La gestion du cas DeRozan par les Raptors ne passe pas chez les joueurs : ils n’ont toujours pas compris le système ?

Le 19 juil. 2018 à 17:26 par Fabien Passard

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Certains joueurs NBA, proches ou non de DeMar DeRozan, ont vivement critiqué la gestion des Raptors qui n’avaient, selon les dires du joueur, aucunement prévenu celui-ci de son départ probable, alors que les deux parties s’étaient rencontrées à Las Vegas durant la Summer League. Malheureusement, il va bien falloir s’habituer à l’évolution de la NBA… now it’s business first.

Alors que tous les yeux étaient rivés vers Cleveland où les Cavaliers venaient de couper leur franchise vigile Kendrick Perkins, les joueurs NBA sont malgré tout restés attentifs aux autres mouvements de la ligue et notamment à celui monté entre Raptors et Spurs. S’ils se sont montrés silencieux sur le sort réservé à Kawhi Leonard, la brutale fin de l’histoire entre DeMar DeRozan et SA franchise en a surpris plus d’un, et passablement énervé certains, qui ont eu la critique vive envers les Canadiens. Les oreilles de Masai Ujiri doivent siffler.

I’m hurt bro. I’m hurt. My dog gave that city and organization his heart and soul. He was loyal to the soil and got stabbed in the back.

— Lou Williams (@TeamLou23) July 18, 2018

Lou Williams, sixième homme de l’année, est un ancien coéquipier de DeMar DeRozan, avec qui il a joué en 2014-15 sous le maillot rouge. Il a enchaîné les réactions de dépit suite à l’annonce de ce trade hier, annonçant notamment que DD avait prévu de terminer sa carrière à Toronto. Dur. Ici, il répond à un fan lui demandant l’exprimer le fond de sa pensée : “Je suis blessé mec. Je suis blessé. Mon frère a donné son cœur et son âme à cette ville et à cette franchise. Il était loyal envers sa terre et a été poignardé dans le dos.” C’est sûr qu’après neuf ans de bons et loyaux services, on s’imagine sans doute pas viré comme un malpropre, avec un pauvre GIF de CP posté sur Twitter accompagné d’un timide : “Merci pour tout, DeMar” en guise d’humiliation suprême. D’autant plus que le reporter Chris Haynes, d’ESPN, a affirmé que DMDR avait rencontré des officiels de Toronto en marge de la SL, à Vegas, qui ne lui avaient en aucun cas confié qu’un trade était n’était ne serait-ce qu’envisagé pour lui. Chaud.

Thank you for everything, DeMar pic.twitter.com/nMkhAeH1He

— Toronto Raptors (@Raptors) July 18, 2018

Si la version sale qui se dessine sous nos yeux aujourd’hui se confirme, ce serait en effet un très mauvais signal envoyé. Dans une ligue où l’attachement à l’équipe, à l’effort de long terme, aux rivalités est de plus en plus désuet, virer salement l’une des rares stars encore attachée viscéralement à sa franchise et qui lui a toujours donné le maximum serait moche. L’arrière des Raptors n’a a que très rarement loupé plus de cinq matchs de régulière dans une saison et affiche des moyennes en plus de 20-4-4 depuis cinq ans. Si l’impact trop faible en Playoffs du All-Star ne plaide pas pour son cas, une discussion, au moins, n’aurait pas été de trop entre Masai Ujiri et son franchise player. Cependant, ce serait trop simpliste et inutile de se borner à blâmer les choix managériaux de moins en moins sentimentaux de la part de la direction des franchises, Raptors en tête. On sait que le business régit la Grande Ligue, et que là où il y a de l’argent, le cœur doit se faire tout petit. Les joueurs sont évalués presque mécaniquement par leur staff, un peu comme des joueurs 2K, qu’on ne juge que sur leur moyenne générale et leur état de forme estimé au vu du CV. On a tous nos exemples en tête. Quel intérêt de regarder les liens que tel joueur a créé avec les fans, l’entente dans l’équipe ? Perdre du temps à expliquer son choix aux joueurs ? On n’y avait même pas pensé, on ne discute qu’avec son agent. Bien sûr que tout ce qu’on dit là ce n’est pas nouveau, mais c’est un fait, l’argent prend de plus en plus de place en NBA, et plus les sommes mises en jeu sont importantes plus les décisions prises sont orientées par une vision mécanique. On peut passer pour des connards pendant quelques temps, pas grave, tant que ça sert les intérêts de la franchise, et que l’argent circule. Isaiah Thomas l’a appris à ses dépens en août dernier, transféré dans la franchise concurrente des Celtics à l’Est, les Cavaliers de LeBron, qui cherchaient une nouvelle famille pour adopter leur fiston voulant s’envoler du nid, Kyrie Irving. Un vrai choc à l’époque pour le lutin vert, à qui l’esprit des C’s collait à la peau et qui était admiré par bon nombre de fans pour le côté dramatique de son histoire : mort de sa sœur au début des PO, retour sur le parquet quelques jours après en jouant comme un Dieu et privé des finales de conf’ à cause de sa foutue hanche).

Just learn from my story! Loyalty is just a word in this game SMH

— Isaiah Thomas (@isaiahthomas) July 18, 2018

Si vous avez du mal à vous faire à cette nouvelle donne, dites vous que les joueurs bouillonnent également. Anthony Morrow, Damian Lillard ou encore Enes Kanter y sont aussi allés de leurs piques respectives, plus ou moins véhémentes, lancées aux Raptors. Mais c’est aussi la contrepartie des salaires toujours plus monstrueux pouvant leur être accordés chaque année. Plus il y aura d’argent dans cette ligue, plus les choix seront dictés par celui-ci. Ne jouons pas les étonnés à chaque fois.

Doit-on s’attendre à voir les choses évoluer dans un autre sens dans les années qui viennent ? Sans doute que non. Il s’agirait de s’y faire pour nous, les fans, et de devenir bandwagonner comme tout le monde. Il s’agirait de s’y faire pour eux, les joueurs, et de devenir ring chaser comme tout le monde.

Sources texte : ESPN, NBC Sports