LeBron, KD, Valbuena : quels joueurs ont vécu le retour le plus chaud dans leur ancienne franchise ?

Le 22 nov. 2022 à 12:23 par Arthur Baudin

Source image : NBA League Pass & YouTube

Quelle plus belle fête que le retour d’un ancien de la maison parti en voleur ? Une salle en ébullition, un orage de guerre, une chaleur presque malsaine, des spectateurs torses nus alors que d’habitude c’est au foot qu’ils font ça, la maman du joueur en question enfermée dans une cage, des chants toujours plus inventifs qui franchissent parfois (tout le temps) la frontière de l’irrespect. Bref, l’objet n°1 d’entertainment dans le sport. 

Cette nuit, Ben Simmons retourne à Philly à 1h30. Vous n’avez pas suivi le contentieux ? Une seule phrase suffit à le résumer. Cela fait 519 jours que l’Australien a disputé sa dernière rencontre avec les Sixers, et 285 jours qu’il a quitté la franchise : trouvez l’erreur. Les noms de palmipèdes vont pleuvoir, des maillots bleus n°25 vont brûler, Doc Rivers et Joel Embiid devront – plus d’un an après avoir titillé Benny en conférence d’après-match – obtenir un résultat. Celui qui perd a perdu, celui qui gagne a gagné : en attendant, on réouvre les bouquins d’histoire pour faire passer le temps.

On ouvre ce papier avec un hors-sujet total, histoire de définir l’« échelle d’hostilité » insérée à la fin de chaque histoire. Le retour de Mathieu Valbuena à Marseille trône tout en haut de cette règle de mesure. Ce n’est pas le même sport mais c’est le même esprit : dans le virage sud (ou nord on sait pas), les fans phocéens ont pendu une poupée à l’effigie de celui qu’ils appelaient autrefois « Petit Vélo ». Un amour rompu par la signature de Valbuena à l’Olympique Lyonnais, une fois son aventure russe terminée avec le Dynamo Moscou. La charge de Karim Rekik qui ne jouait pas le ballon mais bien le petit meneur de jeu, le tacle assassin de Romain Alessandrini – qui n’a même pas cherché à contester son rouge – les mots incorrects de Franck Passi pour son ancien joueur. Une hostilité difficilement égalable, qui eût pris une toute autre dimension si Valbuena avait marqué cette reprise de volée à la 89′. C’est déjà – à notre sens – un joli 10/10.

Note sur l’échelle d’hostilité : 10/10

Un méga front contre front entre Andre Roberson et Kevin Durant. Tu parlais de ça en 2015, les gens te demandaient davantage d’explications puis l’adresse de ton dealos et s’il acceptait les tickets restos. Le 11 février 2017, l’improbable est pourtant devenu une réalité. Pourquoi cet accueil glacial dans l’Oklahoma ? Pourquoi cette confrontation bestiale entre deux amis qui, fut un temps, partageaient le même vestiaire, les mêmes discussions et les mêmes soirées ? Secret de polichinelle pour le commun de mortels : à l’été 2016, Kevin Durant s’est fait la malle en direction de Golden State. Hop, statut d’antagoniste dans la signature la plus choquante de l’histoire, et celui d’ennemi public n°1 là où neuf saisons durant, les gens l’ont acclamé. Pour son retour dans l’Oklahoma donc, les fans du Thunder lui ont réservé un accueil juste tumultueux, stoppé aux huées, pas franchement digne de l’entertainment suscité par la story. Qu’entend-t-on par « pas franchement digne » ? C’était trop digne justement. Divertissant, mais beaucoup trop sport. Une bronca sur chacune de ses prises de balles, insuffisant pour stopper la foudre de Slim Reaper : 34 points à 12/21 au tir, 9 rebonds, 3 assists, 3 pertes de balle et… une victoire californienne de 16 pions. En conférence d’après-match, Kevin Durant s’autorise même un petit chambrage : « Je m’attendais à ce que ce soit pire ».

