Le “journeyman” en NBA : focus sur ces joueurs de devoir pour qui la valise est toujours prête

Le 05 nov. 2015 à 20:12 par Giovanni Marriette

journeyman

Tout le monde n’est pas Kobe. Tout le monde ne peut pas non plus se targuer d’avoir passé la totalité de sa carrière sous les ordres d’un ancien militaire dans les plaines du Texas. Ces hommes d’une seule franchise sont rares, et c’est bien pour cela d’ailleurs que l’on en parle si souvent. De notre côté, c’est à l’autre bout de la liste que l’on part aujourd’hui, à la rencontre de ceux qui se plaisent -ou se sont plu- à changer de franchises régulièrement, genre tous les ans, faisant de leur carrière un doux mélange entre collection de jerseys et Guide Du Routard personnalisé. Bienvenue chez les journeymen, joueurs instables au possible et collectionneurs de franchises…

Notons tout d’abord qu’il existe deux sortes de journeymen en NBA : les “monnaies d’échange”, pas toujours très talentueux mais souvent en première ligne lorsqu’il s’agit pour une franchise de monter un gros trade, puis les “instables chroniques mais adaptables”, capables de se fondre rapidement dans un nouvel environnement tout en sachant pertinemment que chaque port n’est qu’un passage vers le suivant. Une grosse quinzaine de joueurs actuellement en NBA peut ainsi aujourd’hui présenter au moins huit casiers différents depuis le début de sa carrière, la palme des joueurs en activité revenant à Lou Amundson avec dix franchises visitées en huit ans (Utah, Phila, Phoenix, Golden State, Indiana, Minnesota, Chicago, New Orleans, Cleveland et New York pour des moyennes de 3,8 points et 3,7 rebonds en 13 minutes). Big up également à Matt Barnes et ses neuf spots en treize ans (L.A. x 2, Sacto, New York, Phila, Golden State, Phoenix, Orlando et Memphis). On retrouve également parmi les voyageurs toujours en activité des loulous comme Drew Gooden (10 franchises), Caron Butler et Shaun Livingston (9), ou encore Steve Blake, Rasual Butler, Shannon Brown, Gerald Green, Nate Robinson ou Anthony Tolliver, tous passés par huit vestiaires différents au cours de leur carrière.

Ronny Turiaf, homme de voyages et coups d’un soir

Comment parler de journeymen sans mentionner l’un des chouchous de la ligue, de par son histoire particulière en début de carrière et sa joie de vivre communicative sur les bancs de NBA ? On tape donc le gros big up à Ronny, lui qui a vraiment vu du pays durant les 9 ans qu’il a passé sur les parquets de la Grande Ligue (car vous ne pensiez tout de même pas qu’on le reverrait un jour en NBA hein…). Trois années pleines d’émotions passées à Los Angeles, puis départ pour lui direction les Warriors, pas vraiment loin de chez lui. Un an plus tard il traverse cette fois-ci le pays pour signer à New York, avant d’enchaîner sur la côte Est à Washington puis Miami, la Floride où il obtiendra d’ailleurs une bague de champion aux côtés de LeBron James et Dwyane Wade. Retour par la suite à Los Angeles mais cette fois-ci chez les Clippers, avant de probablement terminer sa carrière en encadrant les louveteaux du Minnesota. Une carrière faite de rebondissements, menée de pair avec sa carrière internationale. Bien assez pour lui faire un gros bisou…

Un carré historique en danger

Chucky Brown, Jim Jackson, Tony Masssenburg et Joe Smith. On ne parle pas ici du nouveau boys band à la mode chez les teeenagers cain-ri mais bien du carré magique ayant connu le plus d’équipes en carrière. 12 pour être exact. Ces quatre cas de figure sont néanmoins moins différents :

