Bob Pettit, le premier MVP de l’histoire de la NBA

Le 12 déc. 2022 à 15:32 par Enzo Lecoq

Bob Pettit 12 décembre 2020
Source Image : Youtube

L’Ailier-Fort : un poste qui évoque très souvent le nom de Tim Duncan pour les amoureux de l’efficacité, de Kevin Garnett pour les plus grands Trashtalkers, de Karl Malone pour les passionnés de gros camions, de Dirk Nowitzki pour nos buveurs de bière sûrs ou encore de Giannis Antetokounmpo pour les plus focus sur l’actu. On ne va pas se mentir, Bob Pettit n’est pas le nom qui revient le plus souvent (sauf si vous avec 80 ans), et pourtant il mérite amplement sa place parmi les plus grands joueurs de l’histoire à son poste. On parle du premier MVP de l’histoire de la NBA tout de même !

LA SUCCESS STORY DU GAMIN DE LOUISIANE

Bob Pettit, ou de son nom complet Robert E. Lee Jr, est un pur produit du Bayou de Louisiane. Born and Raised à Baton-Rouge, la capitale de l’Etat, son père est même le Sheriff de l’est de la ville lors des plus jeunes années de Bob. Passionné de sport, Robert souhaite intégrer l’équipe de basketball de son lycée, mais le physique du jeune homme, jugé trop frêle, ne lui permet pas de se faire une place dans l’équipe. Il se dit même que Pettit, une fois rejeté par l’équipe de basketball, tenta sa chance au football américain, au hockey et au baseball, mais toujours sans succès. De plus, il faut dire que le lycéen n’a jamais eu qui que ce soit pour lui apprendre à jouer et manque de qualités “intrinsèques”. En revanche, ce dont ne manque pas Bob Pettit, c’est de détermination. Il redouble d’efforts, s’entraînant dans son jardin et va même jusqu’à jouer dans le championnat paroissial (sans doute la “Chaussée aux Moines League”) pour un jour pouvoir intégrer au lycée l’équipe de basketball, son sport favori. Après deux ans d’acharnement, il est finalement accepté au sein de l’équipe du lycée de Baton-Rouge lors de sa troisième (et avant-dernière) année de high school en 1949.

Lors de ses deux années avec l’équipe lycéenne, Pettit fait état de son grand talent. Il emmènera même l’équipe de Baton-Rouge jusqu’au titre de champions de l’Etat, un exploit que n’avait pas réalisé le lycée depuis 20 ans. On tient clairement un pitch de film ici, mais la belle histoire ne s’arrête pas là : l’université voisine, la fac de LSU (Louisiana State University) repère Bob lors des derniers matchs du championnat lycéen, et approche le jeune joueur. 13 autres universités feront de même, mais Robert ne souhaite pas quitter la Louisiane et décide d’accepter l’offre de LSU. Pettit, qui lors de sa seconde année au lycée ne pointait qu’à une taille insuffisante de 5’11” (1m80), culmine désormais à 6’7″, soit autour des 2m. Cette croissance fait de Pettit un scoreur difficile à défendre, doublé d’un rebondeur hors pair. Le Bombardier de Baton-Rouge excelle à LSU, et devient le meilleur scoreur de la SEC (la SouthEastern Conference) dès sa saison freshman avec plus de 25 unités par match. Lors de sa troisième et dernière saison chez les Tigers, Pettit guide son équipe jusqu’au Final Four NCAA pour la première fois de l’histoire de LSU. Cependant, les Tigers s’inclinent dès le premier match et laissent la fac d’Indiana accéder aux Finales (eux aussi avaient des Bob, mais rien à voir avec notre joueur).

