Knicks – Pacers : la rivalité la plus intense des années 1990, une match-up aux allures de match de boxe

Le 05 mai 2024 à 09:16 par Julien Vion

Reggie Miller. 31/05/23
Source image : YouTube

Tout oppose New York Knicks et Indiana Pacers, mais les six séries de Playoffs en huit ans dans les années 1990 ont donné lieu à des moments mythiques dans une rivalité sous le signe de la castagne. Coup de tête, Choke Sign et trashtalking dans tous les sens, cap sur les nineties. 

Certains soirs, le parquet marron clair d’une arène NBA a des allures de ring de boxe. Parfois, c’est parce que l’un des joueurs perd son sang froid et laisse échapper une pulsion. D’autres fois, c’est le caractère rugueux des défenses à cheval entre la limite et le poétique. Entre 1994 et 2000, tous ces éléments sont réunis dans l’une des rivalités les plus marquantes de la fin du XXème siècle en NBA. Présentation des combattants.

Dans le coin droit du ring, les Knicks. La métropole au plus de 7 millions d’habitants est l’un des plus gros marchés des États-Unis, et compte sur sa star Patrick Ewing pour aller chercher une nouvelle bague tant convoitée. Dans le coin gauche, les Pacers. Ville d’un État vu “fermier”, l’opposition de style saute aux yeux. Un jeune Reggie Miller crève l’écran pour mettre l’Indiana sur la carte, mais la route est longue. Le combat acharné se déroule en six rounds.

Round 1 (1992-93) : les Knicks s’imposent dans une série de catch, les futurs rendez-vous sont pris

Les New York Knicks, premiers de l’est avec 60 victoires, arborent le short orange et le statut de favori. Les Pacers et leur short jaune, qui semble encore un peu trop grand, se sont qualifiés en Playoffs d’un cheveu grâce à un tie-breaker. C’est le premier face à face entre les deux franchises, et il est déséquilibré sur le papier.

Pour autant, les Knicks remportent des Game 1 et 2 très accrochés face à une équipe d’Indiana morte de faim. Dans la Conférence Est des années 1990, contacts rugueux, grosses défenses et petites échauffourées sont de mise. La série n’y fait pas exception. Avant le Game 3, John Starks commet l’erreur de refuser de serrer la main de Reggie Miller. La jeune star d’Indy, dans un grand soir, sort toute sa panoplie de trashtalking et petits coups de coudes discrets pour rentrer dans la tête de sa victime du soir.

Le sang de Starks ne fait qu’un tour, et l’arrière envoie un coup de tête à Reggie Miller. Ce dernier, tout content, sourit de toutes ses dents et applaudit à deux mains l’expulsion du New-yorkais. Les Pacers remportent le match mais s’inclinent deux jours plus tard au Game 5 décisif. Les Knicks tiennent leur rang et se qualifient, mais la rivalité s’installe dans les règles de l’art.

Make no butts about it. There was no love lost b/w John Starks and Reggie Miller. 1993 NBA Playoffs – ECQF, Game 3.

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— Adam Ryan | NBA history podcaster (@inallairness) June 15, 2020

Round 2 (1993-94) : un thriller en sept matchs pendant les finales de conférence, Reggie Miller se paie Spike Lee

L’année suivante, les équipes de la Conférence Est sautillent de joie grâce à la retraite de Michael Jordan : une place en finale NBA est peut-être accessible. Knicks et Pacers se la disputent dans une nouvelle série on ne peut plus sponsorisée par les dieux du trashtalking.

Quatre rencontres, deux victoires chacun, le Game 5 sent le souffre. New York fait la course en tête, alors que le Madison Square Garden chambre un Reggie Miller en difficulté face à la défense de son meilleur ami John Starks. Le réalisateur new-yorkais Spike Lee s’autorise même à se lever de son siège au premier rang pour trashtalker le numéro 31 adverse.

