Troll-Star Game : jusqu’où peut aller le manque d’implication des joueurs ?

Le 14 févr. 2016 à 16:25 par David Carroz

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Alors que le All-Star Game pointe le bout de son nez, l’enthousiasme n’est pas de la partie. Oui, je suis un esprit chagrin qui ne supporte plus le manque d’implication des joueurs et les scores fleuves sans aucun investissement défensif. Si je ne remets pas en cause le niveau et le spectacle proposés – quoique pour le dernier… – je me désespère de ce que je vois depuis quelques saisons.

Il fût un temps où l’approche du All-Star Game levait chez moi une immense excitation. La proximité du moment où les meilleurs joueurs de la Ligue allaient s’affronter dans une rencontre spectaculaire était synonyme de fête, un peu comme un gosse qui attend le passage du Père Noël pour ouvrir ses cadeaux. Mais à l’image du gamin qui ne croit plus au gros barbu alors qu’il grandit, mon appétit pour le match des étoiles s’est tari. Bien entendu, cette coupure reste l’occasion de passer un moment sympa avec des potes pour parler basket – plutôt que d’en voir, soyons honnêtes – mais la magie n’opère plus. D’où me vient ce changement d’état d’esprit ? Est-ce l’âge ? La nostalgie d’une période passée de la NBA, en mode vieux con ? Une certaine forme de lassitude ?

La lassitude oui, c’est ce qui me semble le plus approprié. Pas de regarder du basket, mais celui de devoir assister année après année depuis quelques temps à une parodie. Je ne sais plus trop quand le All-Star a basculé – dans la réalité ou mon esprit – dans cet excès de highlights, de spectacle pour le spectacle, d’oubli de la nature même d’un match de basket. Mais ce dont je me souviens très bien, c’est que l’an dernier, je n’ai pas pris de plaisir devant le carton offensif de Russell Westbrook titillant le record de Wilt Chamberlain. “Quel vieux con”, m’a-t-on fait comprendre lorsque je me plaignais d’une manque d’intensité et d’implication défensive des uns et des autres. “Le All-Star Game est un match de gala, on n’a jamais vu de défense.”

Faux. On n’a certes jamais vu un duel digne de Memphis-Chicago des dernières saisons qui se termine à 80-85 après deux prolongations, mais ce n’est pas ce que j’espère voir non plus. N’allez pas croire que le spectacle me file de l’urticaire et que je débecte une belle action, préférant voir un système offensif mis en place par Tom Thibodeau et se terminant par une brique de D.J. Augustin après avoir vu Joakim Noah porter la balle durant 20 secondes. Sauf qu’entre des plots présents sur le parquet en spectateur et des bouchers façon Bad Boys ou Knicks des années quatre-vingt-dix, il y a un juste milieu. Espérer un peu d’envie et d’intensité, c’est trop demander ? Ne pas laisser son joueur aller au panier en prenant une photo de son action, c’est impossible à voir ? Bientôt les mecs posteront sur Instagram les plus beaux clichés jamais pris car ils seront sur le poster. Ah ben non en fait, il faudrait défendre pour être sur l’image, au temps pour moi.

Il suffit de se pencher ne serait-ce que cinq minutes sur les chiffres pour se rendre dompte qu’il y a une vingtaine d’année, plus d’efforts étaient fournis défensivement. Et sans que cela nuise à la qualité du spectacle. Sur la décennie de 1990 à 1998 (à cause du lock-out, il n’y a pas eu de All-Star Game en 1999), les sélections scoraient en moyenne 125 points. Autant dire que ça y allait quand même déjà sérieusement. Depuis 2010, jamais une équipe n’a encaissé moins de 138 pions. Alors je veux bien qu’on ait quelques monstres du scoring en activité, mais je ne pense pas que vingt ans plus tôt les mecs qui participaient au match des étoiles étaient des tanches en attaque. Et pourtant, à une seule reprise une sélection a dépassé les 150 points (en 1992, pour le retour de Magic Johnson) dans les nineties alors que la moyenne entre 2010 et aujourd’hui est de 149,3…

Vous voulez voir des points, et bien vous allez être servis. Pourquoi ne pas organiser un HORSE géant finalement entre tous les meilleurs joueurs de la Ligue, puisque c’est à ça que se résume le match maintenant si on caricature un peu. L’an dernier, la rencontre a même atteint son paroxysme en terme d’opération portes ouvertes et d’échange d’amabilité. Les mecs s’en tapaient tellement en défense que les deux équipes ont cumulé un total de 9 fautes et 15 lancers-francs. Même dans cette décennie 2010, ces stats sont ridicules puisque la moyenne est de 32 lancers pour un peu plus de 23 fautes. Alors bon, je veux bien qu’on parle de spectacle, de jeu offensif, de match de gala, mais là on frôle la blague. Mais il parait que c’est ce que le grand public, ce consommateur de Top 10, veut voir. Alors qu’il y a tellement plus à apprécier. Plus de subtilité.

Au final, ce match est à l’image des concours, un bon gros troll avec de temps en temps un frisson. Allez, pour les événements qui précèdent, le long distance shootout relève le niveau avec des vraies stars qui se tirent la bourre. Mais quand on voit qu’à l’inverse on balance des intérieurs – aussi doués soient-ils – au Skills Challenge, je crois que la messe est dite, Adam Silver se fout juste de notre gueule et il attend de voir jusqu’où la plaisanterie peut durer. Il a bien failli se retrouver piégé à son propre jeu avec un Zaza Pachulia pas loin d’être élu dans le cinq majeur de l’Ouest, mais nous ne sommes pas encore assez costauds pour rivaliser avec lui.

Il faut se rendre à l’évidence, cette orgie offensive demeure néanmoins une excellente pub pour la NBA, bien plus qu’une belle rotation défensive, une prise à deux réussie ou un passage en force provoqué, en tout cas auprès du grand public. Et comme, même si je suis un vieux con bien grincheux, je ne voudrais pas priver les autres de leur plaisir, je vais faire comme les joueurs sélectionnés : prendre ce match comme des vacances. En me couchant et en grommelant que putain, c’était quand même mieux avant.

Source image : Sole Collector et NBA