L’histoire de la Metropolitan Basketball Association
Dès lors que l’argent a commencé à s’imposer dans le basketball afro-américain, les valeurs de l’amateurisme qui animaient les premiers Black Fives new-yorkais ont été mises à mal. Si bien que ces équipes historiques ont toujours œuvré pour calmer les ardeurs des entrepreneurs qui voient dans la balle orange avant tout un moyen de faire du blé. Au milieu des années 1910, c’est en formant la Triple Alliance que St. Christopher, l’Alpha Physical Culture Club et les Spartan Braves ont réussi à poser des digues suffisamment solides pour contrer les mécréants professionnels. Mais quelques années plus tard, le combat revient sur le devant de la scène.
Devant cette nouvelle montée en puissance de l’argent au sein de certains Black Fives qui trouble l’équilibre et l’équité des rencontres, les boss des clubs amateurs du Metropolitan District (New York, Brooklyn, New Jersey) de l’Amateur Athletic Union se réunissent le 21 janvier 1921. Pour eux, il faut suivre les recommandations de l’AAU et conserver un statut amateur. Ils fondent alors la Metropolitan Basketball Association, organisation qui va dicter les règles de ce basketball “pur”.
Bien entendu, les Black Fives historiques sont de la partie : Alpha Physical Culture Club, St. Christopher, Spartan Field Club (les Spartan Braves). Mais ils ne sont pas seuls, d’autres formations, bien qu’arrivées plus tardivement au basketball, adhèrent aussi au projet : Borough Athletic Club of Brooklyn, St. Marks’ Athletic Club of Harlem, Titan Club of New Jersey sont également dans le lot des membres fondateurs aux côtés de la Triple Alliance. D’autres rejoindront la MBA dans les mois qui suivent.
C’est Gerald Norman, l’un des fondateurs de l’Alpha Physical Culture Club, qui est élu président de la Metropolitan Basketball Association. Il ne doute absolument pas de sa mission :
“Les différents clubs ont exprimé leur volonté de rejoindre une telle ligue pour éradiquer le professionnalisme de ce sport populaire.”
À l’instar de Norman, tous les membres sont sûrs d’eux et du bien-fondé de la MBA. Pour les Black Fives, mais aussi pour le public. Ils sont persuadés que les autres clubs vont suivre. Et si certains refusent, ils les feront plier : amende, suspension ou exclusion, l’éventail des sanctions est assez large pour punir un éventuel non respect des règles. Et celles-ci sont dures :
- les joueurs n’ont pas le droit de participer à des matchs non validés par la Metropolitan Basketball Association.
- les joueurs des équipes appartenant à la MBA n’ont pas le droit de jouer pour une autre équipe de la MBA durant la saison.
- les équipes de la Metropolitan Basketball Association n’ont pas le droit d’aligner un joueur avec un passé professionnel, peu importe le sport pour lequel il a été payé.
- les équipes de la Metropolitan Basketball Association n’ont pas le droit de jouer face à des adversaires ne faisant pas partie de la MBA, sauf en cas d’accord des dirigeants de la MBA. Cet accord n’intervient que si l’équipes en dehors du giron de la Metropolitan Basketball Association dispose d’une formation composée d’amateurs.
- le montant des frais remboursés aux joueurs est décidé par la Metropolitan Basketball Association.
En faisant le tour du règlement, on se demande si les membres fondateurs ont vraiment réfléchi aux conséquences. En effet, même eux se retrouvent en difficulté et doivent faire le ménage au sein de leurs Black Fives. Ce qui les affaiblit considérablement. Mais il faut faire bonne figure, surtout face au public, en communiquant sur les valeurs.
Pourtant, tout n’est pas glorieux en coulisses et les politiques appliquées prouvent que la Metropolitan Basketball Association est déconnectée de la réalité. D’une part en ce qui concerne le business du basketball : ce qui pêche à l’époque, aussi bien chez les Black Fives que dans les ligues dont ils sont exclus, c’est la capacité à maintenir les joueurs au sein d’une même équipe. Et seul l’argent et des contrats longues durées peuvent résoudre ce problème. D’une autre, ils ne comprennent pas non plus les aspirations des Afro-américains. Les joueurs veulent pouvoir vivre de leur sport ; les fans veulent voir le meilleur spectacle possible. Et celui-ci n’est possible que si les stars ont les moyens de s’entraîner et de jouer régulièrement.
Alors que la Metropolitan Basketball Association doit endiguer le professionnalisme, elle va en réalité lui donner un coup de main essentiel. Les meilleurs joueurs bannis par la MBA rebondissent au sein d’équipes professionnelles, en particulier le Commonwealth Big Five à partir de 1922. Le projet a clairement du plomb dans l’aile : le niveau des matchs est en baisse, tout comme les affluences.
Alors que la saison 1922-23 indique clairement que la direction prise n’est pas la bonne avec seulement quatre rencontres disputées lorsqu’on arrive en janvier, le coup de grâce est donné par Bob Douglas. Le manager des Spartan Braves – équipe pourtant à la base de la Triple Alliance qui a lancé le projet MBA – décide de quitter le regroupement. Il termine l’exercice en tant qu’équipe indépendante et va débuter l’aventure professionnelle quelque temps plus tard.
La Metropolitan Basketball Association a vécu. Dès le départ, le projet était bancal et loin de la réalité : empêcher les joueurs de gagner de l’argent en prônant l’amateurisme alors que le business du basket en général était en développement, qui peut penser qu’il s’agissait d’une bonne idée ?
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