Avis aux haters : Joakim Noah a marqué l’histoire des Bulls, mais aussi de Chicago

Le 19 janv. 2016 à 16:16 par David Carroz

Voilà, le verdict est tombé. Joakim Noah voit donc sa saison se terminer dès le mois de janvier. Agent-libre cet été, c’est peut-être même son histoire avec les Bulls qui touche à sa fin. Cette horrible défaite face aux Mavs, son dernier match en tant que Taureau. Ses hurlements lors de sa course le bras ballant pour rejoindre les vestiaires, l’ultime image qu’on aura de lui sous l’uniforme chicagoan. Pourtant, ce n’est pas celle-ci que je retiendrai.

N’en déplaise aux grands moralisateurs patriotiques ou autres haters en tout genre, Joakim Noah mérite mieux que cela. Mieux que cette sortie difficile, mieux que toutes les critiques minables qui lui sont adressées. Oui “Jooks” n’était pas amoureux du drapeau français. Un crime horrible pour un mec qui a si peu vécu dans l’Hexagone et dont la culture métissée a trouvé son cadre d’expression au pays de l’Oncle Sam. Bien entendu, il a une grande gueule. Mais quand on écrit pour TrashTalk, on ne va pas commencer à se plaindre quand un mec laisse de côté les discours aseptisés et sans relief pour dire ce qu’il pense. Si certains veulent le détester pour cela, libre à eux, je n’ai pas le monopole de la pensée et chacun ses goûts, ses affinités avec les caractères renvoyés par les joueurs. Mais quand je vois un tel manque de respect pour ce qu’il a accompli en tant que joueur des Bulls et citoyen de Chicago, je me demande si la haine peut rendre à ce point aveugle.

Si vous êtes dans la catégorie des personnes qui sont dans cette optique, vous pouvez arrêter votre lecture ici. Tout ce qui suivra ne vous paraitra qu’inutile, simple cri du coeur de la part d’un fan de Joakim Noah qui veut remercier un mec qui l’a fait rêver, malgré ses défauts et ses excès. Ce sont eux d’ailleurs qui font sa force et son charisme et l’attachement que je lui voue. Vous pensez que je me fais l’avocat du diable ? Libre à vous, je l’assume pleinement, surtout que je ne cherche même pas à justifier ses choix qui vous paraissent tellement critiquables, juste à rappeler pourquoi, pour certains, il est un joueur admirable qui a marqué l’histoire des Bulls.

Bien entendu, hors de question de le placer au niveau des plus grands de la franchise, les glorieux ainés tels Jordan, Pippen ou Phil Jackson, voire Bob Love et Jerry Sloan si on remonte encore plus loin. Mais le chapitre qu’il a écrit dans l’Illinois restera l’un des plus beaux, des plus forts émotionnellement que la Windy City ait connus. Tout n’a pas été rose. Il faut dire qu’en voyant débarquer un mec avec le look d’un clown à Chi-town le soir de la Draft 2007, les sceptiques étaient nombreux. Surtout qu’en plus de sa dégaine improbable, le mec propose un jump-shot dégueulasse et un style de jeu peu conventionnel. Sans oublier son franc-parler qui fera chier le vestiaire à ses débuts puisqu’il verra une suspension infligée par sa franchise alourdie par ses propres coéquipiers. Autant dire que ce n’était pas gagné pour lui de s’imposer comme une figure marquante du sport chicagoan. Mais en 2009, les fans du United Center commencent à avoir un aperçu du phénomène qui posera les bases d’une relation intense entre le public et le joueur, avec comme fondation son interception sur Paul Pierce lors de la troisième overtime du Game 6 d’une série légendaire face aux Celtics. Les prémisses d’un groupe qui vivra ses plus belles heures les années suivantes sous les ordres de Tom Thibodeau. Les premiers frissons offerts par Jooks.

