Plutôt la Grèce ou l’Espagne en demi, ou comment choisir entre la peste et le choléra…

Le 14 sept. 2015 à 17:36 par Leo

Lisible sur bon nombre de lèvres de supporters anxieux de l’Equipe de France, cette interrogation factuelle surgit spontanément dès lors que l’on tend à projeter d’ores et déjà nos Bleus en demi-finale. Dans ce cas de figure où les Lettons ne seraient alors plus d’actualité, qui seraient du coup les plus “prenables” ? Les Grecs, les Espagnols, peu importe ? Tachons d’élucider ce mystère sur le seuil de notre porte…

D’une part, au regard de ce que nos deux adversaires potentiels ont proposé à cet Euro jusqu’ici, on pourrait davantage craindre nos amis philosophes que nos rivaux ibériques. En effet, les partenaires de Vassilis Spanoulis demeurent invaincus et peuvent représenter un danger d’autant plus grand qu’il agit masqué, qu’il n’a pas encore dit son nom. Sans se montrer ultra-dominateurs à chacune de leurs sorties depuis une semaine, les Grecs ont terrassé chacun de leurs opposants sur leur passage tout en contrôle et en lucidité. Uniquement inquiétés par séquences lors de la confrontation sulfureuse contre la Croatie, celle-ci évincée de manière déshonorante de la course au titre par Jan Vesely et les Tchèques hier, les hommes de Fotis Katsikaris ont fait preuve d’un calme olympien et d’une concentration collective sans faille qui leur ont permis d’enchaîner les victoires, tout en évitant de laisser le doute s’immiscer dans l’élaboration de leur alchimie. Jeune et conquérante à l’image de son frêle Giannis Antetokounmpo, cette sélection impatiente à l’idée de s’emparer du Graal s’avère être une arme redoutable à double tranchant, alliant expérience malicieuse et jeunesse explosive, dont il faudra se méfier comme de la peste. Tony Parker l’avait d’ailleurs vue venir de loin, avant même le lancement des hostilités samedi dernier…

Quant au choléra, à savoir nos chers amigos espagnols, leurs débuts dans la compétition furent laborieux mais plus ils se sont extirpés des différents pièges qu’ils ont eus à surmonter, plus ils font dorénavant peur. En dépit de l’absence préjudiciable de certains de leurs cadres, les revers concédés en ouverture contre la Serbie et l’Italie seront des trompe-l’œil qui ne devraient pas altérer notre perception antagoniste vis-à-vis de cette cohorte de guerriers toujours partants pour nous asséner le coup de grâce si on leur en donne l’opportunité. Le récent carton de Pau Gasol pour se défaire de la Pologne s’apparente à un véritable rappel à l’ordre indirect qui devrait nous préparer à redoubler de vigilance. Là encore, un monstre sommeille en eaux troubles et ne tirerait meilleure revanche que de nous rendre la monnaie de notre pièce en nous empêchant de défendre notre totem devant notre public déchaîné, surtout depuis que nous les avons brillamment défaits à leur Mondial l’an passé, alors qu’ils étaient au complet et remontés à bloc.

D’autre part, d’un point de vue historique, le choix n’est pas plus aisé. Si la Grèce de Dimitris Diamantidis nous a privés d’une finale européenne au buzzer en 2005 puis d’une demi aux Championnats du monde en 2006 au Japon, la Roja, à l’inverse, nous a causé bien des misères depuis plus d’une décennie et son avènement en tant que super-puissance du basket mondial. 1999, 2009, 2011, 2012 : que d’élans tricolores stoppés par des Espagnols sur un nuage qui nous ont fait ruminer des années entières et aiguiser nos couteaux afin de triompher avec la manière en 2013 puis en 2014. Au vu des dernières crasses de nos ennemis espagnols, on pourrait prier pour une victoire de la Grèce mardi prochain et, une fois la qualif en quart acquise à notre tour, se persuader que les traumatismes opérés sur notre conscience par les descendants de Platon sont définitivement guéris.