@lsubasketball: Statue of #LSU, NBA star Bob Pettit commissioned by LSU Athletics. https://t.co/ESPBpd3ogu pic.twitter.com/BqfvmFzc6G

— NBA History (@NBAHistory) December 12, 2015

À l’époque, envisager une carrière professionnelle dans le basketball n’est pas intégré dans l’imaginaire commun, même lorsqu’on a le niveau de Bob Pettit. La NBA elle-même n’avait pas du tout la notoriété qu’elle a aujourd’hui, et l’intérieur l’a avoué à l’occasion de sa nomination dans la All-NBA 75th Anniversary Team : il ne connaissait même pas toutes les équipes à l’époque où il a débuté la fac.

“Lorsque j’étais à LSU… je ne savais que très peu de choses à propos du basketball professionnel. J’avais sans doute entendu parler des Minneapolis Lakers [ancêtres des Lakers de Los Angeles, ndlr], des Boston Celtics, et peut-être un peu des New York Knicks. C’est à peu près tout.” Bob Pettit pour The Athletic.

DES DÉBUTS DANS LA GRANDE LIGUE AU PREMIER TITRE DE MVP

Pettit commence à saisir l’opportunité qui lui est offerte, et finit par s’inscrire à la Draft 1954. Il sera sélectionné par les Hawks de… Milwaukee, avec le deuxième choix. Le premier ? Frank Selvy, un swingman de l’université de Furman qui ne dépassera jamais les 20 points de moyenne en carrière. Mais l’on peut plus facilement pardonner l’erreur des Bullets de Baltimore lorsque l’on sait que Selvy venait d’instaurer le record de points sur un match de NCAA, avec 100 points (Wish Chamberlaine, en quelque sorte). Nommé Rookie de l’année en 1955, Pettit est le troisième rookie de l’histoire à enregistrer une saison à plus de 20 points de moyenne, du haut de ses 20,4 points et 13,8 rebonds. De plus, l’arrivée de Bob affecte d’ores et déjà les résultats de son équipe, qui engrange cinq succès de plus que la saison précédente, sous la houlette de Red Holzman (futur coach des Knicks champions en 1970 et 1973).

Débutant sa saison sophomore en 1955, Bob Pettit ne joue alors au basket que depuis six ans, et sa courbe de progression est grande. Véritable éponge, Bob apprend de chaque confrontation et progresse constamment, jusqu’à devenir le meilleur scoreur de la ligue dès sa deuxième saison.  Mais ce n’est pas tout : le Big Blue, surnom donné à Pettit par le commentateur des Hawks Buddy Blattner et tiré de la couleur du maillot des Hawks de l’époque, mène la Ligue au total de points (25,7), de rebonds (16,2), de tirs tentés et rentrés, et de lancers francs tentés et inscrits. Ça tombe bien, la NBA vient d’avoir une nouvelle idée : décerner un trophée récompensant le meilleur joueur de la saison régulière. Ce trophée porte le nom du président de l’époque, Maurice Podoloff, mais est plus communément appelé du nom du titre qu’il récompense : le Most Valuable Player, dit MVP. À l’époque, seuls les joueurs votent pour décerner la récompense sacrée, et le premier des lauréats n’est autre que le jeune Robert. Il devance ainsi Paul Arizin des Philadelphia Warriors et Bob Cousy des Celtics de Boston. Premier MVP de l’histoire, chapeau Bob.

The first MVP.

2x scoring champion, 2x NBA MVP, 11-time NBA All-Star and #NBA75 Anniversary Team member… Bob Pettit!

Watch more Pettit moments in 75 STORIES: BOB PETTIT here: https://t.co/8Fa1XZMEUy pic.twitter.com/MMlzlRDKFu

