Quand Reggie Miller clashait Spike Lee : retour sur le choke sign, symbole ultime de trashtalking

Le 12 sept. 2013 à 11:09 par David Carroz

Reggie Miller vs Spike Lee
Source image : Youtube

Séries cultes, joueurs de légende, rivalités exacerbées, parcours atypiques… Régulièrement, une histoire sur la NBA pour briller en société. Alors profitons de cette période creuse et sans match pour nous cultiver un peu.

Alors que les néo Nets Jason Terry et Paul Pierce commencent à chambrer les Knicks et font monter la sauce sur une rivalité – potentielle – entre les deux franchises de New York, revenons sur celle des années 90 qui opposait à l’époque l’unique équipe NBA de Big Apple et les Pacers. 6 confrontations en Playoffs entre 1993 et 2000, c’est bien plus que des déclarations tapageuses d’avant saison.

Et pourtant, tout commence avec des mots. Ceux de Reggie Miller pour John Starks lors du premier tour en 1993. Les Knicks ont fini avec le meilleur bilan à l’Est alors qu’Indiana ne passe que grâce à un tie breaker. Si New York se qualifie sans souci, le Game 3 donne une idée de ce que seront les futures confrontations.

“Au début du match, je tends ma main et John Starks refuse de la serrer. Je me suis senti en mission, je vais mettre ce mec dans l’embarras.” Reggie Miller

Gros trashtalker qui ne se laisse impressionner par personne, le joueur des Pacers va faire payer l’insolent. Indiana mène, Miller est au dessus de Starks.

“John, regarde ta ligne de stats… Tu te fous de moi ? Tu es censé être un titulaire au poste de shooting guard dans cette ligue…”

La suite ? Malgré les avertissements de Pat Ewing, l’arrière new-yorkais dégoupille et met un coup de tête à Miller qui en rajoute un peu. Expulsion. Les Knicks sortent Indiana en 4 matchs. Mais le rendez-vous est pris pour les prochains Playoffs.

Prochaines batailles serait-on tentés de dire. Car si tout oppose les états de New York et d’Indiana, les équipes sont proches. Un jeu rugueux, des effectifs remplis de testostérone, des joueurs qui montrent les muscles au moindre contact. Pas de flopping (bon ok, un peu pour Reggie Miller quand même). Pas de panier facile. Si on ne peut pas contrer, on fait faute. Une grosse faute de préférence pour éviter le and 1. Welcome to 90’s. Welcome to Eastern Conference basketball.

1994. Le départ de Jordan laisse les deux franchises rêver aux finales NBA. Elles se rencontrent d’ailleurs en finale de conférence. New York a encore l’avantage du terrain. Les fans des Knicks chambrent Reggie Miller en chantant “Cheryl, Cheryl” pour lui rappeler qu’il n’est que le frère de la meilleure joueuse de basket US.

“Je n’ai jamais chanté la chanson sur Cheryl” Spike Lee

Pas besoin. En effet, le fan le plus célèbre de la franchise new-yorkaise est beaucoup plus agressif. Lors du Game 5, alors que les Knicks se dirigent vers une victoire qui doit leur permettre de mener la série 3-2, le réalisateur s’adresse directement à Reggie Miller depuis le premier rang où il siège. Le joueur des Pacers passe un moment difficile, entre les chants du public et la défense rugueuse de John Starks (qui n’a pas oublié le contentieux de l’année précédente).

“Sur tous les playgrounds US, il y a un petit qui ne sait pas bien jouer mais qui parle beaucoup, pour raconter n’importe quoi. Les meilleurs veulent gagner le match et le faire taire.” Ahmad Rashad à propos de Spike Lee.

Miller a scoré 14 points avant le 4ème quart temps. Il prend alors le match à son compte, motivé comme jamais par l’ambiance hostile et par la volonté de clouer le bec de Spike Lee.

“Il faisait partie du match” Reggie Miller sur son “admirateur”

Miller rentre 2 tirs primés puis un jump shot alors qu’Indiana était mené 70-58. Il toise une première fois Spike Lee, l’ambiance monte d’un cran. Un autre 3 points, après lequel il va directement s’adresser à Lee en train de gesticuler au premier rang. Do the right thing, n’est-ce pas? Indiana est revenu sur les talons des Knicks qui sentent le match leur échapper. À l’instar de leur fan le plus célèbre qui essaie toujours de sortir Miller de la partie en lui criant dessus. Mais c’est tout le contraire. Lors de lancers francs pour les Pacers, Miller se tourne vers le réalisateur et franchit alors un nouveau palier dans le trashtalking. Choke Sign. Il mime l’étranglement pour signifier à Spike Lee que lui et les Knicks sont en train de craquer et qu’ils vont mourir. Puis il s’attrape les corones pour montrer clairement que ce soir, au Madison Square Garden, les plus grosses sont du côté des Pacers et de leur numéro 31.

“Plus il marquait, plus il se tournait vers Spike Lee.” Byron Scott, coéquipier de Miller aux Pacers

Chaque panier de Reggie sera encore l’occasion d’un regard appuyé en direction de celui qui maintenant se fait de plus en plus petit sur son siège. Mais le mal est fait. Miller finit le match à 39 points, dont 25 dans le seul quatrième quart temps. Indiana remporte le match et pense avoir fait le plus dur. Le lendemain, tous les journaux de Big Apple critiquent Spike Lee et le jugent responsable de cette défaite et du coup de chaleur de Reggie Miller le “Knick Killer“. Heureusement pour le réalisateur, New York renverse la tendance au match suivant et se qualifie en 7 matchs pour les finals.

L’année suivante, les Pacers élimineront les Knicks en 7 matchs lors de la demi-finale de Conférence. Lors du Game 1, Miller marquera 8 points en 9 secondes. En 1998, même histoire, Indiana sort New York au même stade de la compétition. 1999 verra les Knicks, pourtant derniers qualifiés à l’Est, se hisser jusqu’en finale NBA en éliminant les Pacers, grâce en partie à une action à 4 points de Larry Johnson restée dans les anales. Mais ce sont d’autres histoires à raconter prochainement.

La rivalité Pacers – Knicks a été une des plus intenses de la fin du siècle dernier. Elle aura accouché de moments d’anthologie, dont le clash Reggie Miller – Spike Lee fut l’un des points culminants. Et un sommet de l’histoire du trashtalking. Les Brooklyn Nets sont-ils prêts à relancer une rivalité aussi forte avec leurs voisins lors des prochaines années? Avec Pierce, Garnett ou Terry, les Nets ne manquent pas de grandes gueules. Mais encore faut-il se croiser en playoffs et le prouver sur le terrain.