Rajon Rondo, au carrefour de sa carrière : et si cette saison était celle de sa renaissance ?

Le 28 août 2015 à 12:40 par Anthony

S’il y a bien une chose qui a marqué les fans des Boston Celtics cette saison, c’est le transfert de Rajon Rondo à Dallas. Véritable chouchou du TD Garden, le meneur a rejoint la troupe de Rick Carlisle en fin d’année dernière, et était censé être la pièce qui allait amener les Mavericks en haut du classement de la Conférence Ouest. Mais rien ne s’est finalement passé comme prévu. Petit retour en arrière…

Nous sommes le 18 décembre 2014, un parfum de fêtes de Noël commence à envahir les parquets de la Grande Ligue et Danny Ainge décide de trader Rajon Rondo afin de commencer l’année 2015 sur de nouvelles bases, avec le rookie Marcus Smart notamment. Il appelle donc Mark Cuban, et les deux hommes conviennent d’un échange : « RR » prend la direction de Dallas avec Dwight Powell, alors que Jae Crowder, Jameer Nelson et Brandan Wright font le chemin inverse, accompagnés d’un premier tour de Draft 2015 et d’un deuxième pick pour 2016. Ce jour-là, on pense que le deal est finalement gagnant-gagnant. Le front office de Boston se sépare de son meneur en fin de contrat et récupère de bonnes contreparties, alors que Dallas accueille un meneur de calibre All-Star (enfin, normalement) pour aider Dirk Nowitzki à faire des Mavericks une vraie menace au printemps prochain. Mais voilà, parfois, il y a des alchimies qui ne prennent pas. On pense que les jours prochains seront difficiles sans son meilleur joueur, et ce n’est pas le cas. On croit avoir fait le bon choix, mais c’est finalement tout le contraire. Et l’élément commun à tout cela, c’est Rajon Rondo.

Le transfert qui a tout changé

Pour la Maison Verte, le transfert de leur n°9 était nécessaire pour la reconstruction de la franchise, mais on imaginait que la suite allait être plus compliquée. Seul rescapé de l’épopée 2008, qui a vu la Maison Verte accrocher une 17ème bannière de champion en haut du TD Garden, Rondo était également l’unique All-Star de l’équipe, le leader. Enfin, aux dernières nouvelles. Souvent rabaissé parce qu’il jouait aux côtés du Big Three – Paul Pierce, Kevin Garnett, Ray Allen -, le meneur devait prouver à sa franchise – et à ses détracteurs – qu’il pouvait driver les C’s. Mais force est de constater que ce ne fut pas le cas cette saison. Avant son transfert, Boston possédait un bilan de 9 victoires pour 14 défaites. Et durant les 22 rencontres auxquelles il a participé, Rondo a affiché des stats de 8.3 points à 40.5% de réussite aux tirs et 10.8 passes. Avec la gonfle qui se retrouvait très souvent dans ses mains, le meneur proposait toujours une belle moyenne à la passe, mais n’influait pas suffisamment sur son équipe. Il était toujours capable de quelques coups d’éclats et d’assists splendides, mais ne parvenait pas à faire gagner son équipe. Après son départ, Smart a pris le relais à la mène. Le ballon circulait plus, tout le monde participait, et la franchise du Massachusetts proposait un ratio positif de 31 victoires pour 28 défaites. Ça jouait plus collectif et les C’s se sont finalement installés à la 7ème place de la Conférence Est, synonyme de qualification pour les Playoffs : une possibilité de jouer au printemps presque inespérée. Ils se feront certes sweeper vite fait par les Cavaliers de LeBron James mais ça, c’est une autre histoire.

Rick Carlisle

Rick Carlisle – Source : mysanantonio.com

A Dallas en revanche, l’histoire est plus ou moins inversée. Tout se passait très bien depuis le début de saison, et les Mavs pointaient à 19 victoires pour seulement 8 défaites. Ça tournait bien, Monta Ellis s’éclatait, le grand Dirk envoyait ses fadeaways sur une jambe, Rick Carlisle était content. Mais Cuban, le proprio, voulait quelque chose de plus. Il voulait cet élément qui ferait passer sa team du statut de poil-à-gratter, à celui de contender pour le titre. Jameer Nelson, ce n’était pas assez stylé au poste 1, ce bon Mark pense alors que Rondo serait la pièce idéale. Mais le résultat quelques mois après est tout autre : avec son nouveau meneur, Dallas affiche un bilan de 31V – 24D, bien loin de celui du début de saison. Rajon ne semblait pas concerné le moins du monde par ce qui se passait sur le terrain, avec un air je-m’en-foutiste qui nuira à son équipe. Sûrement le soleil du Texas qui lui est monté à la tête… Les Mavs ont donc terminé 7ème de leur Conférence, et ont rencontré les Rockets au premier tour des Playoffs. Et là, tout est parti en couille. Après un Game 1 compliqué, Rondo ne jouera que 34 petites secondes lors de la seconde rencontre. Il se met à l’écart, semble désintéressé de tout ce qui se passe autour de lui, et coach Carlisle l’invite à s’installer sur le banc. Ces 34 secondes furent les dernières du joueur sous les couleurs de Dallas.