— NBA (@NBA) December 22, 2021

Pourtant, à l’issue de la saison, les Hawks, qui jouent désormais à St. Louis dans le Missouri, n’affichent qu’un bilan de 33 victoires pour 39 défaites, et doivent jouer un tie-breaker face aux Lakers afin de déterminer qui terminera second et premier de la Conférence Ouest. Victoire des Lakers 103-97 qui ne change pas grand-chose si ce n’est l’avantage du terrain, puisque les deux équipes se retrouvent dès le premier tour. Cette fois, ce sont les Hawks qui prennent l’avantage 2-1, malgré une énorme défaite 133-75 lors du Game 2. Les Faucons accèdent donc aux Finales de Conférence Ouest, disputées face aux Pistons de Fort Wayne (on vous l’accorde, Pistons – Hawks en Finale de l’OUEST, c’est pas courant courant). Les Pistons offriront une défense de fer et finiront par s’imposer 3-2, filant retrouver les Warriors (qui sont eux à Philadelphie, donc à l’Est, tout va bien se passer). Les Warriors de Paul Arizin, dauphin de Pettit au classement MVP, remportent le deuxième titre de leur histoire. Malheureusement pour Paupaul, pas de quoi se consoler avec un titre de MVP des Finales, puisque celui-ci n’existe pas encore.

APRÈS LA RÉCOMPENSE INDIVIDUELLE, LA QUÊTE DU TITRE

C’est donc avec l’étiquette de menace collée sur le front que Bobby Lapointe Pettit attaque sa troisième saison en NBA, et les Hawks ont désormais un objectif clair : ils ont dans leur rang le meilleur joueur de la Ligue, et visent maintenant le titre. Mais Pettit est particulièrement esseulé chez les Faucons. Seul Ed Macauley, revenu à St. Louis après six saisons à Boston (le pivot avait effectivement commencé sa carrière en 1949 chez les St. Louis Bombers, franchise disparue à l’issue de la saison 1949-50), parvient à épauler son leader. Malgré cela, Pettit permet une fois de plus aux Hawks d’améliorer leur bilan, d’une victoire seulement. Du haut de leurs 34 victoires pour 38 défaites, ils terminent la saison régulière… à la première place de l’Ouest. Au cours de cette saison 1956-57, aucune des quatre équipes référencées dans la division Ouest n’enregistre un ratio de 50% ou plus. En revanche, ils sont au nombre de trois à présenter un bilan identique, et doivent par conséquent se départager par des tie-breakers.

Cette fois, St. Louis l’emporte face aux Pistons et aux Lakers, accédant donc directement aux Finales de Division Ouest. Les Lakers s’étant défaits des Pistons lors du premier tour, ce sont eux qui affrontent Pettit et ses grands Hawks pour désigner le finaliste de l’Ouest. Elgin Baylor ne joue pas encore en NBA, et les Lakers de Minneapolis sont à l’époque emmenés par Clyde Lovellette et Vern Mikkelsen. Pas de quoi peser face à St. Louis, qui l’emporte 3-0. Et si Bob Pettit s’est une fois de plus surpassé (29 points et 13 rebonds de moyenne sur les trois matchs), il a cette fois pu compter sur un rookie qui se révèle lors de ces Playoffs : Cliff Hagan. Pour la première fois de leur histoire, les Hawks découvrent donc les Finales NBA. Face à eux, les grands Celtics, évidemment. Les hommes en vert ont alors écrasé la Ligue avec 48 victoires, et ont roulé sur les pauvres Nationals de Syracuse en Finales de Division Est.

Throwback to the 1957 NBA Finals between the Boston Celtics and the St. Louis Hawks.☘️⛹🏻‍♂️🏀 pic.twitter.com/cM2lm1ZKz7

— Hector (@Hector0_33) August 10, 2022

Mais les Hawks semblent être d’un tout autre calibre, et Bob Pettit est incandescent. Le héros du bayou offre un véritable défi physique au jeune Bill Russell, rivalisant tant au scoring qu’au rebond avec le futur joueur le plus bagué de l’histoire, et les deux équipes ne se sont toujours pas départagées au terme de six rencontres. La suite entrera à jamais dans la légende, et le dernier match de la série peut largement être vu comme l’un des plus grands Game 7 de l’histoire. Un match sensationnel, un quatrième quart conclu par un contre surhumain de Bill Russell pour envoyer les Celtics en overtime (oui, The Block existait bien avant The Block) et une deuxième prolongation remportée par les C’s sur un game-winner du rookie Tom Heinsohn. Ce dernier finit justement la rencontre à 37 points et 23 rebonds, bien accompagné par les 19 points et 32 rebonds (!!) de Bill Russell. Pettit n’est pas en reste et termine même meilleur scoreur du match avec 39 unités, doublés de 19 boards, mais c’est bien Beantown qui l’emporte et accède au titre de Champion NBA pour la première fois de son histoire.

