Antoine Walker : un talent cosmique, une banqueroute cynique, un Shimmy Shake mythique

Le 12 août 2016 à 18:59 par Alexandre Martin

Antoine Walker

On ne parle pas assez souvent de tous ces joueurs qui débarquent en NBA sans être vraiment préparés, sans être prêts mentalement ni suffisamment bien entourés pour assumer tous ces dollars qui vont leur tomber dessus et cette notoriété hallucinante que procure le moindre petit succès dans la Grande Ligue. Ces joueurs pour qui cette richesse soudaine est plus un piège qu’une réelle chance, ces joueurs qui se retrouvent parfois sans rien à peine quelques mois après avoir fini leur carrière. Ces joueurs, Antoine Walker en fait partie, il est même le Saint Patron de cette confrérie de galériens…

Entre sa Draft par les Celtics en juin 1996 et sa retraite prise en 2008 après une ultime saison sous le maillot des Wolves sans oublier ses passages à Dallas, Atlanta et surtout Miami (avec la bague au bout en 2006), “Toine” a encaissé plus de 108 millions de dollars de salaires rien que pour tâter de la balle orange sur les parquets NBA. Il a gagné en une saison beaucoup plus que ce que la plupart d’entre nous ne gagneront dans leur vie entière. Pourtant, en mai 2010, il fut déclaré en faillite personnelle avec un capital d’environ 4,3 millions pour des dettes excédant les 12 millions. Pour l’anecdote, c’est même son pote Nazr Mohamed qui a dû payer une partie des frais de l’avocat gérant l’affaire, tant Walker n’avait plus un radis. Pire, il a dû vendre sa bague de champion pour éponger cette mare de créances. Au bout de rouleau, Walker ne savait alors plus quoi faire et il n’a eu d’autres choix que de revenir à des fondamentaux. Aujourd’hui, analyste basketball pour 120 Sports, il a déclaré en 2013 être libéré de toute dette mais devoir repartir de zéro ou quasi. Une bien triste histoire, consécutive à une bien belle carrière.

Car, si Walker n’était donc pas un génie de la gestion financière, il avait, par contre, de sacrés arguments quand il s’agissait de manier le cuir. Et puis, on n’amasse pas plus de 100 millions de gains en carrière à cheval entre la fin des années 90 et les années 2000 comme ça, sans montrer quelques belles choses. Bon voleur de ballon car très inspiré sur les lignes de passes, “Toine” n’en était pas pour autant un grand défenseur. En revanche, en attaque… Ce gros bébé de 205 centimètres pour environ 120 kilos pouvait sembler un peu gras, un peu lent mais il n’en était rien. Nous parlons ici d’un ailier-fort sachant tout faire balle en main. Un scoreur-né, très bon shooteur – pas non plus un sniper à longue distance mais très correct derrière l’arc -, capable d’attaquer le cercle férocement ou tout en finesse, capable de trouver le copain démarqué après avoir fait la différence. Un boulimique du rebond qui savait parfaitement utiliser son imposant fessier et ses larges épaules pour se faire une place sous les cercles au moment de la cueillette. Enfin, presque avant tout, monsieur Antoine Walker était un showman, un gars festif et chambreur dont le fameux shimmy shake – ce roulement si typique des épaules après une grosse action – restera à jamais gravé dans toutes les mémoires de ceux qui ont eu le bonheur de le voir effectuer sa petite danse. Et, il en a eu des occasions de rouler des mécaniques épaules.

Sur ses sept premières saisons (de 1996 à 2003 donc) – les meilleures et toutes jouées à Boston – l’ami Antoine a participé à plus de 500 matchs (513 exactement) à raison de presque 40 minutes de temps de jeu moyen et en envoyant 20,8 points, 8,7 rebonds, 4,2 passes décisives et 1,5 interception. Trois fois All-Star sur cette période, Walker et son pote Paul Pierce emmèneront d’ailleurs tout le peuple celte en Finale de Conférence en 2002 au bout d’une saison qui aura vu le duo d’ailiers défoncer de nombreuses défenses. “Toine” était un extravagant, un fou capable de shooter encore et encore même si ça ne rentrait pas avec une grande réussite. Un cinglé tout aussi agressif sur ses drives et au rebond que fluide dans son jeu de passes. Comme par exemple, en ce soir du 11 décembre 2001. Les Celtics étaient en déplacement chez les Knicks. Et comme tellement d’autres grands joueurs, Walker va nous gratifier d’une grande partition de basket sur le parquet du Madison Square Garden. 42 points en shootant 34 fois dont 17 à 3-points (pour seulement 6 dedans), le tout accompagné de 9 rebonds, 9 caviars, 3 vols et avec une insolence rarement vue en NBA. Il faut dire que, ce soir-là, à un peu plus de 5 secondes de la fin du temps réglementaire, les Celtics étaient menés de 3 points (89-86) et s’apprêtaient à remettre en jeu. “Toine” s’est démarqué sèchement et Eric Williams l’a servi instantanément. Le numéro 8 celte n’a pas hésité une seule seconde à prendre ce tir ultra-décisif. Ficelle, 89 partout et shimmy shake bien appuyé dans le foulée pour rejoindre son banc. Il ne reste que 3 secondes sur l’horloge, le match va aller en prolongation et les Knicks vont complètement craquer. Voilà ce qui s’appelle se faire “Walkeriser”…

Un grand moment de basket qui symbolise assez bien ses qualités et même sa carrière. On l’a surnommé “Toine” mais aussi “l’employé numéro 8” ou “Cyber Toine”. On l’a admiré pendant des années, on l’a vu glaner une bague en tant que remplaçant avec le Heat de Pat Riley, D-Wade et Shaq. On l’a vu scorer, danser et nous régaler de son basket soyeux. On l’a vu toucher le fond quelques mois après son départ en retraite. Bref, on a vu Antoine Walker sous toutes ses facettes et ça, on n’est pas prêt de l’oublier. 

Sa perf au Madison Square Garden, clutchitude et Shimmy Shake inclus…

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