Giannis Antetokounmpo prend racine à Milwaukee : une décision à contre-courant qui peut lancer une nouvelle mode en NBA ?

Le 16 déc. 2020 à 15:48 par Nicolas Meichel

giannis antetokounmpo preview
Source image : NBA League Pass

La bombe est tombée mardi soir, après des semaines d’attente. Éligible à une supermax extension durant l’intersaison, Giannis Antetokounmpo a finalement décidé de prolonger avec sa franchise des Bucks au lieu de tester le marché en 2021, où il aurait pu s’envoler vers une destination plus sexy. Une décision marquante après une décennie caractérisée par le mouvement de nombreuses stars dans l’ère du player empowerment. De quoi changer la dynamique ?

L’attente devenait de plus en plus pesante en même temps que la date butoir du 21 décembre approchait. Depuis plusieurs mois, certaines franchises manigançaient dans leur coin en pensant fortement à la Free Agency 2021, déjà intitulée la Free Agency de Giannis avant même que ce dernier ait décidé quoi que ce soit. Mais au final, il n’y aura pas de Free Agency de Giannis. En signant le plus gros deal de l’histoire de la NBA, le Greek Freak a choisi de continuer l’aventure dans la franchise où il a été drafté en 2013, mettant ainsi fin à toutes les spéculations et autres rumeurs qui auraient clairement explosé en cas de refus. Milwaukee ne vivra donc pas ce genre de saison où la pression du résultat est maximale, avec un gros nuage menaçant qui recouvre le ciel de la ville et qui peut potentiellement provoquer un orage de grêle. Contrairement à Cleveland avec LeBron James ou Oklahoma City avec Kevin Durant, les Bucks pourront aborder la campagne à venir avec sérénité mais aussi ambition. Et ça, c’est évidemment une énorme nouvelle pour la franchise de Milwaukee, où les stars n’ont pas l’habitude de se poser et où la Draft représente le meilleur moyen pour construire une équipe capable de jouer les premiers rôles dans la Ligue. Mais cette décision dépasse largement les frontières du Wisconsin. Car on parle ici d’un double MVP de la NBA, du meilleur défenseur de l’Année, d’un talent générationnel. Quand vous avez un mec du calibre de Giannis qui privilégie la fidélité à sa franchise aux futures options potentiellement séduisantes pouvant s’offrir à lui, ça peut bousculer les codes du moment.

Depuis la prolongation du Greek Freak avec Milwaukee, on lit un peu partout que c’est également une victoire pour l’ensemble des petits marchés qui composent la NBA. Des petits marchés qui galèrent souvent à garder leur poule aux œufs d’or, ces stars qu’ils voient grandir avant que ces dernières choisissent une destination plus attractive pour des raisons autant sportives qu’extra-sportives, soit via la Free Agency (LeBron James, Kevin Durant…) soit en demandant un transfert (Anthony Davis pour citer un exemple récent). La NBA peut tenter tout ce qu’elle veut pour assurer la parité au sein de la Ligue et pousser les joueurs à rester dans leur franchise d’origine (en mettant en place par exemple la supermax extension, qui a cependant ses désavantages quand on voit la place énorme de ce genre de contrat dans le salary cap, limitant ainsi les options), Los Angeles, New York ou Miami aura toujours un autre cachet que Milwaukee. Sauf qu’en prolongeant chez les Bucks, Giannis montre que la taille ne fait pas tout, et remet ainsi au goût du jour les questions de loyauté et de fidélité d’un joueur envers sa franchise. Sur la dernière décennie, et notamment depuis The Decision en 2010, les superstars possédant le statut et le talent pour contrôler leur carrière ont vraiment pris conscience de ce pouvoir et cela a donné la création de superteams avec des grands noms qui n’ont pas hésité à bouger plusieurs fois pour maximiser leur carrière sur et en dehors du terrain. Les très grands joueurs qui deviennent synonymes d’une franchise en restant plus d’une décennie au sein de cette dernière sont ainsi devenus une espèce en voie de disparition. Une tendance frustrante pour certains fans qui ont grandi en regardant Dirk Nowitzki, Kobe Bryant et Tim Duncan, une tendance qui reflète avant tout le droit des joueurs pour d’autres, mais surtout une tendance qui a véritablement caractérisé le fonctionnement de la NBA ces dernières années. Avec la très grosse extension de contrat de Giannis aux Bucks, la décennie 2020 démarre d’une façon complètement opposée à la précédente.

