Mike D’Antoni a bien retenu la leçon : James Harden arrivera avec des jambes fraîches en Playoffs
Le 08 avr. 2018 à 17:53 par Aymeric Saint-Leger
James Harden n’est peut-être pas le joueur le plus impressionnant de la Ligue, à côté de certains zouaves exceptionnels physiquement. Pour autant, il fait une saison exceptionnelle et est entouré par un superbe squad. Cela a permis aux Rockets de moins tirer sur la corde du probable futur MVP. Houston le sait, il faut voir au long terme sur une saison, et la gestion d’El Barbudo pendant la phase régulière va dans ce sens. Le but : avoir son franchise player frais pour attaquer les Playoffs. Pour l’instant, ça fonctionne. Sera-t-il le cas jusqu’au bout ? Affaire à suivre.
Pour viser un titre en NBA, on le sait, il faut avoir une équipe solide, et il faut savoir reposer ses cadres, les gérer, pour qu’ils puissent arriver frais au début de la postseason, et ne pas être cramés en plein mois de mai, ou au début du mois de juin. Gregg Popovich le fait depuis des années, Steve Kerr s’y est mis aussi (de gré ou de force), c’est la recette qui gagne, sauf quand on s’appelle LeBron James et qu’on est plus proche de Terminator que d’un homme normal. Mike D’Antoni a déjà connu ce genre de cas de figure, notamment lors de son passage à Phoenix entre 2003 et 2008. Ce dernier est arrivé l’an dernier à Houston, avec un tout nouvel effectif pour lui. En termes de bilan, 55 victoires et 27 défaites lors de l’exercice 2016-17, c’est très bon. Pour ce qui est de la gestion, c’était moyen. Les Rockets sont arrivés assez fatigués à la mi-avril, et ont fini par s’écrouler contre des expérimentés Spurs en demi-finale de Conférence. Son leader, James Harden, a été moins performant en Playoffs que lors de ses 81 matchs de saison régulière. Il a subi une baisse de pourcentage au tir, une perte d’influence dans le jeu, notamment à la passe, et était complètement rincé en finissant par un superbe 2 sur 11 lors du match 6 contre San Antonio. Le parcours des Fusées s’était arrêté-là, ce qui reste très correct. Cependant, cette année, avec l’arrivée de Chris Paul, les objectifs sont revus à la hausse : on veut le titre et rien d’autre dans le Texas. Ainsi, cela nécessite une meilleure gestion des éléments importants de l’équipe : CP3 bien sûr, mais surtout James Harden. Si les Rockets font une saison régulière incroyable, la meilleure de leur histoire, avec 64 victoires pour seulement 16 défaites, ils ont su ménager la chèvre, le chou et la barbe.
En effet cette année, les Rockets arrivent enfin à mieux gérer la santé et la barre d’énergie de leur go-to-guy. Depuis qu’il est arrivé dans le Texas, à l’été 2012, il a régulièrement joué plus de 38 minutes de moyenne par rencontre sur plusieurs saisons. Il n’a pas terminé une phase régulière avec moins de 36,4 minutes passées sur le terrain par match, de quoi faire surchauffer la machine de temps à autres. Surtout, James Harden a seulement raté 11 confrontations en cinq saisons. De l’été 2014 à avril 2017, il n’a même été absent qu’à deux reprises. Avec son gros temps de jeu, cela fait plus de 9 000 minutes (9 053) disputées en trois ans soit plus de 150 heures ou six journées entières sur des parquets de la Grande Ligue. C’est immense, et le solide arrière tient le choc. Rajoutez à ça des passages réguliers en Playoffs depuis 2013, et cela commence à être bien trop, même pour lui. Le changement d’objectif est clair chez les Fusées depuis la dernière intersaison, c’est cap vers le trophée Larry O’Brien et les Finales NBA. Houston a donc dû s’adapter, et ne pouvait clairement pas continuer à user The Beard. Lorsqu’il était à OKC, l’arrière sortait du banc, jouait un peu moins (31,2 minutes par rencontre sur sa dernière saison), mais c’était notamment dû au fait qu’il avait deux extraterrestres à ses côtés. Après trois années au Thunder, et désormais dans sa sixième saison à Space City, il est temps de redescendre sur terre, et de considérer le All-Star comme un être humain. Le mode de management à la Thibodeau, c’est légèrement archaïque, et on voit bien que cela ne marche pas vraiment, cf. les blessures de Butler et Rose. Les Rockets ont donc été plus intelligents, et MDA a moins utilisé son joueur phare cette saison.
