San Antonio Spurs, le bilan 2021-22 : des jeunes qui poussent, une légende qui rayonne, et encore un Play-in qui rend dingue

Le 03 mai 2022 à 19:05 par Nicolas Vrignaud

Dejounte Murray 15 janvier 2022 San Antonio Spurs
Source : NBA League Pass

Les Spurs, passer une saison à industrialiser la défaite pour un pick de Draft ? Z’êtes malades ou quoi ? Gregg Popovich n’en a strictement rien a battre, pour lui c’est gagner ou perdre en ayant tout fait pour gagner. Cette saison, San Antonio a encore prouvé qu’avec des “rien” et des “pas grand-chose”, on pouvait embêter même les meilleurs. Développement, victoires… et peut-être dernière d’un coach légendaire ? Allez, on s’installe en mode tout confort et on se fait le bilan de la saison des San Antonio Spurs, c’est parti ! 

# Ce que TrashTalk avait annoncé

Quand on regarde l’effectif en début de saison, c’est vrai qu’il sonne plus fond de la cuvette que sommet de l’Olympe, et sans manquer de respect à Drew Eubanks, on comptait pas trop trop sur lui pour y changer grand-chose. Un groupe avec Derrick White comme menace numéro 1 en attaque, c’est comme une compil’ de chutes sur YouTube, ça commence toujours avec la meilleure volonté du monde mais ça finit à chaque fois avec les quatre fers en l’air. Rajoutez à cela des équipes particulièrement solides à l’Ouest et il devient difficile de penser à autre chose qu’une bonne régulière sentant pas spécialement la rose et des vacances en avril aux allures de libération psychologique. Un gros pick de Draft, on repart la saison prochaine avec un diamant brut à façonner, et la machine sera sur pied en moins de temps qu’il ne faut pour l’écrire. Il est temps de (re)prendre le temps à San Antonio et tout ça nous donne une projection très axée 1996-97 avec seulement 23 victoires pour 59 défaites.

# Ce qu’il s’est vraiment passé

On sait que Papy Greg’ n’est pas du genre coach U11 lors d’un plateau mini-basket à la fin du mois de mai. “Bon, aujourd’hui on va jouer mais l’important c’est de participer“. Non, Gregg Popovich est là pour gagner, du moins pour préparer des futurs gagnants. Quoi de mieux pour commencer la saison qu’un passage à tabac d’une équipe en reconstruction comme Orlando ? Ça fait du bien, mais on espère que les gars ont pris des photos du tableau d’affichage car la suite est bien moins flamboyante. Quatre victoires seulement au bout de 17 matchs, ça pique fort d’autant plus qu’historiquement c’est pas de ce pain-là qu’on se délecte dans le Sud du Texas. Il faudra quand même faire avec, puisque dans tous les cas il n’y a pas de plan B. Seulement, cette série de défaites nous aurait presque fait oublier l’âme de champion qui caractérise cette franchise et qui l’empêche presque génétiquement d’accepter le fait de perdre un match. Quatre victoires de suite s’en suivront, notamment chez les Warriors et contre Boston à la maison, deux poissons assez gros dans les filets qui nous fileraient la banane à la fin d’une journée de pêche à l’étang du coin avec les copains. Déjà, une belle chose pointe le bout de son nez et elle s’appelle Dejounte Murray. Prise de responsabilités, scoring qui semble vouloir passer un cap, le garçon joue sans pression et les moyennes font un bond. Dans le même temps, une porte semble s’entrouvrir du côté du Pacifique : les Lakers et les Blazers ne sont pas dans une forme optimale et lâchent beaucoup plus de matchs que prévu. Et s’il y avait autre chose à jouer que la voix suave d’Adam Silver en début de soirée à la fin du mois de juin ?