Note sur l’échelle d’hostilité : 8/10

You wanted drama in OKC? You got it. pic.twitter.com/puuYTC26Dz

— NBA.com (@NBAcom) February 12, 2017

On n’y était pas mais le retour de LeBron James à Cleveland, le 2 décembre 2010, pour y scalper son ancienne équipe de 28 points en en scorant 38 : paraît-il que le spectacle valait le coup. Le thème sonore de Dark Vador pour introduire les joueurs du Heat, et la différence de traitement absolue entre LeBron James et Zydrunas Ilgauskas, deux anciens de l’Ohio partis chasser la bague en Floride. Le Chosen One est hué comme s’il leur devait de l’argent quand le Lituanien est salué par une Quicken Loans Arena reconnaissante. Bon, on doit ce décalage aux contextes : LeBron n’a que 25 ans, Zydrunas en a déjà 35 – et quatorze saisons à Cleveland dans le rétro. Il a en quelque sorte été autorisé à partir pour services rendus à la franchise. L’un a prouvé sa loyauté, l’autre est perçu comme une petite canaille – la plus talentueuse de NBA – prête à tout pour enfin habiller l’un de ses doigts. Mais le problème avec les traitres bourrés de talent, c’est qu’ils sont bourrés de talent : 38 points à 15/25 au tir, 5 rebonds, 8 assists, 1 batterie de téléphone évitée (jetée par un fan quand LeBron soufflait sur le banc) et… la victoire de 29 unités. Même tarif que Kevin Durant dans l’Oklahoma, c’est la maison qui paye.

Note sur l’échelle d’hostilité : 9.5/10

Retour à la source un chouïa plus récent : le 27 novembre 2019, Anthony Davis porte un maillot or dans le bayou. Pas la plus sympathique des relations entre l’Unibrow et la franchise de la Nouvelle-Orléans qui l’a sélectionné en 1er choix de la Draft 2012. Il a demandé son transfert à la volée, en pleine saison 2018-19, comme s’il méritait mieux que E’Twaun Moore et Cheick Diallo (il méritait mieux). Pour le coup, on est trois ou quatre tons en-dessous des retours de Kevin Durant et LeBron James, mais les machines à huées fonctionnaient quand même. Sauf que cette version d’Anthony Davis n’était pas celle que l’on connait aujourd’hui, rouillée par les blessures, dont la stature n’est pas celle d’un membre du Top 75 All-Time. Le AD 2019-20 est roi du post-up, inarrêtable à l’épaule, parfait usager d’un corps à la mobilité redoutable, premier rempart défensif de la 3e défense de NBA. Forcément, quand il fait son grand retour là où Jaxson Hayes est le poste 5 titulaire – et que Jahlil Okafor est son premier remplaçant – la feuille de match laissée par Davis ne peut qu’être redoutable : 41 points à 50% au tir, 9 rebonds, 3 interceptions et… la victoire de 4 points. Une fois n’est pas coutume, deux non plus, mais trois commencent à l’être : tous les retours en territoire hostile semblent s’être excellement ponctués pour la plupart des antagonistes. Qu’il nous manque cet Anthony Davis cheveux courts et grand volume.

Note sur l’échelle d’hostilité : 6.5/10

Petit tour au grenier pour y dépoussiérer le magnéto : le 19 novembre 1993, Dennis Rodman effectue son premier come-back à Detroit depuis qu’il s’en est échappé pour signer aux Spurs. Une marée de huées, la classique, mais les fans sont loin d’être ce que The Worm redoute le plus. Le coach de l’époque, Don Chaney, envoie Bill Laimbeer s’occuper du cas Rodman. Deux des esprits les plus fous de l’histoire de la NBA, l’un sur l’autre, prêts à maximiser leur potentiel de vice dans une atmosphère haineuse et colérique. La rencontre n’a pas dégénéré, Bill Laimbeer a tout simplement fait du Bill Laimbeer. Rien de très visible à la caméra, des petits coups à Dennis en scred, suffisant pour rendre fou le n°10 texan et obtenir les fautes sans en commettre. Les deux hommes finiront à trois coups de sifflet chacun, mais Rodman mange deux fautes techniques et se fait complètement « out-mastered » par son ancien mentor. Il termine par dégoupiller sur le pauvre Sean Elliot, et est expulsé d’un match qui lui a totalement échappé. Grosse gueulante sur l’arbitre, très très limite, la foule est en délire. Accueil hostile mais accueil malin, les Bad Boys de Detroit – bien qu’en fin de cycle – s’y sont toujours retrouvés dans les affrontements sur fond de règlement de comptes. Score final, 95 à 86 pour les locaux, maîtres absolus en la matière.