Joakim Noah devient le symbole de cette équipe. Certes, il est loin d’en être le joueur le plus doué, mais son énergie, son engagement total et son refus de baisser les yeux devant les adversaires font rapidement de lui l‘âme des Bulls. Mais aussi leur coeur et leurs tripes. Les couilles même quand il n’hésite pas à remettre un LeBron James trop chambreur à sa place, quitte à en subir aujourd’hui encore les foudres. Ou alors quand il réclame à Kevin Garnett de venir se frotter à lui plutôt que de faire le mariole avec des mecs moins costauds. Ce comportement agace forcément les adversaires, mais il soude encore plus le groupe et la ville autour de Jooks. Il porte la fierté de Chicago. Soir après soir, c’est pour Windy City qu’il sue. Et quand il n’est pas sur les parquets, c’est toujours pour elle qu’il donne le maximum avec sa fondation “Noah’s Arc Foundation” ou encore en luttant contre les violences dans les quartiers. Un modèle pour la communauté, à défaut de toujours l’être sur les parquets.

Drop of Consciousness short film from Ola Kudu on Vimeo.

Nous voulons juste représenter. Nous savons que c’est une ville où quand je viens au match, je vois le gars qui vend des journaux dans la rue. Il fait froid dehors. Quand il me voit passer vers lui il est excité. Du genre “Ok, allez les Bulls ! Faites le taf ce soir !” J’ai le sentiment de jouer pour ce gars. Comme lorsque je regarde en haut de l’arène quand l’équipe demande un temps mort et que je vois le gars qui qui a l’air si petit d’ici et il encourage, il saute ; c’est le gars pour qui je joue. Pour moi, c’est ça que cette ville représente. Il y a beaucoup d’adversité ici, beaucoup d’adversité dans cette ville, et quand je joue au basket je veux que les gens soient fiers de leur équipe.

Cette équipe a connu beaucoup de coups durs durant ces années. Mais les gens savent quand ils viennent pour jouer à Chicago que peu importe s’il n’y a que quatre mecs sur le parquet, on jouera et on jouera dur. On va donner tout ce qu’on a. Et je pense que c’est quelque chose dont les gens sont fiers quand vous dites “Chicago Bulls.” Quoi que ce soit, vous êtes là pour vous battre. Je suis fier de faire partie de cela. – Joakim Noah.

Dévoué pour Chicago, dévoué pour les Bulls, il a en effet tout donné sous le règne de Thibodeau, abimant son corps qu’il mettait à rude épreuve, faisant passer sa franchise et ses coéquipiers avant tout, élevant son niveau de jeu jusqu’à une hauteur que personne ne soupçonnait. Ruminant le départ de son frère d’arme Luol Deng ou refusant les chants de “MVP” que le public lui adressait car ils devaient être réservés à Derrick Rose selon lui. Une simple opération de com ? Non, la philosophie d’un mec qui sait que sans ses “frangins”, il n’est rien. Dans ces galères pour l’équipe, il atteint le sommet de sa carrière. Pour la ville. Des matchs épiques, comme ce Game 7 face à Brooklyn ou cette victoire lors du Game 1 à Miami alors que le Heat déroulait pour aller chercher le titre. Une marque indélébile, moins flashy que d’autres, mais tellement plus fidèle à l’esprit chicagoan.

Tout ça est malheureusement trop vite balayé d’un simple revers de la main de notre côté de l’Atlantique, où le refus de porter le maillot Bleus et une grande bouche effacent toutes les autres bonnes actions. Dur ou justifié, chacun se fera son opinion mais le constat objectif doit rester le même : en dehors de Tony Parker, quel autre Français a marqué l’histoire d’une franchise au même point que Joakim Noah ? Aucun. Quel autre Français aura personnifié avec la même ferveur l’âme d’une équipe ? Aucun. Quel autre Français laissera une telle fierté à la ville qui l’a accueilli, de part son dévouement sur le parquet et ses actions en dehors ? Toujours la même réponse. Mais ça n’empêchera pas certains d’annoncer qu’ils se réjouissent de sa blessure sans trembler du menton. C’est beau de critiquer une mentalité quand soit même on en a une aussi classe.

Alors oui, les temps étaient plus durs ces derniers mois mais Joakim Noah n’a jamais cessé de tout donner. Pour cette dévotion, merci. Pour toutes ces émotions partagées, ces cris poussés, cette hargne transmise, et bien plus encore, merci. Le mot est simple, mais aucun autre ne me vient à l’esprit pour résumer ma pensée. Et si certains détestent l’image qu’il transmet, on s’en fout. Je m’en fous. Moi je t’aime pour ça.

Source image : lasportsanostra.com


Tags : Joakim Noah

Dans cet article