Le licenciement de Mike Budenholzer par Milwaukee est-il injuste ?

Le 05 mai 2023 à 12:55 par Arthur Baudin

Mike Budenholzer 7 avril 2020
Source image : YouTube

Excellent entraîneur licencié pour ne pas avoir battu d’autres excellents entraîneurs – qui auraient eux-mêmes été licenciés s’ils ne l’avaient pas battu – cherche nouveau pied-à-terre duquel il ne sera pas licencié pour ne pas avoir battu d’excellents entraîneurs. L’idée n’est pas synthétique, mais le cercle vicieux, lui, est cruellement inscrit à l’ordre du jour.

« Ce sont des étapes vers le succès. Il n’y a pas d’échec dans le sport ».

Giannis Antetokounmpo aura beau jouer l’entrepreneur Instagram énervé par la trop simple question d’un journaliste, il devient difficile de réfuter l’échec lorsque celui-ci provoque la chute d’un pilier. Mike Budenholzer est resté cinq ans à Milwaukee. Cinq années lors desquelles les Bucks ont remporté le plus grand nombre de victoires en saison régulière et en Playoffs. Trois premières places à l’Est (2019, 2020 & 2023) et deux troisièmes (2021 & 2022), portées par l’équilibre d’un Big Three Jrue Holiday – Khris Middleton – Giannis Antetokounmpo. Une ère de domination silencieuse, dessinée par le velleda de Mike Budenholzer, ancien assistant des Spurs sorti de l’école Popovich. Les cours ont visiblement payé : Milwaukee décroche le second titre de son histoire en juillet 2021. Une année auparavant, Giannis Antetokounmpo – pourtant MVP de la saison régulière – s’empalait sur la défense de Bam Adebayo. Les ajustements tactiques ont été faits. Cônes de fête et confettis, Mike Budenholzer est prolongé jusqu’en 2025 par sa direction.

Si l’on devait résumer les deux années qui ont suivi le titre des Bucks comme des gros porcs, ce serait : blessure de Khris Middleton en 2022, sortie en demi-finale de conf’ face à des Celtics au complet, puis grosse gêne de Giannis Antetokounmpo en 2023, et élimination au premier tour contre un Heat qui a su mettre l’intensité au moment opportun. Ajoutez à cela l’impuissance d’une tablette et d’un velleda devant l’indécent Jimmy Butler, performeur en dehors des schémas cartésiens, et – en ce point – le seul vrai reproche que l’on peut faire à Mike Budenhozler est de ne pas être entré sur le terrain pour le défendre lui-même. Il y a eu des oublis de temps morts, quelques rotations défensives mal choisies, Brook Lopez sorti sur l’égalisation de Jimmy Butler dans le Game 5 – alors qu’il aurait pu/dû jouer au protecteur de cercle. On ne s’attendait pas non plus à ce que Kyle Lowry et Gabe Vincent soient des Steve Nash 2008. Grosso modo, une liste de potentielles erreurs du Bud longue comme les segments de son franchise player, qui – avec le recul nécessaire – fait de cette série contre le Heat… une série foirée. Une. Pas deux hein, une. Une série foirée qui, ce jeudi, lui a valu une belle lettre en recommandée signée de sa direction. Le Coach de l’année 2018-19 est remercié pour tout le travail abattu, mais doit désormais aller le faire ailleurs. Cruel. Pas forcément inattendu, mais tellement précédé d’un rien. Un contraste marqué avec cinq années de tranquilité d’esprit dans le Wisconsin.

En 55 années d’existence, les Milwaukee Bucks ont remporté deux titres. Un en 1971, sous l’étiquette du coach Larry Costello, finalement remercié après six saisons sans jamais être parvenu à réitérer la même percée. Une décision apparue logique : les Bucks de Costello avaient débuté l’exercice 1976-77 en 3-15, après deux saisons terminées dans le négatif (38-44 et 38-44) . Le second sous le tutorat de Mike Budenholzer, lâché bien plus rapidement, deux ans seulement après le titre de 2021. Son bilan depuis ? 109 victoires pour 55 défaites en saison régulière, la suprématie de l’Est cette saison, et un chouette équilibre maintenu autour de Giannis Antetokounmpo, mis en valeur dans sa quête – non avouée – de discussion All-Time. Tiens, on ne lui a pas demandé son avis mais Damian Lillard le donne quand même – et dans un papier voulu distant des opinions du rédacteur, ça nous arrange bien.

« Les gens d’ici virent des entraîneurs champions dès qu’ils ne gagnent pas le championnat… » – Damian Lillard

Folks out here firing championship coaches as soon as they don’t win the chip …

— Damian Lillard (@Dame_Lillard) May 4, 2023

S’engage-t-on dans une course à la victoire si effrénée qu’en face de la défaite, les directions en oublient parfois certains paramètres atténuants ? Giannis Antetokounmpo s’est tenu le bas du dos sur toute la série, la faute à une vilaine chute au Game 1. Son profil d’attaquant, essentiellement porté sur ses qualités athlétiques et son allonge – tout ce qui appuie sur une douleur en bas de dos – l’a restreint dans ses possibilités contre Jimmy Butler/Bam Adebayo. Et malgré cette analyse sûrement dressée dans les bureaux des patrons, c’est Mike Budenholzer qui a payé. Milwaukee prend donc le risque de se séparer du bonhomme qui a ramené la culture de la gagne dans le Wisconsin, sous couvert de deux éliminations consécutives en Playoffs, lesquelles étaient pourtant accompagnées de leurs circonstances. Jon Horst, GM des Bucks, a été le premier à réagir à l’éviction de Budenholzer : « Nous sommes reconnaissants de la culture de la victoire et du leadership que Mike Budenholzer a contribué à créer à Milwaukee ». Puisse Horst et tous les autres ne pas regretter une décision précipitée, tombée dans le stéréotype d’une ère où tout doit arriver trop vite. Parce qu’un titre peut parfaitement justifier six, sept ou huit années de disette, et qu’il n’est pas vraiment quantifiable.

Tirage de rideau sur l’ère Mike Budenholzer à Milwaukee. On pensait que ce moment arriverait contre la volonté de la franchise et de ses décideurs, il en est finalement tout le contraire. Si on dit « triste époque », ça fait un peu trop boomer ?