Les autres petits marchés espèrent évidemment que le choix d’Antetokounmpo va faire des émules. Le Greek Freak symbolise l’attachement d’un joueur à sa franchise d’origine, et quand celui qui symbolise est accessoirement l’un des trois joueurs les plus dominants de la planète (en tout cas en saison régulière), ça peut donner le ton pour toutes ces jeunes stars qui auront des décisions importantes à prendre dans les années à venir. Car s’il n’a que 26 ans, Giannis est forcément observé par les pépites actuelles et futures, qui peuvent être inspirées par sa volonté de tout donner pour sa franchise, plus que par la nécessité de gagner obligatoirement un titre quitte à former une armada ailleurs. Cela ne veut pas dire que ces deux éléments sont incompatibles, car on sait que l’objectif ultime du Freak est de rafler une bague, mais la dynamique n’est évidemment pas la même. Si LeBron et Cie ont démocratisé le mouvement des stars dans leur prime, peut-être que Giannis peut à nouveau rendre cool le fait de rester sous le même maillot pendant de longues années pour tenter d’aller au bout, avec l’aide de gars comme Damian Lillard et Bradley Beal (deux stars toujours dans leur franchise d’origine et qui ont souvent mis en avant leur envie de rester à Portland et Washington). Tous ces gars qui viennent de signer leur première grosse extension et qui verront leur prochain contrat s’arrêter à 27, 28 ou 29 ans, comme Jamal Murray (Nuggets), Donovan Mitchell (Jazz), Brandon Ingram (Pelicans), De’Aaron Fox (Kings) ou encore Jayson Tatum (Celtics), pourraient décider de suivre le chemin emprunté par Giannis, même si chaque situation est évidemment différente et que parfois, bouger est clairement nécessaire.

Ou alors, le Greek Freak restera l’une des exceptions dans l’ère du player empowerment, ce qui pourrait rendre son histoire encore plus belle et unique. Après tout, Giannis n’est pas vraiment une superstar comme les autres. Il n’a pas grandi aux States mais dans les rues d’Athènes, et aujourd’hui Milwaukee représente véritablement sa maison au pays de l’Oncle Sam. Il n’est pas passé par la case High School, NCAA ou encore Team USA, où beaucoup de liens peuvent se former entre les joueurs, alors clairement faire copain-copain pour gagner n’est pas dans son ADN. Des mecs comme lui, c’est rare dans la NBA actuelle et cela est lié notamment à son enfance, son éducation, son parcours. Au final, seul l’avenir pourra nous indiquer l’impact de la décision de Giannis sur le reste de la Ligue, et on pourra faire un vrai bilan en… 2030. Ce qu’on sait par contre, c’est qu’en NBA, une nouvelle mode est souvent lancée par une superstar qui décide d’aller à contre-courant de ce qui se fait habituellement. Quand LeBron James a choisi de former un Big Three à Miami avec Dwyane Wade et Chris Bosh il y a dix ans, il a emprunté un autre chemin que Michael Jordan, Kobe Bryant et d’autres. Les critiques ont fusé à l’époque, mais cela a véritablement fait entrer la NBA dans l’ère du player empowerment. Aujourd’hui, c’est au tour de Giannis Antetokounmpo de suivre ses propres convictions (et aussi les 228 millions de dollars qui vont avec, faut quand même pas l’oublier), peu importe si elles semblent périmées pour certains. La mode, ça s’en va et ça revient comme on dit.

Si Giannis parvient à remporter un titre avec les Bucks, cela validera définitivement cette décision de rester à Milwaukee, et l’impact sur le reste de la Ligue serait potentiellement très très fort. Antetokounmpo pourrait devenir le nouveau modèle à suivre pour les stars montantes de la NBA, un scénario qui plairait sans doute beaucoup aux petits marchés.


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