La fameuse “fatigue” en Playoffs : réel facteur ou simple sujet à gratter du papier ?

Le 02 juin 2016 à 15:52 par Alexandre Martin

Fatigue - Chien qui dort

Alors que les Finales NBA démarrent cette nuit – enfin dans la nuit de jeudi à vendredi pour nous pauvres Européens qui devons subir un décalage horaire assez violent – les pronostics fusent dans tous les sens dans les milieux autorisés et peuplés de fans de balle orange. Et parmi les arguments régulièrement utilisés pour faire pencher la balance dans un sens ou dans l’autre, on retrouve souvent la fameuse “fatigue”. Est-ce un élément si déterminant ? Les joueurs sont-ils tellement fatigués ? Est-ce que les Cavs ont vraiment un si gros avantage sur les Warriors à ce niveau ? 

Les Playoffs ont commencé depuis un mois et demi soit donc environ 45 jours. Sur ces 45 jours, les Cavs ont joué 14 matchs soit un peu moins d’un match tous les trois jours. Les Warriors eux, ont joué 17 matchs soit un peu plus d’un match tous les trois jours. Mais très clairement, ce rythme est beaucoup moins intense que celui de la saison régulière qui impose aux équipes 82 matchs en 5 mois et demi (environ 165 jours) soit une moyenne autour d’un match tous les deux jours. Une moyenne qui est un peu moins élevée en réalité puisque les joueurs majeurs font souvent l’impasse sur quelques matchs mais une moyenne qui reste supérieure à celle de la post-season. Et on peut toujours parler de la fameuse intensité des Playoffs mais quand on voit le parcours des Cavs, on peut douter que cela soit si différent. Certes les Pistons se sont bien battus mais ce fut un sweep sans gros stress pour LeBron et sa clique. Contre les Hawks, on a limite eu le sentiment que ce fut encore plus facile. Les Raptors ont eux obligé les hommes de Tyronn Lue à puiser un peu dans leurs ressources mais bien plus en termes d’application dans le jeu qu’en termes de minutes. Pour preuve, contres les Dinos, James a fini la série à 36,6 minutes de moyenne, Irving à 35,2 et Love à 30,1 ce qui est à peine plus qu’en régulière pour James (35,6), moins pour Love et quand même plus pour Irving mais c’est logique vu que celui-ci avait repris doucement car il revenait de blessure. Bref, les Cavs ne peuvent pas parler de fatigue, surtout qu’ils ont eu des mini-vacances à plusieurs reprises entre deux séries.

Mais peut-on pour autant parler d’un avantage si déterminant pour eux par rapport aux Warriors ? Déjà, quand on regarde les chiffres de saison régulière, on s’aperçoit qu’en fait Stephen Curry a joué moins de minutes par match que BronBron (34,2 pour le meneur des Guerriers) et qu’au total, les deux superstars comptent le même nombre de minutes passées sur les parquets, à 9 près : 2700 pour Curry, 2709 pour James. Draymond Green est le joueur de ces Finales ayant les plus écumé les planches en régulière avec 2808 minutes mais il n’a que 26 ans ne l’oublions pas… Pour ce qui est des Playoffs, les hommes de Steve ont eu des Finales de Conférence compliquées mais quand on s’intéresse aux temps de jeu, on s’aperçoit que Curry est à 36,6, Green à 37,7 et Thompson à 34,5 sur cette série. Rien de si dingue pour des gars de leur âge et qui ont été assez tranquilles lors des tours précédents avec des temps de jeu similaires. L’ami Stephen a dû rater 6 matchs à cause de son genou. Il est fragile, on le sait et c’est ça la plus grosse crainte pour Golden State en fait, bien plus que la fatigue car il n’a que 28 ans et peut largement jouer 36 minutes de basket tous les trois jours. Nous parlons ici d’athlètes de haut niveau, ne l’oublions pas ! Après, les blessures sont imprévisibles mais elles le sont autant pour Stephen Curry que pour un autre joueur. Pensez donc au cas Kyrie Irving l’an dernier en Finales. Le meneur des Cavs est lui assez fragile… Du coup, avec cette série qui va démarrer cette nuit et le fait que, même en allant au septième match contre OKC, les Warriors ont eu trois jours de repos, il est difficile voire peu réaliste de parler de réel facteur au sujet de la fatigue physique. On peut donner un très léger avantage aux Cavs sur ce point mais vraiment pour la forme car sur le terrain, il n’en sera rien.

Arrive ensuite, le sujet de la “fatigue mentale”… Alors là, on est vraiment sur une donnée impalpable et très relative. Les Cavs sont en promenade depuis un mois et demi. Ils ont donc connu une légère oppposition, un petit coup de stress contre les Raptors mais sinon, ils ont pu jouer en tongs et n’ont pas du tout eu à puiser en termes de motivation et de détermination. C’est un fait. Le parcours des Warriors fut lui beaucoup plus “chaotique” d’un point de vue psychologique. Il leur a fallu jouer sans Curry pendant 6 matchs : ils n’ont absolument pas craqué et ont fini les Rockets sans sourciller avant de s’occuper des Blazers tranquillement au cours d’une série dans laquelle leur double MVP n’a participé qu’à deux matchs dont un en sortant du banc. Thompson et Green ont été monstrueux contre Portland. Ils ont pris leurs responsabilités tout comme la plupart des role players afin de combler le vide laissé par l’absence de Curry. Ne croyez-vous pas que cela est plus que bon pour le moral ? Au moins aussi bon que de se balader contre les Pistons ou les Hawks, non ? Ensuite, en Finales de Conférence, les Warriors ont trouvé les ressources mentales pour revenir de l’enfer. On les disait au fond du trou mentalement quand ils se faisaient malmener par le Thunder, quand ils se sont retrouvés menés 3-1… Aujourd’hui, très franchement, ne serait-ce pas plutôt l’inverse ? Le fait d’avoir su se remettre en place, d’avoir su retourner une situation aussi mauvaise ne peut que rendre les Guerriers d’Oakland encore plus confiants dans leur capacité à faire le back-to-back. Bref, à l’orée de ces Finales, les Warriors ne sont pas fatigués mentalement. Ils sont au contraire complètement à 100%, à 200% même. Ils ont vécu l’enfer contre Russell Westbrook et Kevin Durant et ils ont clairement la sensation de pouvoir vaincre n’importe qui. A eux de débarquer bien concentrés mais ça, avec trois jours de préparation, il serait surprenant que ce ne soit pas le cas. Donc, niveau fatigue mentale, l’avantage est plutôt côté Warriors. Ils n’ont peur de rien alors qu’on ne sait pas comment les Cavs vont réagir si ça tourne mal pour eux. Et à l’Oracle, il arrive souvent que cela tourne assez mal pour les visiteurs…

Les Finales NBA ne sont pas une simple série. C’est LA série. Celle au cours de laquelle il faut tout donner pour aller enfin chercher le graal. Nous avons ici deux équipes magnifiques qui vont s’affronter certainement violemment pour une bagouze mais, s’il vous plait, arrêtons de toujours parler de fatigue, d’essayer d’en faire un facteur très important alors que son influence n’est finalement qu’assez faible. Surtout cette année où les deux escouades arrivent en Finales avec des parcours très différents mais qui n’augurent en rien de les voir “fatiguées”. Nous allons voir des athlètes exceptionnels, des basketteurs de haut niveau se battre pour le titre suprême. Voilà, ça c’est un fait. Le reste va s’écrire au cours de la confrontation qui commence cette nuit. 

Source image : http://guerir-l-angoisse-et-la-depression.fr/