#NBAFinals 1957 @Celtics Game 7 heroes: Rooks Tom Heinsohn/Bill Russell (combo: 56 pts & 55 reb), Arnie Risen (16 pts/10 reb) 125-123 2OT W pic.twitter.com/yMTA9cTXVX

— NBA History (@NBAHistory) May 29, 2017

Les Hawks sont sans doute frustrés, mais savent désormais que le titre est à portée de main. De plus, le sophomore Cliff Hagan vient de prouver qu’il était tout à fait capable de seconder Pettit depuis l’aile, et le frontcourt Hagan-Pettit-Macauley s’annonce létal pour quiconque s’aventurerait à St. Louis. Les Hawks enregistrent même le premier bilan positif de leur histoire pour leur neuvième saison en NBA, la troisième dans la ville du Missouri. Avec 41 victoires pour 31 défaites, ils sont une seconde fois sacrés champions de division en saison régulière, et pas besoin de tie-breaker cette fois. Ils retrouvent les Pistons en Finales de Division Ouest et prennent leur revanche : 4-1 grâce aux 31 points de moyenne de Cliff Hagan sur la série et un retour en Finales NBA face, vous l’aurez deviné, aux Celtics.

Une fois de plus Cliff Hagan est monstrueux aux côtés de Bob Pettit, et domine le début de série avec 70 pions mis sur les deux premières rencontres. Pourtant, au terme des quatre premiers affrontements, le scénario de l’année précédente se répète : 2-2, et un flou total sur l’issue de la série. Car si Bill Russell n’est plus sur le parquet, blessé lors du Game 3, le trio Cousy-Sharman-Heinsohn se surpasse pour offrir une vraie résistance aux Hawks. Cependant, l’absence de leur leader pèse sur la défense des Celtics, et ça, le bricoleur de St. Louis le sait bien. Après une victoire 102 à 100 à Boston au Game 5, victoire marquée par un énorme 33/21 de l’intérieur star, les Hawks reviennent à la maison en pleine confiance, et Pettit va signer l’un des plus grands matchs de l’histoire des Finales NBA.

“In his day, he was the best power forward there was.”- Red Auerbach on Bob Pettit (who dropped 50 points on @Celtics Game 6, 1958 Finals) pic.twitter.com/KAED9mSo9i

— NBA History (@NBAHistory) April 22, 2017

50 points et 19 rebonds. Le Bombardier de Baton Rouge est le premier joueur à passer la barre des 50 points sur un match de Playoffs sans prolongations. Et en Finales NBA ? Seuls six joueurs sont parvenus à l’imiter : Elgin Baylor en 1962 (défaite des Lakers), Rick Barry en 1967 (défaite des Warriors), Jerry West en 1969 (défaite des Lakers), Michael Jordan en 1993 (victoire des Bulls), LeBron James en 2018 (défaite des Cavaliers) et Giannis Antetokounmpo en 2021 (victoire des Bucks). Qui plus est, seul le Greek Freak a égalé le Big Blue en posant sa perf all-time au cours du dernier match de la série.

Sur la fin de rencontre, Pettit est tout simplement inarrêtable. L’ailier-fort prend ses responsabilités et inscrit 19 des 21 derniers points de son équipe, qui l’emporte 110 à 109. Les Hawks sont champions pour la première (et unique) fois de leur histoire, et Pettit devient un véritable héros. Son pivot, Ed Macauley, reste aujourd’hui encore bouche bée face à la performance de son coéquipier.

