souvent deux tout en proposant régulièrement des séquences de match avec les trois en même temps sur le terrain. Le résultat est clair : même avec un début de saison en dent de scie et malgré un collectif qui semble clairement mettre du temps à se mettre en place, les Suns ont une attaque parmi les plus dangereuses de NBA. Avec 107 points marqués par rencontre, ils sont quatrième de la ligue. Seuls les Warriors, les Mavericks et les Raptors font mieux ! La force de frappe de la traction arrière venue d’Arizona associée aux superbes progrès affichés par Markieff Morris ainsi qu’à la violente folie qui envahit Gérald Green à chaque fois qu’il foule un parquet sont autant d’armes que l’escouade de Phoenix utilise pour user les défenses adverses.
Evidemment, cette stratégie, cette philosophie de jeu comporte deux inconvénients majeurs qui sont assez directement liés au manque de taille des joueurs sur le parquet. Pas facile de défendre efficacement et de tenir le choc au rebond. D’ailleurs, Phoenix est 16ème de la ligue au rebond (42,5 prises par rencontre) ce qui est correct mais sans être au top et surtout, les Suns encaissent 105 points en moyenne par match ce qui est beaucoup trop. La preuve : seuls les Lakers et les Wolves font moins bien cette saison. Les Sixers, les Nuggets ou encore les Celtics encaissent moins de points ! Comme on dit outre-Atlantique : “Come on guys !”. Bien sûr, la vitesse à laquelle sont disputés les matchs des Suns a pour conséquence un nombre de possessions très élevées et donc plus de points marqués ou encaissés à l’arrivée. Mais c’est tout de même un réel souci pour ces Suns qui ont déjà perdu plusieurs matchs très serrés (et à leur portée) cette saison. Des matchs – contre les Bucks, les Clippers ou les Pistons – qu’ils auraient certainement pu compter dans la colonne des victoires s’ils avaient su faire les bons stops défensifs dans quelques moments clé.
Ceci dit, il faut bien reconnaître qu’avec l’utilisation de ce “tiny ball”, parfois en fin de match, Phoenix se retrouve avec Bledsoe qui défend sur un arrière à qui il rend très souvent 10 centimètres et Dragic lui, doit essayer de tenir le poste 3 où il croise clairement des bébés beaucoup plus gros que lui. Pour courir, jouer vite, c’est parfait mais pour tenir en défense face à une attaque placée, c’est tout de suite beaucoup plus difficile. Gerald Green est beaucoup plus athlétique que n’importe qui en NBA Goran Dragic mais il n’est pas ce qu’on peut appeler un chien en défense. Markieff Morris tient assez mal le poste bas, son frère est encore pire. Du coup, la défense de Phoenix repose sur P.J. Tucker – qui se donne toujours à fond et sait imposer ses musculeuses épaules – ainsi que sur les deux pivots Alex Len et Miles Plumlee qui donnent de leur personne sous les cercles mais se retrouvent trop souvent livrés à eux-mêmes. Cette situation a encore une fois sauté aux yeux lors des deux deniers matchs des Cactus. Deux défaites – contre les Spurs et les Grizzlies – face à des équipes sérieuses de l’Ouest que les Suns ont carrément malmené avant de laisser filer la rencontre en fin de match à cause de quelques errements défensifs et d’une certaine nervosité qui sort parfois les joueurs du match.
L’année dernière, Phoenix a surpris tout le monde en montrant que l’effectif avait bien plus de talent que ce qu’on pouvait imaginer. Cette saison, avec un roster renforcé à tous les niveaux, les Suns ambitionnent d’aller en Playoffs. Mais peuvent-ils sérieusement l’envisager avec ce small ball virant régulièrement au tiny ball ? Peuvent-ils fournir les efforts défensifs suffisants pour arracher les quelques victoires qui pourraient faire la différence en fin de saison si jamais le Thunder continue d’évoluer lui aussi de manière aussi irrégulière ? Sincèrement, ce n’est pas sûr du tout. C’est bien dommage pour les Suns et leurs fans mais la dure réalité de la NBA risque de les rattraper et de les priver de Playoffs à nouveau cette saison…