La superbe forme du Dejounte local fait des émules à San Antonio et d’autres profils mettent un point d’honneur à se prendre en main pour aider le groupe à gagner des matchs. Keldon Johnson, Devin Vassell, Jakob Poeltl, le trio trouve son rythme et profite des responsabilités données par un Gregg Popovich toujours aussi malin pour dynamiter leurs apports statistiques. San Antonio se complaît dans ce rôle d’équipe qui perd certes plus de matchs qu’elle n’en gagne, mais qui n’est jamais un cadeau lorsqu’il faut croiser le fer avec. Quand ça se déplace à Los Angeles, c’est pour défoncer les deux bandes de basketteurs du coin. Idem lorsque les Texans se déplacent chez les Celtics. Certains revers sont cruels, comme à Detroit au bout de la prolongation, mais c’est par ce genre d’étape que passe le façonnage d’une nouvelle machine à gagner. Derrick White quitte le navire en milieu d’hiver, contre Josh Richardson et Romeo Langford, merci à l’inspecteur pour ses travaux mais ce sont désormais les jeunes du coin qui vont mener la barque. Comme la saison avance petit à petit, le classement livre déjà ses premières conclusions et fait apparaître les équipes qui ne joueront pas grand-chose d’ici à avril. La sélection naturelle s’opère : plutôt que de lâcher de précieuses forces dans des salles qui ne visent que la fin du printemps, il est plus judicieux de se la donner chez ceux qui comptent prendre des vacances à l’heure de l’éclosion des premiers bourgeons. Et en parlant de bourgeon, Dejounte Murray est déjà plein de pétales, les fans en veulent plus. En symbole de cette floraison méritée, c’est tout logiquement qu’Adam Silver a choisi son talent pour pallier l’absence de Draymond Green lors du All-Star Game. Gregg Popovich l’appellera personnellement pour lui annoncer, provoquant l’émotion et les larmes de joie de son meneur. La story est belle pour le gamin drafté à San Antonio et le boost de motivation pour la fin de saison l’est tout autant. Sourire, Pop’ en aura bientôt lui aussi l’occasion : après avoir passé le cap des 2000 matchs à la tête des Spurs et des 1500 victoires en carrière à la tête de son équipe, le gourou le plus mystique et désormais légendaire s’accorde au détour d’un succès face au Jazz le 12 mars le record mythique de Don Nelson, à savoir 1335 victoires en saison régulière. Ce sera désormais 1336 et plus car la saison n’est pas encore finie. Ce nombre est la plus belle des récompenses pour un coach qui n’aura jamais eu la défaite comme philosophie.

Passé le moment des embrassades et de la nostalgie au regard des parcours de chacun, il faut remettre les mains dans le cambouis. Le Play-in n’est plus une hypothèse, il est désormais l’objectif. Les Blazers ont confirmé leur chute et les Lakers tentent de stopper la leur sur une pente bien trop inclinée pour eux. Les Pelicans sont aussi dans la course, le top 6 est déjà trop loin pour espérer un spot direct, alors c’est encore une fois via la nouvelle formule de la NBA qu’il faudra décrocher une place en Playoffs. Les Spurs enchaîneront huit victoires en douze matchs, mettant la pression sur la concurrence. Comme un symbole, quand LeBron et les siens se font détruire sans trop de souci par les Nuggets à Los Angeles, San Antonio va chercher un succès déterminant en altitude à Denver, scellant quasiment sa place pour le mini tournoi. Le 11 avril, les Texans compilent 34 succès pour 48 déroutes, synonyme de dixième place et donnant le droit d’aller défier les Pelicans dans les marécages de Louisiane. Partage de la balle, confiance des uns envers les autres, coach légendaire à la baguette, ça paye et S.A. s’est révélée une nouvelle fois être une équipe incapable de faire de la défaite un précepte. Le match couperet du Play-in sera perdu non pas sans se battre, mais il n’en reste pas moins que ce groupe a énormément d’avenir. Un futur brillant incarné par un Dejounte Murray à 21.1 points, 8.3 rebonds, 9.2 passes et 2 interceptions, mentionné tout au long de la saison dans la course au trophée de meilleure progression de l’année. Est-ce que cette saison sera la dernière de Pop’ chez les Éperons ? On ne le souhaite évidemment pas car la story est beaucoup trop belle pour cesser, mais la décision lui appartient. Profitons de tout ce que ce Monsieur a accompli depuis sa prise de fonction en 1996 et réjouissons-nous d’avoir pu observer ça de nos yeux.

# La saison des Spurs en quelques articles 

# L’image de la saison

Gregg Popovich

Quelle autre image que celle d’un coach ayant désormais inscrit son tempérament de gagnant dans la légende de la plus prestigieuse Ligue de basketball du monde, étreignant le joueur qui aura révélé son talent cette saison pour lui permettre de rester compétitif et d’accrocher ce glorieux record au milieu d’une multitude de trophées au-dessus de la cheminée ? Une seule saison passée à perdre en début de carrière sur le banc, et c’est depuis un concept qui a pris pas mal de poussière. Même avec un groupe pas franchement vu comme capable d’accomplir des miracles, Gregg Popovich aura réussi à développer son équipe et à qualifier sa bande pour le Play-in. Le défi était grand, car aucun réel leader n’était présent sur le papier, mais à la fin c’est toujours Gregg qui gagne. Chapeau Monsieur, c’est entièrement mérité et on espère bien avoir droit à une année de rab’ la saison prochaine, si bien sûr vous êtes partant aussi.