“Ce match à 50 points… je n’ai jamais rien vu de tel de toute ma vie. Bob a marqué 19 des 21 derniers points de l’équipe en étant constamment mis sous pression, avec des prises à deux voire à trois. Il a tout fait et nous a offert ce titre de champions.” Ed Macauley pour SLAM Magazine.

Ce titre est d’autant plus marquant qu’il représente l’unique échec des Celtics entre 1957 et 1966. En une décennie de domination, de règne sans partage sur la Grande Ligue, la seule bannière qu’il manque au plafond du Boston Garden est accrochée à celui de la State Farm Arena d’Atlanta désormais (où évoluent les Hawks), et la seule bague qui manque aux doigts de Bill Russell est enfilée sur celui de Bob Pettit. Le coach des Celtics Red Auerbach, connu pour son tempérament de feu (d’où le surnom “Red” entre autres) et sa rancune, dira à l’une de ces stars, Tom Heinsohn, cette phrase au terme de la dynastie Celtics :

“Si tu avais tenu Bob Pettit à 48 points, on en aurait gagné dix d’affilée.”

DEUXIÈME TITRE DE MVP ET FIN DE CARRIÈRE PRÉCOCE

En 1958-59, les Hawks dominent plus que jamais l’Ouest. Ils terminent la saison très largement premiers avec 49 victoires pour 23 défaites, soit 16 succès de plus que les Lakers, leur dauphin. À l’Est, Boston ne s’est pas laissé abattre, et va chercher une victoire de plus que ses rivaux (50-22). Meilleur scoreur de la Ligue pour la deuxième fois de sa carrière, Pettit affiche des moyennes de taille : 29,2 points et 16,4 rebonds par match, sans en louper un seul de la saison. Cette moyenne au scoring est un record pour l’époque (encore une fois pionnier) et l’accumulation des facteurs individuels et collectifs vaudra à Pettit son deuxième titre de MVP. Les coéquipiers du Massachussetts Bob Cousy et Bill Russell ayant reçu chacun une fois la distinction, c’est encore une première que réalise l’éponge de Louisiane en recevant la récompense deux fois. Pourtant, le parcours de Playoffs s’arrête dès les Finales de Division pour St. Louis, qui trébuche face aux Lakers. Lors des deux derniers matchs de la série, Elgin Baylor, alors rookie, inscrit 69 points pour permettre à Minneapolis d’accéder aux Finales (où ils seront balayés 4-0 par Boston).

Congrats to @russwest44, the first back-to-back @NBAAllStar MVP since Bob Pettit (1958, 1959) pic.twitter.com/C8YlXF8TJ9

— NBA History (@NBAHistory) February 15, 2016

Pettit et les Hawks iront en Finales deux fois de plus, en 1960 et 1961, mais s’inclinent face aux Celtics à deux reprises. La première année, St. Louis poussera même Boston en sept matchs, mais Bill Russell, au sommet de son art, ira jusqu’à capter 25 rebonds par match sur la série pour finalement permettre aux C’s de triompher. En 1962, les résultats s’écroulent malgré l’énorme production de Pettit (31,1 points par match, la première et unique saison du joueur au-dessus des 30 unités). Un vilain 29-51 empêche effectivemet les Hawks d’accéder aux Playoffs. La saison suivante, St. Louis se remet d’aplomb malgré la baisse de production de Cliff Hagan, et termine deuxième de l’Ouest qui compte maintenant 5 équipes. Mais ce sont une fois de plus les Lakers qui empêchent les Faucons de retourner en Finales NBA. Même scénario au cours de la saison 1963-64 qui voit les Warriors de Wilt Chamberlain être sacrés champions de l’Ouest pour la première fois.

