“Playing for the Mob” ou les paris truqués de Boston College : l’histoire vraie qui a inspiré “Les Affranchis” de Scorsese
Le 10 déc. 2014 à 19:10 par Leo
En 1990, Martin Scorsese dévoile l’une des plus belles réalisations de sa prestigieuse filmographie, intitulée Les Affranchis. Un film de gangsters classieux et rythmé par le charisme crevant l’écran de Robert de Niro, Joe Pesci et Ray Liotta. Mais connaissez-vous la véritable histoire du personnage principal, à savoir Henry Hill, interprété par Liotta justement ? Flashback instantané dans les viscères de la mafia grâce à ce Playing for the Mob de Joe Lavine…
A la fin des années 70, le réseau mafieux de Jimmy Burke (De Niro dans l’oeuvre de Scorsese) règne sur de nombreux Etats de la côte Est des States en tirant les ficelles de plusieurs domaines clés : drogues, casinos, restaurants… Dès lors, rien de plus facile que d’aller soudoyer quelques jeunes étudiants tout à fait innocents de Boston College pour accroître son capital d’argent frauduleux. Ce fut, dans les grandes lignes, la mission qui fut confiée à Henry Hill, membre actif de ce gang de wise-guys : intimider les joueurs de l’équipe afin qu’ils fassent en sorte de maintenir ou de creuser un écart au cours des rencontres du championnat NCAA, un écart fixé au préalable dans le pari mis au point par les gangsters. Au travers de l’explication de ce mécanisme scrupuleusement huilé, le documentaire regroupe avec soin les témoignages des victimes encore marquées de l’époque dont Ernie Cobb et Jim Sweeney, ce-dernier ayant été la star adoubée de la fac car classé parmi les meilleurs de toute la région dans trois sports différents. Cependant, bien que cette machination insoutenable eut duré pendant un bon moment, les retombées pour leurs instigateurs ne furent pas aussi alléchantes qu’elles pouvaient le laisser entendre. Néanmoins, elles furent suffisantes pour mettre la puce à l’oreille à la presse et à la police qui finit par coincer le fameux Henry Hill en émettant des soupçons sur son implication dans le “Casse de la Lufthansa”, un braquage inédit, opéré en plein jour à l’aéroport JFK de New York en 1978.
Ainsi, c’est là que l’oeuvre prend tout son sens en brossant le portrait central de Hill “la balance” qui commente, non sans honte et soulagement, ses aveux déclamés devant la justice. Établissant une superposition éloquente entre la scène filmée en plan serré des Affranchis, où Ray Liotta envoie tous ses anciens associés au placard pour se sauver, et les authentiques enregistrements audio du procès originel, le docu renferme une portée historique très intéressante à analyser, une mise en lumière cathartique d’un homme pris à la gorge qui eut, comme nul sbire de son genre avant lui, le courage (ou l’infâme lâcheté, à vous d’en juger) de briser la loi du silence au cœur d’un milieu de truands où elle s’apparente à la règle n°1 à ne jamais enfreindre. En outre, on découvre véritablement le double visage d’un Henry Hill tourmenté qui, à la fois, profite d’une notoriété compassionnelle obtenue grâce à l’impact attendrissant sur le public de la fiction de Martin Scorsese au cinéma et personnifie cette expression marquante de “petite merde” prononcée par Liotta clôturant le film, ce revers de la médaille déshonorant pour un parrain de la pègre retombé dans l’anonymat le plus misérable du commun des mortels.
En bref, voilà un très beau florilège d’anecdotes qui ressassent le passé d’un caïd repenti sous fond de méthodes d’intimidation que l’Université de Boston College tente toujours d’effacer de sa mémoire. En d’autres termes, une bonne raison pour se refaire Les Affranchis juste après…!
Source image : montage