Un peu de NBA avec Roberto Minervini, réalisateur italien fan de balles oranges : silence, ça joue !

Le 03 déc. 2015 à 15:48 par Bastien Fontanieu

Roberto Minervini

Ce n’est pas parce qu’on passe la majeure partie de son temps derrière la caméra qu’on ne peut bien voir ce qui se passe autour de soi. Réalisateur du documentaire The Other Side, en salle depuis le 25 novembre, Roberto Minervini a son mot à dire en ce qui concerne la NBA d’aujourd’hui. Moteur, action.

Un Italien qui vit au Texas, si on demande à notre communauté de deviner, les plus courageux oseront mentionner Danilo Gallinari en réalisant leur manque de connaissances en géographie américaine. Non, Roberto Minervini est un réalisateur qui suit désormais de très près les Houston Rockets. Et à l’heure où sort The Other Side, son documentaire sur les white trash américains de Louisiane, présenté cette année au Festival de Cannes dans la section Un certain regard, voici quelques échanges avec un type qui explique pourquoi James Harden n’y arrivera pas seul. Entre autres théories, prochainement dans Society.

Existe t-il des clubs qui selon vous portent en eux l’ADN des losers ? Il y a quelque années, je suis devenu un fan des base-ball, or, avec les Mets, on a fini en finale des World Series cette année, donc tout est possible. Pareil en NBA, ça a toujours été un peu la honte d’être derrière les Clippers, sauf depuis quelques années. La Draft, c’est intéressant, les losers changent de camp et ne restent pas des losers pour toujours. Les équipes actuelles des Warriors ou des Cavaliers sont sorties de nulle part en quelques années. En football, en Liga, les écarts avec le Real ou le Barça sont trop importants. En NBA, on n’a que les Sixers qui créent de la gêne…

C’est le principe d’une ligue fermée, non ? Les propriétaires américains acceptent de perdre un peu pour gagner beaucoup et faire grossir le gâteau… Bon, ça peut se jouer sur un recrutement : les Mets ont recruté un pitcher et tout a changé. Mais l’alchimie joue aussi beaucoup, énormément même. Curry, les Warriors l’ont pris en 7ème position, sans parler des Thompson, Green, Barnes qui ce ne sont pas des tours de drafts très hauts. Les Cavaliers ont drafté Lebron mais il va bien falloir attendre la présence de Kyrie Irving en finale pour vraiment compléter le tableau. Il n’a pas joué la finale l’année dernière.

Le franchise player ne peut plus juste être décisif, il doit être garant de l’esprit d’équipe… Oui, peut-être même plus que l’entraîneur. Steve Kerr pèse dans son vestiaire mais à Cleveland, on se demande comment ça se passe vraiment. Ils vont chercher un coach comme David Blatt parce que Lebron se manage tout seul. Lebron James avec un Popovich ? Ça irait forcément au clash. Kobe Bryant, lui, décide désormais quand il veut rentrer et sortir. Dans le base-ball, c’est pareil, on en trouve aussi. Cette culture de la star, ça existe.

Quand vous allez voir les Rockets à Houston, vous regardez en quoi en particulier ? Les positions shooteur/rebondeur. J’aime regarder des équipes avec de gros shooteurs et des très bons mecs dans la raquette. Avec les Rockets, on a Dwight Howard et Harden sur qui tout le monde fait prise à deux mais il manque clairement un meneur pour que ça marche. A l’intérieur, on trouve bien un Ariza pour aider l’équipe mais Harden pénètre trop, il abîme l’option du shoot de l’extérieur. Oui, l’équipe manque d’un meneur.

C’est la différence avec les Warriors ? Non, pas que, un joueur comme Andrew Bogut permet aux autres d’avoir de la valeur, d’être un vrai actif pour l’équipe, sa présence rassure. Tout le monde se dit que les Warriors gagnent parce que Curry est un bon shooteur à trois points mais la clé n’est pas là. Le vrai truc, c’est que les autres équipes doivent faire prise à deux sur Curry, minimum, et que ça libère un ou des shooteurs. Leur réussite et la présence de Bogut dans la raquette font le reste, elle est là la différence. Cette relation shooteur-rebondeur, c’est la clé de la gagne.

Vous avez habité à New York, vous suivez encore un peu les Knicks ? En fait, j’étais pote avec Danilo Gallinari, on a sympathisé. J’allais voir les Knicks, beaucoup trop, si bien que j’ai oublié qu’en tribunes, aux Etats-Unis, il y a d’autres règles non-écrites qu’en Europe. Un jour, contre Portland, on perd de trois points. Un mec devant moi, pour les Blazers visiblement, s’est levé avec ses trois doigts en l’air et et j’ai gueulé :“Assieds-toi putain, on perd, là, assieds-toi…” Le mec m’a regardé et m’a dit: “Dude, tu n’es pas fou ou quoi ?” Ma femme est américaine, elle était assise à côté de moi. Elle est restée très calme et m’a dit: “Tu me fais honte.” New York, les gens sont tendus, la rivalité est forte. Houston, disons que c‘est plus calme…

Propos reccueillis : Brieux Férot

A voir : The Other Side (Louisiana), documentaire de Roberto Minervini, avec Mark Kelly, Lisa Allen, James Lee Miller. Festival de Cannes 2015 – Un certain regard

Source : Society – Brieux Férot

Source image : Zimbio