La saison 1964-65 signe la fin de carrière de Bob Pettit. Blessé au genou à plusieurs reprises et craignant pour sa carrière post NBA, l’Iron Giant décide qu’il raccrochera les baskets à seulement 32 ans et après 11 saisons passées dans la Grande Ligue. La saison se solde par une élimination des Hawks au premier tour, 3-1 face aux Bullets de Baltimore (oui, eux aussi sont à l’Ouest à l’époque). Mais les raisons de la décision de Pettit sont un peu plus complexes. À l’époque, les joueurs sont loin d’encaisser les mêmes chèques qu’aujourd’hui, et un joueur NBA à la retraite ne peut pas compter sur l’argent accumulé au cours de sa carrière pour passer ses vieux jours peinard. Le joueur le sait bien. Approché par un potentiel employeur au début de la saison 1963-64, le Bombardier avait demandé à ce dernier un délai de deux ans avant de rejoindre son entreprise. Cette période arrivant à son terme, l’ailier-fort (très très fort, on peut se le dire) accepte son sort et décide d’intégrer une entreprise de bricolage. Naaan, on déconne. On aurait bien aimé, rien que pour la blague, mais c’est en tant que banquier que se relance l’ami Bob. À quelques années près, on aurait pu lui envisager une carrière dans le reggae, c’est con…

Talk about perspective: the great Bob Pettit just shared how – while making 50k/ yr in NBA – he retired b/c a good banking job was available

— Sam Amick (@sam_amick) February 3, 2015

PALMARÈS ET HÉRITAGE

Pettit prend sa retraite alors qu’il tutoie encore les sommets de La ligue, tournant toujours à 22,5 points et 12,4 rebonds de moyenne par match. Imaginez une seconde vivre à Baton Rouge, aller à la banque, et tomber sur un gaillard de 2m06 ayant claqué plus de 20 000 points en NBA. Pour certaines personnes, ce scénario absurde fut bien réel. Car oui, Bob Pettit fait partie des 50 joueurs ayant dépassé la barre des 20 000 points en carrière. Mieux, il est le premier joueur à instaurer ce record, et devient donc logiquement 1er sur la all-time scoring list au moment de sa retraite. Puisqu’on se tue à vous dire que ce mec est la définition même du mot pionnier…

En 11 saisons dans la Grande Ligue, Bob Pettit c’est : 11 apparitions au All-Star Game (l’un des cinq seuls joueurs retraités à y avoir été chaque saison, avec Paul Arizin, Jerry West, Julius Erving et Yao Ming) avec 4 titres de MVP du match des étoiles (un record partagé avec Kobe Bryant), 11 sélections en All-NBA Team dont 10 dans la All-NBA First Team (un record dépassé seulement par Karl Malone, Kobe Bryant et LeBron James), 11 ans à évoluer uniquement sous le maillot des Hawks, mais jamais à Atlanta (où la franchise déménage trois ans après sa retraite), 11 saisons parmi le top 5 des rebondeurs de La ligue, et 10 parmi le top 5 des scoreurs… le palmarès est gargantuesque, surtout en comparaison au temps passé sur les parquets et à la fame dont dispose l’ancien poste 4 aujourd’hui.

Pourtant, du haut de ses 26,4 points et 16,2 rebonds de moyenne en carrière (oui, en CARRIÈRE), Pettit occupe aujourd’hui encore la huitième place all-time en points par match (devancé par Elgin Baylor, Wilt Chamberlain, Jerry West, Michael Jordan, LeBron James, Kevin Durant et Allen Iverson) et la 3e place aux rebonds, derrière messieurs Wilt Chamberlain et Bill Russell. Avec seulement 792 matchs en carrière, il occupe pourtant la 41e position sur la all-Time scoring list, la première chez les joueurs totalisant moins de 800 rencontres.

Happy Birthday, @Hoophall Bob Pettit (85) Pettit never finished below seventh among the league scoring leaders in any of his 10 full seasons. He ranks as the greatest rebounder in Hawks history (12,849 boards). During his career, Pettit averaged 16.2 rebounds and 26.4 points. pic.twitter.com/yuaUsheA5p

— NBA History (@NBAHistory) December 12, 2017

Ce qui restera de ce grand joueur qu’était Bob Pettit, c’est définitivement cette notion de pionnier. Non seulement pour son MVP en 1956, pour son titre avec les Hawks en 1958, pour son record de 20 000 points, mais aussi pour sa façon d’aborder le jeu. Son surnom de Bombardier ne vient pas de nulle part : chez les intérieurs, il est effectivement l’un des tout premiers shooteurs de l’histoire. En 1971, seulement six ans après sa retraite, Bob Pettit devient également aux côtés de Bob Cousy l’un des six premiers joueurs NBA à intégrer le Basketball Hall of Fame. Chapeau aux deux artistes, qui ne viennent pourtant pas de l’Indiana (elle est technique celle-là).