Un sale gosse ingérable ? Un dégradeur de vestiaire ? Un gamin simplement paumé dans sa carrière professionnelle ? On ne sait pas vraiment ce qui a amené Rajon Rondo à se comporter ainsi la saison dernière. Mais après ce fiasco, aucune équipe ne voulait prendre le risque de recruter l’ex-joueur des Mavs et des C’s, désormais free agent. Enfin, sauf une… Une qui n’a peur de rien, une qui prend tous les risques parce que sinon ce ne serait pas drôle. Une qui connaît bien les fortes têtes comme Rajon : les Sacramento Kings. Vlade Divac et Vivek Ranadive vont ainsi lui offrir un ticket d’une saison et 10 millions de dollars, direction l’asile californien le plus connu de toute la NBA. Une proposition inespérée que le joueur s’empressa d’accepter. L’occasion parfaite de redorer son blason, terni par un comportement peu professionnel et un niveau de jeu loin de celui qui était le sien ? Ou simplement, une continuité de la campagne précédente qui lui offrira un abonnement à vie pour l’asile ? Finalement, que pouvons-nous attendre de Rajon Rondo la saison prochaine ?

Rajon Rondo face à George Karl

Si Rick Carlisle n’a pas trop apprécié le passage de « RR » à Dallas, le coach de Sacramento en revanche semble enthousiaste à l’idée de le compter dans ses rangs. Habitué à coacher des meneurs de talent comme Andre Miller, Chauncey Billups ou encore Gary Payton, Karl est certain de pouvoir gérer Rondo. En même temps, quand tu arrives à canaliser Papa au top de sa forme, ce n’est pas le petit gars sorti de Kentucky qui va t’effrayer. Malgré tout, ce sont deux fortes têtes, qui veulent toujours avoir raison. Et cela pourrait poser problème car la relation coach  – meneur est extrêmement importante, le second étant le relais direct du premier sur le parquet.

Doc Rivers, à l’époque de Boston, arrivait à gérer son meneur en usant de patience et de dialogue, tout en se faisant seconder par un trio de futurs Hall Of Famers, expérimentés et respectés dans le vestiaire. A Sacramento, c’est tout le contraire. Karl, à l’image du système offensif qu’il prône n’a pas la patience du Doc, et les futurs Hall Of Famers… on n’en connaît pas chez les Rois. Si nous avons vu récemment que le technicien de la franchise californienne ne se laissait pas marcher sur les pieds par ses joueurs – même s’ils font 211 centimètres pour 122kg -, il devrait en être de même avec Rondo. Le n°9 va donc devoir apprendre à se taire de temps en temps face au dirlo, sous peine d’être mis au piquet.

Rajon Rondo face à sa situation contractuelle

Une saison, et 10 millions de billets verts. Presque inespérée, un aubaine pour le joueur de 29 ans. Considéré par beaucoup comme étant le meilleur meneur de la Ligue il y a encore 3-4 ans, Rondo a vu sa cote dégringoler à une vitesse folle. 10 millions de dollars et une unique saison donc, pour un homme en mission, si toutefois il l’accepte : redorer son blason, dominer à nouveau les discussions des joueurs à son poste, et ramasser un tas d’oseille durant la prochaine free agency. En gros, il aura de nombreuses bouches à fermer, et un niveau All-Star à retrouver après s’être égaré dans le désert texan. Une bonne saison individuelle à base de double-double, deux-trois places de grattées au classement de la Conférence Ouest, et le voilà reparti vers de nouvelles aventures l’été prochain. En revanche, s’il se foire à nouveau, il risque de s’enfermer au troisième sous-sol de l’asile, et on ne le reverra plus jamais.

Rajon Rondo face à ses coéquipiers

Là, on a quand même de bons espoirs. Avec les Kings, Rondo va notamment avoir le plaisir de retrouver ses anciens copains de Kentucky, DeMarcus Cousins et Willie Cauley-Stein, même s’ils n’ont jamais évolué ensemble. Il sera également aux côtés de l’un de ses meilleurs amis, Rudy Gay. Avec son caractère bien trempé, évoluer avec ses potes devrait l’aider à s’acclimater, à s’intégrer dans son nouvel environnement. Ce sera sûrement un beau bordel dans le vestiaire, mais se retrouver auprès de joueurs qu’il apprécie devrait calmer un peu les ardeurs de ce bon Rajon.