En termes de temps de jeu, l’écart peut sembler infime : le chef cuisinier est passé de 35,5 à 34,6 minutes chaque soir derrière les fourneaux entre la saison dernière et celle en cours. Une minute de moins, ce n’est pas énorme, mais ramené sur l’ensemble d’une année, cela peut compter. Pourtant, il a fallu du temps pour se rendre compte qu’il fallait reposer l’arrière en vue des joutes printanières. Sur les mois d’octobre, novembre et décembre, il jouait beaucoup, respectivement : 36,3 minutes, 35,7 et surtout 36,9 sur le dernier mois de 2017. C’était trop, et vu que personne n’avait l’air de s’en rendre compte, c’est le corps de James Harden qui a dit stop. Une lésion à l’ischio-jambier de niveau 2 s’est déclaré lors du soir du réveillon du jour de l’an. Résultat, deux semaines d’absence, sept matchs ratés, du repos pour l’ami El Chapo, qui devait en avoir marre de cavaler. C’était donc une aubaine, cette alerte. On était à la limite du sur-régime, et le management des Rockets l’a bien compris. Son temps de jeu a drastiquement baissé sur les mois suivants, ne dépassant pas les 35,1 minutes de moyenne par rencontre. Judicieusement, il a été reposé dès qu’il avait un petit bobo, on a compris qu’aucun risque ne devait être pris avec le franchise player de Houston. Sans lui, la logique de jeu, et le niveau de l’équipe sont beaucoup moins cohérents. Ainsi, par deux fois en mars, il a été reposé, pour des petits soucis au genou gauche, et à la cheville. La carapace physique de la barbe la plus célèbre de la Ligue commençait à se fissurer tout doucement, il fallait réagir, ça a été fait, heureusement. Neufs matchs ratés, cela représente environ un delta de 400 minutes entre la saison actuelle et l’exercice 2016-17. 400 minutes de moins, ce sera toujours cela d’économisé pour les Playoffs.
Et le mieux, c’est que ce système où l’on repose un peu plus Harden, ça marche. Les Rockets ont le meilleur bilan de la Ligue, ils sont assurés de finir premiers à l’Ouest, James Harden fait une saison incroyable, qui lui vaudra sans doute un titre de MVP. Notamment grâce à ses statistiques : 30,6 points à 45% au tir, dont 36,6% du parking, 5,4 rebonds, 8,7 assists, mais également du fait du bilan de 64 wins – 16 losses de sa franchise. Dimension collective, plus performances individuelles, signifie sans doute trophée Maurice Podoloff en fin de phase régulière. Ce serait le premier pour El Barbudo, qui est également à la recherche d’une première bague. Il reste deux rencontres à jouer pour les Texans avant d’attaquer la route vers le plus beaux des trophées, qui porte le nom de Larry O’Brien. L’objectif : le coup double pour El Chapo. Et il aura toutes les armes pour le faire : un bon collectif, l’avantage du terrain sur toute la durée de la postseason, même jusqu’en juin. Mais surtout, des jambes fraîches. Toute once d’énergie est bonne à prendre pour cette guerre qui peut durer quasiment deux mois pour les deux meilleures franchises. Et si on peut penser que l’arrière tire toute sa force de cette barbe si bien fournie, le repos qui lui aura été accordé (ou que les blessures lui auront donné) pourrait s’avérer prépondérant lorsque ça comptera vraiment, quand il faudra être clutch, lucide, et en mettre un peu plus, donner un coup de collier supplémentaire pour faire la différence dans une fin de rencontre. Suffisant pour aller décrocher la lune ? On ne sait pas encore, mais les Fusées visent les étoiles, et se sont donnés les moyens pour y parvenir.
Les Rockets semblent enfin avoir compris que James Harden est une machine, mais que ce n’est pas LeBron James. Le repos accordé à El Barbudo pourrait être déterminant pour la suite des événements. En attendant, la nouvelle gestion d’El Chapo par sa franchise a porté ses fruits pendant la saison régulière, dont l’arrière devrait être MVP. Ceci dit, que personne ne s’y trompe, l’objectif des Fusées sont les Finales NBA, et avec un James Harden en forme jusqu’au bout, Houston pourrait y arriver, jusqu’au trophée. Paiera, paiera pas ? Verdict dans deux mois, stay tuned.
Source texte : ESPN