Cher Kevin Durant, je m’excuse de t’avoir mal jugé.

Le 11 mai 2014 à 16:09 par Bastien Fontanieu

Cher Kevin Durant,

Je m’excuse de t’avoir mal jugé. J’ai probablement commis une grave erreur, et j’aimerais t’expliquer pourquoi j’ai agis ainsi. Je ne sais pas vraiment par où commencer, les mots me manquent mais le sentiment lui ne veut pas disparaitre. En fait, si on devait dérouler la bobine, il faudrait reprendre les évènements les plus récents en premier. Comme ton speech, pour couronner le premier titre de MVP de ta carrière par exemple. Après tout, il vient de là mon déclic ! Est-ce que je suis le seul à avoir vécu l’évènement différemment ? Peut-être, mais ce qui est sûr c’est que ton message est bien passé. Très bien passé même.

Je m’excuse de t’avoir mal jugé. D’avoir cru que tu étais une star NBA comme les autres. Après tout, j’y peux rien, c’est cet automatisme véhiculé par la Ligue qui a brouillé ma vision des choses, ma vision de ta personne. Ah non, je ne recule pas devant mes responsabilités ! Je dis simplement que je t’avais peut-être catalogué un peu trop rapidement avec tes autres collègues de boulot. Finalement, tu n’es pas une star comme les autres. Peut-être que cette association avec Jay-Z en tant qu’agent il y a quelques années n’était pas un premier signe de départ. Peut-être que ces embrouilles avec Russell Westbrook n’étaient pas du genre à te donner envie de faire ta valise. Est-ce qu’on a créé des conclusions un peu trop hâtives ? Probablement. Mais il ne faut pas non plus oublier que nous sommes la génération The Decision. Beh oui, forcément : nous depuis Juillet 2010, on est un peu devenu des gros paranos du marché, prêts à sauter sur la moindre proie. Dès qu’on voit un signe, dès qu’on a un doute, on construit une montagne d’arguments qu’on vomit sur la toile en espérant que nos prédictions se réalisent vraiment. Et ça, que tu le veuilles ou non, tu y auras droit pendant un bon bout de temps. Mais pour le moment, je préfère pointer le menton vers le sol que le soleil.

Je m’excuse de t’avoir mal jugé. D’avoir pensé que LeBron, Dwight et Melo rimaient avec Durant, Paul et Rondo. Peut-être que tu es davantage comme Tim Duncan, le genre à préférer rester à un seul et même endroit, même si les tentations sont nombreuses et variées ailleurs. On est tellement obnubilés par cette idée selon laquelle les grands joueurs veulent forcément les grands marchés qu’on en oublie même les principes fondamentaux du basket, du sport en général. Et c’est ça qui m’a fasciné avec ton speech. C’est pas les larmes, les punchlines sur Hasheem Thabeet ou les remerciements faits avec politesse et douceur : c’est cette simplicité, ce remerciement pour les choses fondamentales, pour la vie tout simplement. Quand on t’écoute parler en recevant ce trophée, on oublie complètement les histoires de contrat, de discordes entre joueurs de la même équipe, ou les résultats des PlayOffs. Ce qui me gifle, et c’est une gifle méritée pour moi, c’est cette exemplarité auprès des jeunes qui te regardent et aimeraient te ressembler. Ce n’est plus une question de franchise, d’agents ou de coach. D’ailleurs, tu le dis toi-même pour commencer : tu as enfin compris que le basket n’était pas une fin en soi mais que ton rôle était d’inspirer les gens. Et avec ton speech Kevin, tu m’as plus qu’inspiré, tu m’as remis à ma place. Et j’en avais besoin apparemment.

Je m’excuse de t’avoir mal jugé. D’avoir annoncé que tu quitterais Oklahoma City à la fin de ton contrat actuel. Si ça se trouve, tu le feras hein. Mais au moins j’aurais eu le temps de revenir sur mes positions et faire quelques aveux. Peut-être que tu resteras toute ta carrière dans les plaines du Sud, et c’est honnêtement ce que je souhaite aujourd’hui. Vraiment. Car la NBA manque de stars affiliées à une ville, une franchise, une période. Kobe, Duncan et Dirk seront respectés à jamais pour cela, pour avoir gardé le même maillot toute leur carrière : merde, même Jeff Foster a représenté Indiana toute sa vie ! Cela ne remet pas en cause la légitimité des LeBron ou autres Carmelo, c’est simplement que l’équilibre compétitif de la NBA dépend des stars comme toi Kevin. Ces héros qui ne bougent pas, qui essayent, qui vont tout faire pour élever leur franchise le plus haut possible : Reggie Miller, John Stockton, Joe Dumars, Wes Unseld, tous ont essayé et sont plus ou moins arrivés à remplir leurs objectifs. Mais même quand ils ont échoué ? Ils ont gardé cette pureté dans leur image, celle d’hommes loyaux qui auront tout tenté face à l’adversité. Et ce choix, tu peux le faire aujourd’hui, puis demain. Tu peux rejoindre le phénomène actuel qui est de partir quand ça commence à chauffer, ou tu peux rester dans une communauté qui t’a aidé à grandir pour le lui rendre au centuple. Tu peux écouter tes potes qui te diront que le bonheur et le succès se trouvent ailleurs, ou tu peux suivre ces propos que ta mère t’a appris à formuler : quand quelque chose de positif intervient dans ta vie, il faut regarder en arrière pour remercier ceux qui t’ont permis d’y arriver.

Je m’excuse donc une dernière fois Kevin Durant. Le jeu, le basket, on en reparlera plus tard. La série face aux Grizzlies nous a déjà permis de te critiquer sur de nombreux points, et celle contre les Clippers pourrait nous permettre de passer à la vitesse supérieure. Mais aujourd’hui il fallait que je prenne un petit moment pour m’excuser et te remercier. Merci pour cette leçon d’humilité, merci pour ce rappel aux choses fondamentales qu’on oublie souvent. Quelle que soit ta future destination, tu auras au moins rappelé à un fan que le basket n’était pas une fin en soi, que toutes les stars n’agissent pas de la même façon. Et il fallait l’entendre pour mieux te comprendre. Merci Kevin. 

Source image : SheKnows.com


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