Le basket au Japon : de Slam Dunk aux playgrounds enflammés de Yoyogi

Le 24 août 2023 à 12:46 par Edgar Courtine

Slam Dunk Basket Japon
Source image : Geek O World

Le Japon sera l’un des trois pays hôte de la Coupe du Monde de basket 2023. L’occasion de nous plonger dans la culture basket nippone. De l’animé culte Slam Dunk aux parties brûlantes des playgrounds de Tokyo, immersion au Pays du Soleil Levant, mais avec un rond orange sur le drapeau. 

Lorsque l’on parle balle orange, on ne pense pas instinctivement au Japon. Barré pendant longtemps par d’autres grands sports nationaux comme le baseball, le football ou le sumo, le basket commence gentiment à trouver sa place. Dans l’archipel nippon, la culture basket s’est largement répandue, et ce n’est pas un hasard si le Japon est co-organisateur (avec les Philippines et l’Indonésie) de cette Coupe du Monde 2023. Par le biais de la culture des mangas et des animés avec le phénomène Slam Dunk au début des années 1990, le basket est devenu, au fil du temps, une réelle passion dans l’archipel.

Un homme : Takehiko Inoue. 

En 1990, lorsque ce dessinateur de génie décide de consacrer une partie de ses crayons au basket, il est (sûrement) loin de s’imaginer qu’il vient de planter une première graine dans la “démocratisation” du basket au Japon. Il est aussi loin de s’imaginer qu’en créant Slam Dunk, il réalisera le plus grand succès de sa carrière en vendant pas moins de 170 millions d’exemplaires de son manga à travers le Globe.

Le phénomène est rapidement adapté en un animé de 101 épisodes diffusés partout dans le Monde. Ce succès planétaire a non seulement permis la diffusion massive du basket-ball au Japon mais a aussi permis à Takehiko Inoue de devenir l’un des plus célèbres mangakas japonais.

L’œuvre d’Inoue a fait l’objet d’une émission spéciale chez nos confrères de Clique TV qui reviennent dessus en long en large et en travers :

Force est de constater que la synergie apportée par Slam Dunk se retranscrit dans une culture japonaise déjà très riche. En 2006, 16 ans après la sortie du premier épisode, le Japon accueillait d’ailleurs déjà la Coupe du Monde de Basket. Une première compétition majeure organisée au Pays du Soleil Levant. Historique.

Mais au delà des grandes compétitions internationales, la fièvre basket se mesure dans les rues de la capitale, Tokyo. Le playground de Yoyogi Park (situé au cœur de la mégapole) est par exemple devenu un lieu incontournable de tous les ballers tokyoïtes ou non. Le parc situé au cœur de Shibuya voit s’affronter jour et nuit les meilleurs trashtalkers et autres flambeurs, que l’on apprécie tant, devant des publics souvent nombreux.

Parlons un petit peu NBA maintenant. La Grande Ligue américaine a, au fil des années, étendu son influence vers l’Asie. De grands joueurs asiatiques comme Yao Ming (Chine) ou Jeremy Lin (d’origine taïwanaise) ont pavé la voie à cet essor. Mais, aussi bizarre que cela puisse paraître, le Japon (pays qui compte 125 millions d’habitants) n’a jamais eu de tête d’affiche aussi emblématique que Yao. On compte dans la NBA actuelle deux joueurs japonais : Rui Hachimura (Lakers) et Yuta Watanabe (Wizards). Les deux joueurs sont évidemment des coqueluches pour les Nippons mais n’ont pas l’impact sportif nécessaire pour réellement faire du Japon un eldorado pour la NBA. D’autant que la NBA mise énormément sur l’Empire du Milieu, dont le marché commercial est immense, quitte parfois à céder sous la pression diplomatique du régime chinois lorsque les enjeux politiques dépassent le cadre du basket (Le Monde).

Néanmoins, la NBA n’en oublie pas le Pays du Soleil Levant et a même organisé en 1990 le premier NBA Global Game au Tokyo Dome, une rencontre opposant les Suns au Jazz. Aux côtés d’Adidas et de Nike, la Grande Ligue a également multiplié les actions en faveur du développement de la discipline. En témoigne notamment cette campagne d’Adidas en 2013 avec Derrick Rose qui envoyait des énormes 1 vs 1 contre un baller japonais. Si seulement ses genoux avaient tenu…

La marque à la virgule a par la suite emboité le pas en investissant dans des infrastructures chères aux japonais avec la création en 2020 d’un immense playground au cœur de Tokyo : L’espace “Dunk SB Plaza”.