  • Jim Jackson (12 franchises en 15 ans) : le double J a démarré sa carrière avec un chapeau de cow-boy puisqu’il a passé ses quatre premières saisons à Dallas, posant même jusqu’à 25 points par match lors d’une saison 94/95 placée sous l’égide de la lettre J car il formait cette année-là avec Jason Kidd et Jamal Mashburn un sacré trio de psychopathes. Sauf que deux ans plus tard patatra, son départ du Texas va précipiter ses envies de voir du pays puisque Jim enchaînera par la suite onze déménagements en dix ans avant de prendre sa retraite pépèrement en 2006 à Los Angeles, au soir d’une carrière qui l’aura vu cumuler presque 13 000 points et des moyennes de 15,7 points, 5,1 rebonds et 3,5 passes.
  • Joe Smith (12 franchises en 16 ans) : place au futur GOAT de la bande… Car dire que le gonze était un crack lorsqu’il fut drafté en première position en 95 (devant un certain Kevin Garnett, 5ème choix) par les Warriors est un bel euphémisme. A l’arrivée, une carrière solide mais loin de répondre aux attentes placées en lui au départ. Quelques bonnes saisons à GS donc, puis le début de son premier road-trip, orienté côté Est des États-Unis : Phila, Minneapolis, Detroit, re-Minny puis Milwaukee. A partir de 2007, il passe en mode grosse bougeotte et enchaîne en quatre saisons des séjours plus ou moins courts à Denver, re-Phila, Chicago, Cleveland, Oklahoma et re-Cleveland avant de se terminer entre Atlanta, Los Angeles et le New Jersey. Un beau ratissage du pays pour l’un des plus gros potentiels entrevus lors de ces 20 dernières années, qui n’aura finalement pesé “que” 10,9 points et 6,4 rebonds durant sa carrière…
  • Tony Massenburg (12 franchises en 14 ans) : un autre destin particulier que celui de Tony. Un début de carrière compliqué entre San Antonio, Boston, Chicago et Golden State, passant le plus clair de son temps à lustrer les bancs de la Ligue. Un exil de deux ans en Espagne plus tard (cela ferait-t-il officiellement de Tony Mass’ notre recordman ?), le voilà qui réapparait en NBA mais cette fois-ci pour peser dans le game. Deux saisons pleines entre les Clippers, les Raptors, les Nets et les Sixers (oui oui, en deux ans) et direction Vancouver pour couper le ruban de la nouvelle née de la Ligue avec une douzaine d’autres aventuriers. Mais deux ans plus tard, ses désirs de grand air refont surface et notre ami s’en ira de nouveau traverser le pays pour visiter Houston, Memphis, Utah et Sacramento avant de boucler la boucle en 2005 à San Antonio, là où tout a commencé, se retirant du circuit avec des stats en carrière honnêtes de 6,2 points et 4,3 rebonds.
  • Chucky Brown (12 franchises en 12 ans) : on termine avec le quatrième mousquetaire de la bande, beaucoup moins connu pour sa part que la poupée maléfique portant son prénom. Role player par excellence, il aura certainement vécu plus d’heures dans l’avion que sur les parquets lors des quatrièmes quarts-temps. Drafté par les Cavs en 89, il aura passé ses premières saisons chez sa mère adoptive, un peu à l’image de Joe Smith et Jim Jackson. Puis à partir de 1991 le gars pète un câble et enchaîne les départs précipités : Lakers, Mavs, Nets, Rockets, Suns, Bucks, Hawks, Hornets, Spurs, re-Hornets, Warriors, re-Cleveland et Sacramento, autant de franchises qui se seront donc partagées le cadeau durant à peine dix ans, en croyant peut-être finalement que Chucky Brown était bel et bien Chucky tout court. Un honnête joueur donc, mais avant tout un voyageur hors-pair…

Voilà donc pour le quarté gagnant des rois de l’aéroport, quatre mecs qui auront vraisemblablement coûté aussi cher en flocage qu’en salaire. Des cas que l’on retrouvera sans doute à travers les âges, les franchises ayant un besoin presque frénétique de bouger sans cesse leurs rosters, ceci couplé à la loi du business qui favorise l’abondance des trades et autres ten-days contracts. Et en parlant des petits contrats…

Ish Smith, si jeune et déjà tellement la bougeotte

Parmi tous ces voyageurs, s’il en existe un qui pourrait faire péter tous les records en la matière, c’est bien le petit Ish Smith. Non content d’avoir un prénom relativement chelou, l’actuel meneur des Pelicans en est tout simplement au doux chiffre de dix franchises en l’espace de six ans, n’ayant réussi l’exploit de passer un an sans bouger qu’à une seule reprise dans sa carrière : Houston et Memphis en 2011, Golden State et Orlando en 2012, Milwaukee en cours de saison 2013, Phoenix en 2014 pour son plus long CDD, Oklahoma et Phila en 2015 et donc New Orleans cette saison, profitant des nombreux blessés à NOLA pour plutôt très bien faire son travail. Reste à savoir combien de temps il tiendra sans demander le divorce ou sans se faire dégager, lui qui n’a donc peut-être jamais vécu ailleurs que dans un hôtel depuis son arrivée en NBA. Et peut-être s’est t-il d’ailleurs promis de faire tout simplement le tour du pays, comme avait par exemple pu le dire Nate Robinson il y a quelques années…

Le journeyman est donc loin d’être une espèce en voie de disparition et s’accorde toujours à merveille avec son exact contraire. Car il faudra toujours des Mike Miller pour servir de boy à LeBron James, car il faudra toujours des Reggie Evans pour faire passer DeMarcus Cousins pour un ange. Qui fera donc la nique à Jim, Tony, Chucky et Joe ? Ici on miserait bien sur un petit Thomas Robinson tiens. Et vous ?

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