John Starks : combien de temps avant de retirer le numéro 3 aux Knicks ?

Le 10 août 2015 à 09:48 par David Carroz

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C’est l’histoire d’un gars né dans l’Oklahoma dont la carrière NBA n’a pas tenu à grand chose. L’histoire d’un mec qui entre vol et cannabis ne s’est pas attiré les faveurs des scouts lorsqu’il était à l’université. De Roger State CC à Oklahoma State en passant par Northern Oklahoma CC et Tulsa JC, difficile d’imaginer John Starks faire son trou chez les professionnels. Et pourtant, avec une part de chance à ses débuts, beaucoup de hargne et de culot par la suite, il s’est imposé dans le cœur des fans des Knicks. Il est temps aujourd’hui de lui rendre hommage en réclamant le retrait du jersey numéro 3 à New York.

Non, pas le numéro 3 de Dennis Scott, celui de “Starbury”, de Shawne Williams, Kenyon Martin ou Jose Calderon. Celui de John Starks, un joueur dont le palmarès est loin des meilleurs joueurs de sa génération, puisqu’il n’a pris part qu’à un seul All Star Game et été élu une unique fois dans une All Defensive Team. Son plus grand fait d’armes en terme de récompense se limite – le mot est volontairement dur – à un titre de meilleur sixième homme en 1997. Certes, de nombreux joueurs aimeraient pouvoir en dire autant. Mais lorsqu’on a croisé régulièrement la route de Michael Jordan, Mitch Richmond, Reggie Miller, Latrell Sprewell, Clyde Drexler, Joe Dumars ou plus tard Kobe Bryant et Penny Hardaway, cela ne pèse pas lourd. Pourtant, la marque qu’il a laissée sur les années 1990, en particulier du côté de New York, dépasse largement les honneurs distribués par la Ligue.

De tous les arrières qu’il a affrontés, Reggie et Michael ont été ses principaux rivaux. Si le joueur des Pacers et celui des Bulls avaient plus de talent que John Starks, jamais le shooting guard des Knicks n’a baissé les bras ou les yeux devant le challenge de devoir les contenir. Il savait qu’ils étaient meilleurs que lui – sans le reconnaitre – mais il voulait les gêner, leur rendre la vie horrible sur le parquet. Par tous les moyens : défense, attaque agressive, parole, coup vicieux… De quoi ajouter encore plus à l’intensité de ces confrontations. Et c’est ça que le Madison Square Garden aimait chez Starks : il donnera tout, rendant ces rivalités historiques. L’arrière new-yorkais rentrait chaque soir avec l’écume à la bouche, comme si sa vie dépendant de l’issue de sa match-up.

Il faut dire que son parcours justifie sa hargne. Non drafté en 1988, il gratte quand même un contrat à Golden State avant de partir s’aguerrir en CBA (Continental Basketball Association) et WBL (World Basketball League). Suffisant pour que les Knicks lui proposent un essai. Comme à son habitude, John Starks va au bout de lui-même et toise ceux qui seront ses coéquipiers lors des entrainements. Dans sa volonté de marquer les esprits, il tente un dunk sur Patrick Ewing. Sérieux mec ? Le pivot le scotche et Starks se tort le genou, direction la case infirmerie. Ce qui aurait dû être un coup dur sera finalement sa chance. Alors que les Knicks souhaitaient le couper, ils ne peuvent mettre fin à son contrat tant qu’il est blessé. A son retour, le staff médical doit s’occuper du cas d’un autre arrière de l’effectif, offrant une opportunité unique au #3 de prouver ce qu’il vaut en saison régulière. Il saisira la perche tendue pour gravir les échelons dans le roster. La porte était entrouverte, il a glissé le pied et ne va pas la laisser se refermer. Avec l’arrivée de Pat Riley, il va être comme un poisson dans l’eau dans une équipe composée majoritairement de guerriers. A l’instar de feu Anthony Mason, John Starks va profiter des conseils du coach gominé pour atteindre un nouveau palier et s’imposer comme un titulaire, principal lieutenant de Patrick Ewing, chargé de défendre sur le meilleur extérieur adverse tout en allumant les mèches en attaque.