ARCHIVE 75: Bob Pettit

Go through the legacy of the 75th Anniversary Team’s Bob Pettit!

Read Here: https://t.co/9YTbbOhG3G pic.twitter.com/IeXKUHg97f

— NBA (@NBA) December 22, 2021

Tout au long de sa carrière, Pettit aura également été reconnu et apprécié par ses pairs. Pour son talent, d’une part, mais également pour son comportement sur et hors du terrain. Dans les années 50 et 60, à l’heure où les franchises NBA ne comptaient jamais plus d’un ou deux joueurs afro-américains, espérer devenir – et rester – professionnel en tant que basketteur noir pouvait représenter un cauchemar. En particulier à St. Louis, ville à l’histoire chargée de ségrégationnisme dont l’équipe conservait un code couleur pour le moins uni. Mais la légende des Hawks n’était visiblement pas du genre à rabaisser ses coéquipiers de couleur. Lenny Wilkens, qui a partagé le maillot des Hawks avec le concerné de 1960 à la retraite de Bob en 1965, témoigne :

“J’ai adoré jouer avec lui, et j’ai eu la chance d’apprendre à le connaître un peu. À cette époque, il n’y avait pas tellement d’Afro-américains dans une équipe, et ce dans toutes les équipes NBA. Et les gars [les joueurs blancs, ndlr] n’étaient vraiment… pas amicaux. Mais Bob, lui, était un gentleman.” Lenny Wilkens pour The Athletic

Comme rapporté dans un article de l’historien du basketball Dan Klores pour Andscape, si Pettit est devenu entraîneur joueur par intérim au moment du renvoi de son coach Paul Seymour, c’est parce que ce dernier aurait refusé au propriétaire des Hawks, Ben Kerner, de bencher Cleo Hill, rookie prometteur mais surtout seul joueur noir de l’équipe aux côtés de Lenny Wilkens. Or, si le fondateur des Tri Cities Blackhawks avait ordonné à son coach de mettre le jeune joueur sur le banc, cette demande serait en réalité venue des vétérans de l’équipe, en particulier de Clyde Lovellette et Cliff Hagan. Cet évènement mit un terme à la carrière de Hill qui passa la saison sur le banc, n’inscrivant que 5,5 points par match avant d’être coupé. Le silence ou la porte, voilà la réalité de beaucoup de joueurs afro-américains à cette époque. Mais si Pettit est tenu en si haute estime par Wilkens, coach de légende en NBA et figure de lutte contre les discriminations raciales, on peut facilement admettre que Bob était, comme le dit si bien son coéquipier, un gentleman de son époque.

Aujourd’hui encore, à maintenant 90 ans, Bob Pettit reste un fervent supporter des Hawks, dont il ne manque les matchs que rarement, bien que ne vivant même pas en Géorgie. La légende confie s’être déplacé pour la majorité des Finales de Conférence Est entre les faucons et les Bucks en 2021, et prend apparemment toujours autant plaisir à admirer les joueurs de NBA, avec une légère préférence avouée pour l’ami Kevin Durant. Oui, Bob Pettit est un Grand parmi les Grands de cette Ligue, alors tachez de ne pas l’oublier dans vos prochains top 100 All Time… 

Sources : The AthleticLouisiana Sports Hall of FameBasketballReferenceSLAM Online, StatMuse, Land Of Basketball, SportyTellEncyclopediaNBA.comBasketball NetworkAndScapeHood.edu