# Il a cartonné cette saison 

Nous appelons sur la scène le dénommé Dejounte Murray, symbole d’un renouveau et de l’avenir des Spurs. Drafté en 2016 par la franchise, il a pris le temps de découvrir la NBA, de se faire la main en G-League du côté d’Austin et d’apprendre aux côtés de cadors du jeu. Cette saison fut celle de la prise de responsabilités, et il a parfaitement assumé. Des deux côtés du terrain, on a découvert un véritable chien donnant tout ce qu’il a de forces pour aider son groupe, toujours avec une humilité et un respect du collectif propre à ce que San Antonio représente depuis maintenant 25 ans dans la Grande Ligue. Les moyennes sont plus que séduisantes à la fin, proches du triple-double et symbolisant donc toute la polyvalence et les efforts que le garçon a produits dans tous les secteurs du jeu. Vous pouvez y rajouter les deux interceptions de moyenne, s’il vous fallait une preuve supplémentaire du fait qu’il s’arrache lorsqu’il est sur le parquet. San Antonio a révélé une pépite, c’est au staff désormais de bien la polir pour en faire un leader… mais pour ça voyez vous, nous ne sommes vraiment pas très inquiets.

# La déception de la saison

Pour une saison si agréablement surprenante, peu de déceptions nous viennent spontanément en tête, hormis le fait qu’on aurait aimé voir ces Spurs jouer un peu plus longtemps au basket. C’est la deuxième fois consécutive que les hommes de Popovich se font sortir au premier match du Play-in, après la défaite face aux Grizzlies l’année dernière. À chaque fois, San Antonio a dû se déplacer, ne se facilitant pas la tâche dans un match à élimination directe. Cette saison, cela aurait pu être largement évitable car les Éperons ont lâché leurs trois derniers matchs de régulière, notamment un à la maison contre une équipe de Golden State privée de Steph Curry. Cela aurait donné l’avantage du terrain aux Texans et donc un avantage sérieux en vue d’une éventuelle qualification. Les Pelicans ont fait respecter la hiérarchie en Louisiane et ont utilisé pour cela toute la force de leur public. Pas de gravité extrême en soi là-dedans, mais une qualification en Playoffs aurait pu permettre de donner un temps d’avance au développement global du projet.

# La suite ?

Continuer à faire gagner en maturité tout ce groupe qui a été révélé cette saison. Il n’y a pas spécialement besoin d’y ajouter un gros joueur, mais peut-être un ou deux jeunes capables de prendre le bon wagon et de suivre l’élan entamé cette année par l’équipe. La victoire au sens Spurs du terme ne sera sans doute pas là pour l’année prochaine directement, alors pourquoi pas essayer de développer encore plus les individualités tout en les fondant dans le collectif pour aller chercher un tour de Playoffs comme récompense au printemps 2023 ? Que les clés du camion soient – ou pas – conservées par Gregg Popovich, il faudra prendre le temps, et surtout continuer de croire en ces jeunes pousses pleines de promesses. Il ne manque que l’expérience pour que tout ce beau monde passe un cap, et ça tombe bien car San Antonio sait exactement comment leur apporter. Si jamais Greg s’en allait, il faudrait aussi trouver un coach, mais l’école Spurs a déjà fait des petits écoliers qui sont aujourd’hui dispatchés dans toute la NBA (Ime Udoka, Mike Budenholzer, Quin Snyder, récemment James Borrego).

Quelle belle saison proposée par des Spurs que l’on n’attendait pas du tout, mais alors pas du tout à ce niveau-là. Gregg Popovich a étoffé sa légende, développant au passage des profils qui nous font dire que la NBA a encore de somptueux jours devant elle. Maintenant, avec ou sans son gourou, San Antonio doit perpétuer la tradition et faire exploser tous ces jeunes qui ne demandent qu’à franchir de nouveaux sommets. 

Source : ESPN/Poundingtherock.com