Cette agressivité, c’est sa marque de fabrique. Quand certains ont le talent, lui avait le coeur en plus. Quand d’autres ont la technique, lui rajoutait la rage. Et quand beaucoup étaient à la recherche des dollars, lui avait le basket et New York qui coulaient dans ses veines. Il considérait Big Apple comme les New-Yorkais voient leur ville : unique, exceptionnelle. Le petit gars sorti de nulle part (non, Tulsa n’est pas l’endroit le plus hype des USA) sur qui personne ne misait a fait sa place sur la plus belle scène du basket au monde, le Madison Square Garden. Pas parce qu’il était doué, mais parce qu’il en voulait plus que les autres. Un “American Dream” qui plait toujours autant au pays de l’Oncle Sam. N’oubliant jamais d’où il venait, il n’a cessé d’aborder les matches le couteau entre les dents.

Aujourd’hui, beaucoup de joueurs dans la Ligue ont reçu les acclamations de la foule au lycée et à l’université, peu importe où ils allaient. Je n’ai jamais connu ça. J’étais juste content que quiconque m’applaudisse quand je suis arrivé en NBA. – John Starks.

Un jour, ce n’est pas une personne qui s’est levée pour acclamer John Starks, mais un stade entier. En ce 25 mai 1993, les Knicks ont la possibilité de mener 2-0 face aux Bulls en finale de Conférence Est. Alors qu’il reste moins d’une minute à jouer dans un match serré, l’arrière remonte la balle. Au niveau de la ligne des 3 points, il profite d’un écran “Kevin Garnett” de Patrick Ewing pour prendre le dessus sur B.J. Armstrong. Starks plonge alors vers le cercle, et tandis que Michael Jordan et Horace Grant se dressent devant lui, il s’élève. Repense-t-il à ses débuts à NY quand “The Beast of the East” le scotchait et l’envoyait à l’infirmerie ? Certainement pas, le doute n’a pas sa place dans le jeu du #3. Boum, il fracasse le cercle main gauche, sur le museau de MJ et les goggles de Grant, pourtant deux défenseurs réputés. Le Madison Square Garden exulte, les Bulls sont battus. Mais s’ils perdent cette bataille, ils remporteront une fois de plus la guerre. Dans cette action, Starks a symbolisé une décennie de basket chez les Knicks. Un joueur loin d’être le plus brillant de tous qui met toute son envie au service du collectif. Un travailleur qui dépasse les espérances placées en lui pour imposer le respect. Un pur moment de NBA qui justifie à lui tout seul que John Starks soit dans la légende des Knickerbockers. Une élévation qui n’aurait dû être que l’introduction à un envol encore plus majestueux, celui du numéro 3 floqué du nom “Starks” dans les airs du MSG pour toujours.

A quoi ça tient la postérité ? A une phalange d’Hakeem Olajuwon ? Si le pivot des Rockets n’avait pas touché l’ultime shoot de John Starks lors du Game 6 des Finales NBA en 1994, la question ne se poserait même pas. Avec 3 points supplémentaires, il apportait sur un plateau la victoire aux Knicks au terme d’un match qu’il a pris à son compte. Avec 3 points supplémentaires, il donnait le titre tant attendu à Big Apple. Avec 3 points supplémentaires, il s’évitait la pire rencontre de sa carrière, ce 2/18 lors du Game 7 qui a fait de lui un héros maudit. Avec 3 points supplémentaires, il terminait meilleur marqueur de la série pour New-York et avait l’opportunité d’être MVP des Finales. Avec 3 points supplémentaires, son maillot serait déjà aux côtés de ceux de Walt Frazier, Dick Barnett, Dick McGuire, Earl monroe, Willis Reed, Dave DeBusschere, Bill Bradley et Pat Ewing.

Malgré ces 3 points qui lui manquent tant aujourd’hui, John Starks n’en reste pas moins le joueur des Knicks ayant rentré le plus d’ogives depuis le parking, à faire pâlir un “Gérard” Smith. Ses 982 réussites de loin sont toujours sur les tablettes et ne vont pas être délogées de si tôt. A cette menace extérieure, il a également ajouté une bonne dose de collectif, puisqu’il est le 8ème meilleur passeur de l’histoire de New York avec 2394 offrandes, et une défense acharnée, comme en attestent ses 711 interceptions, 7ème marque à Gotham. En 8 saisons, il aura apporté 14,1 points à 42,3% dont 34,5 derrière l’arc, 2,7 rebonds, 4,0 assists et 1,2 steal en 28,7 minutes de jeu. Auxquels on peut rajouter du coeur, des tripes et des cojones. Vite, retirons son maillot.