Néanmoins, histoire de donner d’autant plus de grandeur au rêve d’un doublé historique pour le basket français, ne devrions-nous pas nous réjouir d’avoir la chance de vaincre cette escouade espagnole sur notre sol, avec les armes qui sont les nôtres et devant nos fans survoltés pour l’occasion ?! Quel décor, quel contexte, quel scénario serait plus grandiose encore que celui-là afin d’en terminer avec des années de disette et de moquerie à notre encontre de la part de ces Espagnols farouches, sans pitié et fortement hostiles à notre réussite au sommet. Ironie du sort, farce méticuleuse du hasard, une chance unique comme celle-ci de leur prouver que leur règne européen est à présent révolu ne se reproduira pas de sitôt et, s’il on vient à l’emporter une fois de plus ce dimanche, le prestige de ce trophée glané aux tripes et grâce à notre rage défensive immanente n’en sera que décuplé : pour ce faire, on passerait donc par un énième combat d’anthologie contre nos anciens bourreaux des cœurs. N’ayons pas peur car nous n’avons plus de motif d’être effrayés par quoi que ce soit ou par qui que ce soit. Mince alors, nous sommes les champions en titre, oui ou non ?! A deux reprises successives, nous sommes parvenus à inverser les rôles et à leur faire ravaler leur salive ; raison de plus pour y arriver une troisième fois d’affilée et réaliser ce passage de témoin qui en dirait long sur notre caractère, sur nos capacités à asseoir notre domination singulière sur l’ensemble du Vieux Continent…

En outre, comme exprimé plus haut, nous n’avons pas à rougir ni à craindre les velléités grecques ou espagnoles : notre plus grand ennemi, c’est et ce sera nous-mêmes. Nos forces en présence sont connues et ne cessent de se révéler au grand jour : elles se prénomment Nando De Colo, Joffrey Lauvergne, Evan Fournier, Nicolas Batum ou encore Rudy Gobert. En attendant le réveil de Boris Diaw et Tony Parker notamment, l’équipe tout entière se dresse tel un seul homme, une seule voix qui hurle son désir de briller à nouveau aux oreilles de ses ennemis. Dernièrement, la Turquie en a fait les frais, elle qui a fait resplendir à son insu notre volonté incassable à protéger coûte que coûte notre trésor immatériel, à savoir notre passion, notre dignité de champion et ce pour le plus grand désarroi des sceptiques qui remettent en question ce grain de folie et d’hardiesse propre à nos Bleus. Ainsi, dans le but de mettre en suspens toutes ces incertitudes néfastes, l’intérêt ne serait donc pas de choisir mais bien de vaincre, en toutes circonstances ! Avoir l’embarras du choix nous emprisonnerait davantage dans un confort malsain de tenants du tire à domicile, rassasiés et pas vraiment encore bousculés, que de nous rassurer d’une quelconque façon avant un match qui sera capital quoiqu’il advienne. La facilité contre la Grèce, la vanité et l’orgueil contre l’Espagne ? Par pitié, ne tombons pas là-dedans…

En somme, un des deux prétendants majeurs au titre de champion d’Europe connaîtra une sortie de piste prématurée. Là est notre seule certitude avant de s’imaginer déjà en quart. Peut-être que l’hypothétique élimination de l’Espagne nous enlèverait mentalement un poids gigantesque, mais cette possibilité ne nous rendrait-elle pas plus vulnérables ou ne ferait-elle pas de la Grèce un opposant d’autant plus féroce qu’il en a l’air ? Dans tous les cas, trop nous appesantir sur ce choix diabolique pourrait nous conduire à notre perte. Alors plutôt que de nous empoisonner d’une manière ou d’une autre, songeons à nous maintenir en vie en gagnant, encore et encore…!

Source image : montage TT 


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