Les Knicks mènent 70-58 à l’entame du dernier quart-temps avant d’assister… à la définition pure et dure d’un “coup de chaud”. Reggie Miller entre dans la zone et colle 25 points en 12 minutes (39 au total) pour hisser les Pacers jusqu’à la victoire. Entre deux bombinettes de loin, il adresse des mots doux à Spike Lee qui ne peut qu’encaisser en observant son équipe sombrer. Le coup droit est fatal. Miller cale ses mains sur sa gorge pour mimer un étranglement : c’est la naissance du Choke Sign, apogée du trashtalking. 

Les Pacers pensent avoir fait le plus dur en remportant un Game 5 avec la manière, mais s’effondrent finalement à leur tour dans la série. Revers au Game 6, puis défaite de quatre petits points dans un Game 7 au Garden. NY exulte et file en finales NBA. La série se termine sur une faute flagrante de Reggie Miller sur John Starks, parce que c’est la tradition.

Round 3 (1994-95) : second tour et nouveau thriller, 9 secondes et same Reggie Miller

Les joueurs d’Indiana, éliminés deux années consécutives par les New-yorkais, sont plus revanchards que jamais à l’heure de retrouver leurs ennemis. Mais les Knicks font toujours la course en tête au Game 1. 18,7 secondes sur le chrono, et un 105-99 qui semble confortable… avant que la foudre ne s’abatte de nouveau sur le Garden. 

Reggie Miller envoie un trois-points, intercepte la remise en jeu, envoie une autre bombe derrière l’arc en deux microsecondes, et fait faute sur John Starks pour rester dans le coup. L’arrière des Knicks envoie un sublime 0/2 sur la ligne, Pat Ewing est en échec sur le rebond offensif, et Reggie récupère la gonfle. C’est John Starks, décidément, qui fait faute sur la star d’Indy dans la foulée. 2/2 au lancers pour Miller, 8 points en 9 secondes, Game 1 dans la poche. “Je voulais leur planter un poignard en plein cœur.” déclare-t-il ensuite. Il conforte son beau surnom de “Knicks Killer”.

La série entre une nouvelle fois dans les annales et file en sept matchs. Personne n’arrive à respirer, et les dernières secondes sont plus tendues qu’un fan des Cavs face à Jordan en 1989. Mais Patrick Ewing manque un lay-up ouvert quand il ne fallait pas, et les visiteurs s’imposent 97-95. Indy tient sa première victoire dans une série de Playoffs face au rival. 

Deux saisons s’écoulent pendant lesquelles les Pacers ont un petit coup de mou – une défaite au premier tour et une saison sans Playoffs – alors que le numéro 23 des Bulls est revenu dans sa Conférence Est pour s’occuper des Knicks. Mais la rivalité n’est pas laissée sur pause longtemps. Revoilà les combattants en piste. 

Round 4 (1997-98) : les Pacers ne font pas dans la dentelle, au bon souvenir du passé

Dans ce deuxième tour des Playoffs 1998, l’heure est à la nouveauté. Pat Riley a quitté le banc des Knicks, Larry Bird débarque sur celui d’Indy, et les Pacers ont cette fois l’avantage du terrain. Mais NY retourne à domicile sur le score de 1-1 malgré un Pat Ewing à moitié blessé.

Évidemment, qui dit retour au Garden dit moment de légende. Un 3-points de Reggie Miller (pour changer) vient refroidir la Big Apple pour arracher une prolongation inespérée. L’arrière termine la rencontre avec 38 unités et une win en prolongations, le bonjour à Spike Lee au passage. La victoire est aussi belle que les maillots légèrement rayés dans ces années-là, et Indiana règle la série en cinq matchs, non sans marquer le coup. Le short orange à un genou au sol.

on this day in 1998, @ReggieMillerTNT hit this game-tying three to force overtime against the Knicks in Game 4 of the Eastern Conference Semifinals.

he finished with 38 points in our 118-107 OT win. 💪 pic.twitter.com/4LE6oc8UEm

— Indiana Pacers (@Pacers) May 10, 2022

Front page from the 1998 Pacers-Knicks series after Reggie Miller’s game-tying 3 in front of Spike Lee: pic.twitter.com/XvfRsgqljR

