Kevin Garnett, nostalgique du trashtalking : « Plus personne n’en fait dans la Ligue aujourd’hui »

Le 20 mars 2017 à 12:44 par Maxime Claudel

Kevin Garnett
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Kevin Garnett a laissé un vide sur les parquets tant on peut affirmer qu’il est le dernier vrai badboy de la Ligue, lui qui a assisté, en totale immersion, à l’aseptisation de la NBA. Adepte du trashtalking, KG est nostalgique de la violence verbale et dénonce en filigrane le côté un peu trop pote des stars d’aujourd’hui, dans un entretien réalisé par Maxime Malet de L’Equipe lors du All-Star Weekend.

Champion NBA en 2008 avec les Boston Celtics, Kevin Garnett a marqué la NBA de son empreinte. Sa hargne sur les parquets, ses coups de sang, son leadership naturel, son charisme fou, son regard de tueurs, ses feuilles de statistiques qui ne souffraient pas de son comportement à la limite : autant d’éléments qui l’ont érigé au statut de légende de son sport, matérialisé par son titre de MVP obtenu en 2004. Personne ne voulait être son vis-à-vis, pour la simple et bonne raison que c’était l’assurance de passer un sale quart d’heure, aussi bien physiquement (il fallait l’arrêter le bonhomme) que mentalement. Car le désormais consultant maîtrisait l’art du trashtalking, consistant évidemment à déstabiliser l’adversaire en lui soufflant des mots tout sauf doux aux oreilles. L’ailier fort en avait fait sa marque de fabrique mais, comme il le rappelle, il ne s’agissait pas de tomber dans l’insulte facile, encore moins de toucher aux mamans. C’est sacré, les mamans.

Je ne suis jamais tombé dans les attaques personnelles. C’était toujours à propos du match qu’on jouait, de l’instant qu’on vivait. Je ne parlais pas des petites amies, des femmes, des enfants, de la famille… On n’était pas dans la rue, mais sur un terrain de basket.

Sauf qu’à ses yeux, plus personne ne trashtalk aujourd’hui. On a pourtant vu LeBron James chambrer plusieurs fois Stephen Curry ou Draymond Green lors des finales NBA de la saison dernière. Mais ce n’est plus la même chose pour Kevin Garnett. Il explique cette évolution malheureuse par le fait que les joueurs sont de plus en plus amis, empêchant les franchises de nourrir de vraies rivalités qui accoucheraient d’une intensité supplémentaire sous les panneaux. Il estime par ailleurs que les hommes ont changé d’état d’esprit.

Aucun joueur ne se sent aussi sûr de lui pour ça. La capacité de faire du trash talking et, au travers de ça, de contrôler le match et l’environnement, est en train de disparaître totalement du jeu. Gary Payton, Michael Jordan ou Charles Barkley arrivaient par ce biais à prendre l’ascendant sur le jeu, les adversaires et la dynamique d’un match. Je ne vois plus personne se comporter comme cela aujourd’hui.

En quelque sorte, Kevin Garnett est le dernier vrai badboy que la NBA a connu. À l’heure actuelle, les méchants s’effacent au profit des gentils qui veulent bien passer dans les médias et être adulés de tous. De temps en temps, certains gentils font les méchants – on pense à Kevin Durant – mais l’impact n’est plus le même et la supercherie est vite désamorcée. À contrario, KG se nourrissait de sa personnalité clivante : il vivait et mourrait par elle. Il ne jouait pas pour être apprécié et, mieux, il se sentait bien plus performant quand il était hué. Surtout quand il jouait face au Heat et aux Lakers.

Chaque époque a son propre basket. Celle que nous vivons actuellement a opté pour le mode Bisounours. Il n’est pas exclu que le trashtalking quotidien revienne un jour. C’est avant tout une question d’hommes. Les stars de maintenant se concentrent davantage sur le sportif et le public se languit d’abord de savoir si tel ou untel a réussi un énième triple double lors du dernier match. Nous sommes dans une ère de statistiques et de highlights, à la fois propre, policée mais terriblement bandante. On attend maintenant qu’un Kevin Garnett bis vienne foutre un coup de pied dans le derrière de tous ces gendres idéals, qui préfèrent se réunir au sein d’une même franchise plutôt que de se provoquer sur les parquets.

Source : Magazine l’Équipe