Kemba Walker – Lance Stephenson : les playgrounds new-yorkais pour faire décoller les Hornets

Le 22 sept. 2014 à 12:15 par David Carroz

D’un côté un meneur d’1m85, brillant en NCAA où il passe trois années pour finalement remporter le titre et être élu MOP du Final Four. De l’autre, un arrière d’1m95, one-and-done à l’université, sans briller. Le premier se nourrit des doutes qui entourent son potentiel, le second apporte toujours plus de grain à moudre à ses détracteurs en se montrant aussi imprévisible que doué. Entre les deux, beaucoup de similitudes pourtant, et maintenant, le même maillot.

Kemba Walker et Lance Stephenson, puisque ce sont d’eux qu’il s’agit, formeront la saison prochaine l’un des backcourts les plus excitants de la ligue, à l’instar des duos John Wall – Bradley Beal, Steph Curry – Klay Thompson, Kyle Lowry – DeMar DeRozan ou Elfryd Payton – Evan Fournier (cherchez le troll). D’attirant sur le papier, le combo Walker – Stephenson peut-il devenir dominant ?

Deux enfants de New York, deux parcours, mais la même identité

Les deux joueurs viennent de New York. Le Bronx pour Kemba Walker, Brooklyn pour Lance Stephenson. Quand on grandit sur les playgrounds, il faut se faire sa place. Cette lutte constante forge un caractère, et les deux joueurs sont passés par là. Cela se ressent dans leur jeu et leur attitude, même si chacun l’aborde à sa façon.

Cette passion dévorante qui leur donne autant d’enthousiasme maintenant sur les parquets NBA et ce jeu rempli d’émotion. On est sur le parquet comme on est dans la vie, on donne tout. C’est plus expressif encore chez “Sir Lancelot” alors que Kemba est plutôt dans le costume de l’assassin silencieux, mais les deux ont le basket dans le sang, le jouent et le vivent intensément, avec un coeur énorme et une grande confiance en soi.

Les hornets ont deux talents issus des playgrounds new-yorkais

Source : Todd Heisler – The New York Times

Cette confiance, c’est elle qui les a fait avancer et les poussent encore aujourd’hui. Fraichement élu MOP du Final Four NCAA en 2011, Kemba Walker s’imagine dans le Top 5 de la draft. Il n’en sera rien, puisque ce sont les Hornets (alors Bobcats) qui récupèrent le joueur en 9ème position. Trop petit pour être arrière, pas assez collectif pour mener une équipe… bref, un combo guard tout juste bon à sortir du banc pour scorer. Ces doutes-là, il ne les a pas oubliés, et chaque jour il y puise encore plus de motivation. Lance Stephenson lui connait sa valeur, se sachant capable de rivaliser avec n’importe qui : O.J. Mayo en 2005 (son ainé de 3 ans) lors d’un camp pour jeunes basketteurs ou LeBron James en finale de conférence au printemps dernier, nul ne lui fait peur. C’est de là qu’il tire d’ailleurs son surnom “Born Ready“, donné par Bobbito Garcia, speaker légendaire de Rucker Park lors de l’été 2006, en référence à sa capacité à affronter tout le monde, peu importe la différence d’âge.

Oui, cette confiance, couplée au talent, qui fait que jamais ils ne baissent les bras ou la tête devant l’adversité et les difficultés. Leur moteur, leur énergie, c’est elle. L’essence de leur jeu. Quand on a dû se battre pour faire son trou sur les playgrounds new-yorkais puis pour continuer à s’affirmer dans une ville où chacun veut sa part du succès, on est armé pour affronter n’importe qui. Ou du moins on en est persuadé.

Un destin maintenant lié aux Hornets

Mais maintenant, Lance Stephenson et Kemba Walker vont pouvoir unir leurs forces dans les lignes arrières des Hornets. Après s’être affrontés au lycée à New York, le meilleur de Brooklyn et du Bronx peut-il devenir un des tops duos de la ligue et faire franchir un palier aux Hornets ? En tout cas, le meneur est très excité à l’idée d’évoluer aux côtés de Sir Lancelot. On peut le comprendre, nous aussi nous sommes impatients de voir les deux joueurs casser des chevilles ou mettre des misères à leurs adversaires en monde streetball.

Pourtant, aucun des deux n’a encore connu la moindre sélection All Star. Aucun n’est considéré comme un des 5 meilleurs à son poste en NBA. Imaginons-nous cette association plus belle qu’elle ne l’est ? Si on jette un regard aux statistiques en carrières des deux lascars, certes c’est solide, en progrès et intéressant, mais il n’y a pas de quoi s’extasier.

Lance Stephenson Kemba Walker Cahrlotte Hornets

Statistiques en carrière de Lance Stephenson.
Source : NBA.com

Lance Stephenson Kemba Walker Charlotte Hornets

Statistiques en carrière de Kemba Walker.
Source : NBA.com

En combiné, on atteint 31,5 points, 11,4 rebonds et 10,7 passes pour le duo. Bien, mais pas exceptionnel. C’est en tout cas inférieur en terme de scoring que tous les duos évoqués en début d’article (42,4 pour Curry-Thompson, 40,6 pour Lowry-DeRozan, 36,4 pour Wall-Beal), et seul le backcourt des Warriors est en dessous en terme de passes décisives (10,7 contre 10,5). Il n’y a qu’aux rebonds que le futur duo des Hornets brille, bien aidé par Lance Stephenson, meilleur rebondeur de la ligue parmi les arrières l’an passé (7,2 prises par match).