Le championnat japonais en quête de compétitivité et de légitimité.

Nous prenons souvent comme référence la NBA, mais qu’en est-il du championnat japonais de basket ?

Championnat mineur au niveau assez loin des standards FIBA et NBA, le Japon peine à développer son championnat national.

La toute première ligue professionnelle de basket japonaise est créée en 1996 (6 ans seulement après l’apparition de Slam Dunk). Son nom : la JBL (Japan Basket Ball League). À l’époque, 2 divisions de 8 équipes sont créées et le championnat ne propose aucune descentes ni montées, ce qui influe négativement sur le niveau de compétitivité de la ligue. En 2005 la JBL devient BJ League et instaure le système de montées/descentes pour palier ce manque de compétitivité palpable dans la ligue. Deux conférences sont créees, comme en NBA : Est/Ouest. Le nombre d’équipes passe de 16 à 22 et le championnat prend un réel tournant professionnel à ce moment de son histoire.

La BJ League disparait courant 2015 pour laisser sa place à la ligue actuelle : la B-League. Un championnat découpé en 3 divisions de 46 équipes (bye bye les conférences) qui n’est pas réellement un eldorado pour retraité comme pourrait l’être le championnat chinois par exemple. Parmi les têtes connues évoluant dans le championnat japonais on retrouve par exemple ce bon vieux Kyle O’Quinn, l’intérieur aux 8 saisons NBA s’étant exilé au SeaHorse de Mikawa dans le championnat nippon.

Hormis quelques vadrouilleurs en fin de carrière, peu de nom rutilant à mettre à l’actif du championnat japonais qui peine, dans son organisation comme dans sa qualité de jeu, à attirer des joueurs de calibres supérieurs. Il faut dire que la concurrence sportive et économique autour des joueurs en fin de carrière et/ou en quête de temps de jeu pour retrouver des sensations est très rude notamment avec ses voisins chinois et taïwanais.

La Coupe du Monde, tremplin de développement ?

Le Japon pourrait profiter de ce grand événement qu’est la Coupe du Monde pour renforcer (encore) son image de terre de basket et en récolter les fruits dans quelques années. Tout d’abord d’un point de vue culturel. L’archipel jouit d’une fascination (notamment occidentale) vis-à-vis de sa culture et de ses mœurs. Le respect, la propreté et le savoir-vivre sont de vraies valeurs maison, un détail qui peut paraître anodin mais qui n’échappe pas aux touristes et visiteurs du pays qui en gardent souvent un souvenir marquant. L’occasion pendant cette compétition de marquer les esprits, aussi bien pour les spectateurs que pour les joueurs, qui pourraient envisager (en fin de carrière, ou pas) une aventure dans le championnat nippon.

La Coupe du Monde est aussi (et surtout) une source de rayonnement international. La compétition sera retransmise dans la majeure partie des pays du Monde et le Japon montre une nouvelle fois sa volonté de devenir un acteur majeur du basket international. Le Pays du Soleil Levant peut aussi espérer quelques retombées économiques qui lui permettront d’encore développer son championnat et ses infrastructures pour faire de la balle orange une des grandes passions des japonais.

Bref, au Japon le basket se développe comme il faut et à grande vitesse. Récemment, ce sont nos Français en préparation dans la capitale qui ont particulièrement apprécié les vibes nippones, de bon augure avant le début d’une Coupe du Monde qui s’annonce très solide.

Merci Tokyo 🫶🇯🇵

ありがとう東京 ! #TeamFranceBasket | #PassionnémentBleu | #FIBAWC | pic.twitter.com/JCWONPDFcT

— Équipes de France de Basket (@FRABasketball) August 21, 2023

Sources : FuransuJapon, Wave.fr, Le Monde ( Olivier Faye  et Simon Leplâtre), Clique Tv (Sébastien Abdelhamid Godelu et Mouloud Achour, Dunk Shoot Magazine, Mikie 0307, FIBA, Wikipédia.