Damian Lillard, le Carmelo Anthony des meneurs : talent, argent, mais est-il un vrai franchise player ?

Le 15 juil. 2015 à 17:35 par Alexandre Martin

Ce 15 juillet 2015 est une journée spéciale pour Damian Lillard puisqu’il fête ses 25 ans. Les dirigeants des Blazers lui ont d’ailleurs offert leur cadeau un peu en avance en lui faisant signer – il y a deux semaines – un accord fort sympathique de 120 millions de dollars sur les 5 prochaines années. Cependant, après avoir soufflé ses bougies ce soir et après être allé célébrer tout ça comme il se doit, l’ami Lillard devra se poser les bonnes questions et prendre une multitude de bonnes résolutions… 

Le changement va être brutal…

S’il est désormais le boss à Portland, “Dame” doit bien comprendre que ce nouveau rôle est à double tranchant. Soyons clair, le cadeau des Blazers pourrait tout à fait être empoisonné car être le patron c’est bien mais encore faut-il être le patron d’une équipe qui ressemble à quelque chose. Et si Neil Olshey vient de faire de l’ancien de Weber State un multi-millionnaire, il vient aussi de transformer un cinq majeur qui jouait les Playoffs en un 5 qui va plutôt jouer la loterie de Draft la saison prochaine. Il faut bien réaliser que, la saison passée, le numéro 0 des Blazers rentrait sur le parquet fièrement entouré de LaMarcus Aldridge, Wes Matthews, Nicolas Batum et Robin Lopez. A partir de maintenant, Terry Stotts sera encore là pour nous gratifier de son génie tactique mais ce seront Ed Davis, Gerald Henderson, Al-Faruq Aminu et Mason Plumlee qui accompagneront le meneur au coup d’envoi de chaque lutte acharnée que la Grande Ligue. Oui, le changement va être brutal et la capacité de Lillard à se muer en leader et à tirer ses coéquipiers vers le haut va être scrutée comme jamais cela n’a été le cas lors de ses trois premières saisons.

Depuis qu’il est en NBA, Damian Lillard s’est signalé à de multiples reprises grâce à son talent offensif et à sa clutchitude digne des plus grands. Une première saison superbe et couronnée par le titre de rookie de l’année, puis un exercice 2013/2014 d’excellente facture et ponctué par un tir archi-décisif – qui restera dans les annales des Blazers (et les anales des Rockets) – ont brillamment mis sur les rails de la gloire la carrière du natif d’Oakland même si la leçon fut cinglante dans la foulée face aux Spurs de Tony Pi… Il sort d’un exercice 2014/2015 – à 21 points, 6,2 passes décisives, 4,6 rebonds et 1,2 interception – qui l’a vu augmenter ses moyennes dans quasiment tous les compartiments statistiques ce qui est très encourageant d’un point de vue individuel même si son pourcentage à 3-points a largement baissé (34,3% contre 39,4% la saison précédente). Ce qui est nettement moins encourageant c’est la façon dont Lillard se comporte par moments, la façon dont il semble aborder son rôle sur et en dehors du parquet.

Le niveau technique et la confiance ne suffiront pas !

Les aptitudes techniques et athlétiques du garçon sont absolument incontestables. Il peut driver, il peut monter au dunk sur n’importe quel intérieur, il peut shooter de loin et n’a pas peur de prendre (et réussir) les gros tirs en fin de match quand son équipe en a besoin. A lui tout seul, Lillard peut gagner des rencontres. C’est un fait mais c’est loin d’être suffisant pour être aujourd’hui considéré comme un franchise player. Cette façon qu’a eu l’ami Damian de chouiner comme une chanteuse n’ayant pas de coca zéro en loge quand il a appris sa non sélection par les coaches pour le dernier All-Star Game est plus qu’énervante, elle est inquiétante quant à la mentalité du bonhomme. Car la concurrence est tellement rude à l’Ouest sur les postes de guards que ne pas faire partie des All-Stars n’est pas du tout un affront et se faire devancer par des gars comme Stephen Curry, Russell Westbrook, James Harden, Klay Thompson, Kobe Bryant voire Chris Paul n’a rien d’incroyable ni de tellement surprenant. Pas la peine d’en faire des montagnes et de bouder dans son coin pour finalement se retrouver un peu ridicule en apprenant sa sélection suite au forfait de Blake Griffin… Pas la peine d’en faire des montagnes si c’est pour se faire démonter par CP3 (36 points et 12 passes déc’ pour Paul) peu de temps après le All-Star Break – le 4 mars dernier – et se faire sauver la mise par un excellent Aldridge et un très bon Batum.

Pas la peine d’en faire des montagnes si c’est pour ne pas assumer ce statut de All-Star par la suite et éprouver les pires difficultés à faire gagner son équipe dès qu’un autre gros joueur manque (les Blazers ont eu un bilan de 16-14 après le ASG à cause notamment des blessures de LaMarcus Aldridge puis Wes Matthews). Un All-Star doit montrer plus que ça ! Et qu’on ne vienne pas nous parler de son jeune âge pour tenter de l’excuser car, par exemple, un gars comme James Harden est à peine plus vieux et a su porter les siens tout au long de la saison et en Playoffs malgré les blessures nombreuses qui ont frappé le roster des Rockets. D’ailleurs, à propos des Playoffs, est-il utile de revenir sur les performances défensives catastrophiques du designated player des Blazers ?  Qu’il soit en difficulté face à la hargne sans limite des pitbulls qui forment les lignes arrières des Grizzlies, on peut aisément le comprendre. C’est arrivé à d’autres avant lui et cela arrivera à d’autres après lui ! Mais qu’il fasse passer Beno Udrih pour une arme offensive de première classe, ça c’est inadmissible pour un joueur de cette trempe et qui veut prétendre à de grandes choses dans les prochaines années.

Désolé Mister Lillard mais cette attitude qui fait parfois plus penser à une starlette qu’à un basketteur et cette intensité de nourrisson en défense sont fondamentalement incompatibles avec un rôle de leader en NBA. Car être un leader c’est montrer l’exemple chaque jour, chaque minute par sa régularité, son niveau de travail et sa détermination à toute épreuve. Être un leader c’est rendre tous ses coéquipiers meilleurs en les impliquant et en les responsabilisant, c’est prendre les choses en main quand ça va mal, c’est accepter les tâches moins reluisantes – comme la défense – pour le bien et l’équilibre du groupe. En effet, si talent offensif et clutchitude suffisaient à faire d’un joueur un franchise player capable d’emmener une équipe sur le toit de la NBA, un joueur comme Tracy McGrady aurait certainement fait mieux qu’un simple premier tour de Playoffs avec les Rockets et un joueur comme “Melo” ne verrait pas si régulièrement son statut de franchise player remis en question.

Si Damian Lillard ne veut pas devenir le “Carmelo Anthony des meneurs”, il doit tout de suite rectifier le tir et ne pas s’endormir sur les quelques petits lauriers qu’il a glané récemment. Il doit se faire violence et prendre conscience que le talent ne suffit pas sinon, mis à part un compte en banque copieusement rempli, il ne retirera pas grand chose de sa carrière NBA. “Dame” est-il capable de passer ce cap ? Se posera-t-il les bonnes questions ? Espérons pour la beauté du jeu et… pour les Blazers.

Source image : YouTube / Portland TrailBlazers Channel