Oui mais les stats ne disent pas tout, surtout que dans le cas de Kemba et Lance, elles n’ont pas été réalisées en duo, mais chacun de son côté, l’idée étant juste de s’imaginer leur apport pour Charlotte. Qui pourrait être encore plus important avec les systèmes de Steve Clifford, mais surtout parce que les deux joueurs se complètent.

Tout d’abord les Hornets manquent cruellement de création. L’an dernier, en dehors de Kemba Walker, personne ne pouvait diriger l’attaque de Charlotte. Les 101,2 points marqués pour 100 possessions (source Hollinger’s NBA), 24ème position de la ligue, le prouvent bien. Lance Stephenson lui est un playmaker, qui n’hésite pas à impliquer ses coéquipiers. S’il a terminé avec 5 triples doubles l’an dernier (1er en NBA), c’est que le bougre sait distribuer le ballon. Et comme Walker est lui aussi en progrès à ce niveau là (après 2 mois à moins de 5 passes par match, il terminé la saison avec 6,3 assists en janvier, 7,3 en février, 7,5 en mars et 8,2 en avril), la franchise de Jordan aura deux joueurs capables de mener ensemble le jeu. À coach Clifford de mettre la balle dans les mains du bon joueur le moment souhaité.

Les Bobcats deviennent les Hornets

“Bon les gars vous êtes gentils mais maintenant vous pouvez aller sur le banc, on a de vrais starters dans l’équipe.”
Source : Kent Smith – Getty Images

De ce côté du parquet, Lance Stephenson va apporter une meilleure finition dans la raquette. Si le point fort de Kemba Walker est son jeu à mi distance, ainsi que l’amélioration de son shoot à 3 points, ses pénétrations restent une faiblesse. Avec 39% de réussite aux tirs quand il attaque le cercle (source Bleacher Report), il n’est pas une grande menace. “Born Ready” lui est physiquement plus costaud, n’a pas peur d’aller se frotter aux big men (ses statistiques au rebond le confirment) et termine plus facilement ce genre d’actions. Un plus donc en attaque pour les Hornets, surtout que Stephenson est également loin d’être un manche à 3 points (35,2% l’an dernier).

Améliorer le jeu offensif, oui, mais il ne faut pas pour autant négliger ce qui a fait la force de Charlotte l’an dernier : sa défense. Là encore, le physique de “Sir Lancelot” est un atout. Capable de défendre sur les 3 postes extérieurs, il n’hésite pas à se charger des meilleurs joueurs adverses. S’il peut être nonchalant quand l’adversité n’est pas suffisante, il a réclamé de s’occuper de LeBron James lors des finales de conférence l’an dernier pour soulager Paul George. On retrouve bien là l’esprit de compétition et la détermination de celui qui a grandit sur les playgrounds new-yorkais. Dans les systèmes de Steve Clifford, les deux joueurs auront donc comme tâche de provoquer des pertes de balle et offrir des points faciles en contre-attaque à leur équipe.

Bien entendu, il y a des risques lorsqu’on recrute Lance Stephenson. Son caractère et ses excentricités sur le terrain peuvent mettre en péril un collectif. Mais ces risques sont calculés et limités. En le signant pour 3 saisons (dont la dernière avec une option pour l’équipe) à $27 millions, l’impact sur la masse salariale à moyen terme n’est pas trop important. Quand on voit que Gordon Hayward (la cible numéro 1 des Hornets avant Stephenson) se retrouve à $63 millions sur 4 ans, cela relativise le danger de la signature du néo-hornet. Car si jamais ses excès prennent le pas sur ses performances, Michael Jordan ne sera pas lié à son joueur pour une trop longue période et bloqué par un contrat encombrant.

Hornets good old days

Les glorieux ainés vous regardent.
Source : NBA.com

Dans un groupe jeune et travailleur, Lance Stephenson peut trouver un environnement sain qui pourra lui faire passer un nouveau palier, tout en ayant plus de responsabilités qu’aux Pacers. C’est pour cela que Charlotte parait être une couveuse parfaite pour lui, mais surtout pour son duo avec Kemba Walker. Dans une franchise qui retrouve son image d’équipe sympathique et talentueuse entre le retour des Hornets et la qualification en PlayOffs, les attentes sont élevées sans que la pression soit immense, avec une vision pour le futur.

De quoi laisser s’exprimer le potentiel du backcourt Walker-Stephenson. Car si aujourd’hui aucun des deux n’est un top player et que leur association n’est pas non plus la meilleure de la ligue, ce duo pourrait bien faire des étincelles et se hisser vers les sommets de la NBA. Surtout avec l’aide d’une présence intérieure comme “Big Al” pour les accompagner. Il n’y a pas de doute, les Hornets sont bien de retour à Charlotte, et ils vont piquer.