George Karl

George Karl – Source : cbssports.com

Côté purement basket-ball, le néo-meneur des Kings devrait se faire plaisir. Dans le système de George Karl, qui propose un jeu offensif rapide, il devrait avoir l’occasion de délivrer des offrandes à la pelle. Il aura la gonfle dans les mains très souvent, et pourra gaver de ballons des croqueurs tel que Rudy Gay. Les snipers – Casspi, Butler, Belinelli etc – cachés dans les coins ou en sortie d’écran devraient également recevoir le ballon dans le timing parfait. Et en transition, il suffit de taper « Rajon Rondo assits » sur Youtube, pour se rendre compte qu’il n’y a certainement pas meilleur que lui lorsqu’il s’agit de lancer des contre-attaques.

Mais si ses talents de passeurs sont indéniables, il en faudra bien plus pour revenir au top. En effet, le produit formé à l’Université de Kentucky n’a jamais pris le temps de s’acheter un shoot correct. Résultat, le gaillard n’a jamais dépassé les 15 points de moyenne depuis son entrée dans la Ligue, et ne représente pas de réelle menace à trois-points, à mi-distance… et même aux lancers-francs. Pour cause, son catastrophique et on peut le dire, honteux, pourcentage sur la ligne durant son passage aux Mavericks, a de quoi faire passer DeAndre Jordan pour un maître en la matière : 45.2%. Oui oui, pour un meneur…

Enfin, et même s’il adore ça, Rondo va devoir apprendre à lâcher un peu plus la gonfle s’il veut que la mayonnaise prenne. Même si Karl a toujours privilégié le jeu extérieur, il y a quand même un gros Babar dans la raquette qui n’attendra qu’une chose, tout péter au poste-bas. Car ce sera bien DeMarcus Cousins le franchise player des Kings, et il ne faudra surtout pas oublier de le nourrir suffisamment de ballons. Boogie ne sera pas simplement là pour faire figuration et poser des écrans extra-larges, pendant que Rajon aura la balle en main. La capacité de l’ancien Wildcat à diversifier le jeu sera donc essentielle.

Rajon Rondo face à sa carrière

Alors qu’on aurait pu y croire il y a quelques années, on est aujourd’hui sûr d’une chose : Rondo n’est pas un franchise player. C’est comme ça. En revanche, c’est un bon joueur de basket, et même un All-Star quand il s’en donne les moyens et joue sérieusement. Ce n’est pas un meneur d’hommes, ni un véritable leader. Mais c’est un lieutenant de luxe, un facilitateur de jeu. Si l’intéressé arrive à comprendre cela et finalement, à reprendre le rôle qui était le sien à Boston aux alentours de 2010, alors il aura une chance de revenir au top. Cependant, avec un melon pareil ce n’est pas sûr qu’il le comprenne tout de suite. Mais à 29 ans, il a encore le temps de montrer qu’il n’est pas fini, et qu’il a du talent plein les mains. Pour évoluer dans une bonne atmosphère, “RR” doit se sentir aimé, écouté, et voir que le jeu tourne autour de lui. C’était comme ça dans le Massachusetts. Mais malheureusement pour lui, ce n’est pas certain qu’il retrouvera les mêmes ingrédients en Californie.

Finalement, Rondo a connu l’environnement idéal aux Celtics, et montre aujourd’hui quelques difficultés à s’adapter dans une autre organisation. Mais la NBA est un business, il n’a pas le choix. Le suite de sa carrière dans la Grande Ligue en dépend fortement. Sur le papier, son passage aux Kings devrait tout de même être une réussite d’un point de vue purement individuel. On devrait le retrouver aux alentours des 12 points – 11 passes, avec quelques triple-doubles bien gras et des joutes verbales avec son coach, l’arbitre et même ses coéquipiers. Parce qu’il est comme ça Rajon, c’est une grande gueule. Il l’ouvrait à l’époque face à Kevin Garnett, alors il ne changera pas maintenant. En revanche, ce n’est pas sûr que son adaptation au sein de la franchise californienne soit un réel succès, et que le bilan collectif connaisse une grande amélioration. Ce n’est rien de plus qu’un chapitre d’une saison pour le joueur, dans le livre qui symbolise sa carrière : le chapitre de la rédemption.

L’objectif pour Rondo sur cette campagne 2015-2016 ? Ne pas se mettre son coach ou ses coéquipiers à dos, proposer des stats individuelles à la hauteur de son talent et surtout, apprendre à la fermer de temps en temps. S’il a dû comprendre la leçon cet été, la véritable clé devrait bien être la capacité de George Karl à canaliser son nouveau meneur. Et même si ce n’est pas gagné, on a tout de même envie d’y croire. Parce que, qu’on l’aime ou qu’on le déteste, Rajon Rondo nous a régalé avec ses passes, ses feintes et autres trick-shots ces dernières années. Et au final, on souhaite tous le revoir au top.

Source image : basketwallpapers.com


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