Note sur l’échelle d’hostilité : 8/10

On retourne s’emmerder à Cleveland avec les retrouvailles entre la Quicken Loans Arena et… Carlos Boozer. Sélectionné en 35e position de la Draft 2002 par l’Ohio, l’ailier-fort double All-Star s’est tiré au terme de sa saison sophomore pour rejoindre le Jazz, une équipe pourrave avec encore moins de perspective d’avenir que Cleveland. Sa motivation ? L’appât du gain. Un contrat de 68 millions de dollars sur six ans, ce qui représente à l’époque 23% du salary cap d’une franchise (fixé à 49,5 millions de dollars). Un sac d’argent plus lourd que celui de 41 millions de dollars – sur la même durée – proposé par les Cavaliers. Mais voilà : plombé par les blessures, Carlos Boozer ne retourne jouer à Cleveland que le 17 mars 2007, soit 978 jours après son départ. On est un peu excentré et pas vraiment dans le Grand Nord, mais « The North Remembers ». À Cleveland, personne – ou presque – n’a oublié ce coup de trafalgar venant de celui qui aurait dû épauler le jeune LeBron James dans sa quête de bague. Impossible de trouver une vidéo de la rencontre, mais les échos du magazine mensuel The Atlantic : « Lorsque Carlos Boozer est revenu à Cleveland en tant que joueur du Jazz, il a été accueilli par un chœur de huées, de signes de colère et des t-shirts qui déformaient son nom de famille en “Loozer” et “Boobie” ». Deux ans et demi après, c’est dingue.

Note sur l’échelle d’hostilité : pas assez d’archives/10

Si l’histoire récente de Toronto est probablement la plus revendiquée par la franchise, c’est qu’elle s’est magnifiquement ponctuée. À l’été 2019, quand Kawhi Leonard se taille chez les Clippers après avoir ramené un titre à la franchise canadienne, les fans pleurent son départ mais ne le blâment pas. Le 11 décembre 2019, The Klaw recevra même un magnifique hommage de la Scotiabank Arena pour son retour sous les couleurs adverses. Le genre d’indulgence dont auraient adoré profiter Tracy McGrady (Magic) et Vince Carter (Nets), tous les deux partis sans se retourner. C’est d’abord T-Mac qui a laissé Vince tout seul, avant de revenir le battre avec Orlando, 101 à 104, sous une tempête de huées. Chacune de ses prises de balle est alors un prétexte pour tirer des coups de feu en l’air et déstabiliser (un peu) l’enfant maudit, qui n’a terminé la partie “qu’à” 24 points à 8/21 au tir. Pour Vince, le retour à la source se fait le 15 avril 2005 contre les Raptors du sophomore Chris Bosh, de Jalen Rose et de Morris Peterson. Une sale histoire. L’octuple All-Star envoie 39 points à 15/26 au tir, 9 rebonds, 4 assists et 3 interceptions pour seulement un ballon perdu. Les Nets l’emportent tranquilou-bilou, 90 à 101, Toronto pleure ses anciens.

Note sur l’échelle d’hostilité : 7.5/10

Mais aussi…

Mention spéciale pour le Game 1 du 17 avril dernier entre Nets et Celtics sous les projos d’un TD Garden brutal. Sans trembler – mais également sans gagner – Kyrie Irving a posé 39 points à 12/20 au tir dont 6/10 du parking. Une performance qui aurait pu rentrer dans l’histoire sans ce « buzzer spin » de Jayson Tatum. Ce match est hors catégorie puisqu’il n’est pas le premier retour d’Uncle Drew à Boston, mais il était compliqué de ne pas le glisser « for the culture ». Et pour les majeurs aussi.

Note sur l’échelle d’hostilité : hors catégorie/10

Kyrie HATES Boston 🖕 pic.twitter.com/qEx6OTLiUe

— LakeShowYo (@LakeShowYo) April 17, 2022

Ça y est, on est complètement bouillant avant le retour de Ben Simmons à Philly. Dans la liste présentée ci-dessus, beaucoup de retours concluants malgré une atmosphère électrique – presque foudroyante – et des fans qui ont su se contenir, à une ou deux batteries de téléphone près. On verra ce que cela donne en Pennsylvanie hein, mais y’a pas que des enfants de chœur là-bas.


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