— Zak Keefer (@zkeefer) May 5, 2013

Round 5 (1998-99) : des Knicks revanchards calent l’upset pour rejoindre les Finales NBA

Michael Jordan laisse de nouveau une place pour récupérer la ceinture de champion, il n’en faut pas plus pour que les deux meilleurs amis se retrouvent en finale de conférence. Les Knicks, qui n’ont pas gagné une série face aux Pacers depuis 1994, sont loin d’être favoris en tant que… huitièmes de l’est. Reggie Miller est évidemment toujours-là, mais ce bon vieux John Starks a été tradé chez les Warriors quelques mois plus tôt. Une nouvelle ère. Ou pas vraiment.

En fin de saison régulière, Jalen Rose cale un beau croche-patte à Patrick Ewing dans une rencontre qui manque de dégénérer en bagarre générale. “Dans certains matchs de boxe ça peut être l’action qui vous fait gagner” expliquent les commentateurs. Ça fait déjà plusieurs années que la métaphore est filée. Alors que les Knicks connaissent une belle histoire d’outsider, les déclas partent dans tous les sens avant le début des hostilités. Vous commencez à connaitre la chanson, 1-1 d’abord, puis round 3 décisif. Onze secondes à jouer, trois points de retard pour NY.

Larry Johnson hérite du ballon et balance une ogive du parking… qui rentre en même temps que la faute. Une action à quatre points qui scelle leur victoire, alors que tous les fans des Pacers crient au scandale. Il reste que dans la foulée, les Knicks s’imposent en 6 et deviennent les premiers huitièmes de l’histoire à rejoindre les Finales NBA. Pas de décision partagée nécessaire, Larry Bird et son groupe sont écœurés.

20 years ago today, Larry Johnson (@TheRealLJ2) gifted Knicks fans the infamous 4-Point Play to beat the Pacers in Game 3 of the 1999 Eastern Conference Finals.

The Knicks were down 3, 91-88, then LJ drilled this to put them ahead 92-91 to win the game.pic.twitter.com/km1JQIfs4K

— The Knicks Wall (@TheKnicksWall) June 5, 2019

Round 6 (1999-00) : Les Pacers avec le dernier mot, et gros bisous Patrick

L’année suivante, les Pacers ont une nouvelle opportunité de décrocher les premières Finales NBA de leur histoire. Sur le chemin… les Knicks. L’histoire ne serait pas parfaite sans un final au Madison Square Garden, quand Indy mène 3-2 dans la série.

Dès la première mi-temps, Reggie Miller et ses coéquipiers imposent leur rythme et prennent une bonne avance. Les Knicks, et leur effectif vieillissant, ne reviendront pas. Dans ce qui sera la dernière sortie de Pat Ewing au Garden, les fermiers triomphent. 34 points à 5/7 de loin pour le “Knicks Killer”. Sans rancune Patrick, et bon vent à Seattle.

“This is beautiful. I told you! Nap, we’re coming back.”

on this day in 2000, Reggie Miller dropped 34 points to lead us to a 93-80 win over the Knicks in Game 6 of the ECF to clinch a spot in the NBA Finals for the first time in franchise history. pic.twitter.com/lNZzgSSzsO

— Indiana Pacers (@Pacers) June 2, 2023

Le bilan ? Six séries en huit ans, trois victoires chacun, et un paquet de moments d’anthologie. Difficile de désigner un vainqueur, les arbitres débattent toujours. En 2013, la rivalité est remise au goût du jour quand Paul George et ses coéquipiers prennent le meilleur sur les Knicks de Carmelo Anthony.

L’affiche Knicks – Pacers reste une des rivalités les plus intenses des années 1990. Reggie Miller en tête d’affiche pour traumatiser la Big Apple, les Knicks en patron plus d’une fois, et Spike Lee toujours aux premières loges. Aucun KO, mais de beaux uppercuts. Et en 2024 ?

Source texte : Basketball Reference, ESPN, Trashtalk, Basketball Network, New York Daily New