Travail, exigence, patience : malgré une fin brutale, Jason Kidd a mis les Bucks sur la voie du succès

Le 31 mars 2018 à 12:42 par Leo Stahly

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Jason Kidd a appris ce week-end qu’il allait être intronisé au Hall of Fame, preuve de son empreinte laissée sur notre sport chéri. L’intelligence de jeu, la bague acquise avec les Mavericks en 2011, les triple-doubles, la carrière du meneur est unique et fait de J-Kidd l’un des meilleurs joueurs de l’Histoire à son poste. Sa hargne et sa force de travail, il tente de l’inculquer en tant qu’entraîneur depuis 2013, d’abord avec les Nets puis à Milwaukee. Pour Bleacher Report, il est revenu sur son expérience aux Bucks, les raisons de son éviction, sa relation avec les joueurs, ses prouesses mais aussi ses échecs.

Comme d’autres avant lui, Jason Kidd s’est laissé tenter par l’expérience d’entraîneur après avoir mis un terme à sa carrière de joueur. Lorsqu’on a consacré dix, quinze voire vingt ans de sa vie au basket, il est difficile de s’en détacher et inévitablement, l’envie de rester impliqué dans son sport se fait sentir. Un paquet de grands joueurs sont devenus coachs par la suite, mais dominer en tant que joueur ne garantit pas d’être un bon entraîneur. Les deux années de Magic Johnson à la tête des Lakers au milieu des années 1990 en sont la preuve. S’il ne peut pas être rangé au même niveau que Magic dans cette catégorie-là, Jason Kidd est loin d’avoir offert des garanties solides à la tête d’une équipe. En quatre ans d’expérience et deux franchises, J-Kidd a même un bilan négatif avec 183 victoires pour 190 défaites. Par trois fois il a amené son équipe en Playoffs (une fois avec les Nets, deux avec les Bucks) et son meilleur résultat reste une demie-finale de Conférence avec Brooklyn en 2014. Son CV n’a rien d’extravagant et il est sans équipe depuis le 22 janvier dernier, jour où les dirigeants de Milwaukee l’ont remercié. Le bilan de 26 victoires pour 22 défaites était insuffisant compte tenu du potentiel de l’équipe et il a coûté sa place à Jason Kidd. À première vue. Pour Bleacher Report, l’ancien coach des Bucks est entré en détails sur sa philosophie de coaching, sa gestion du groupe et les messages qu’il voulait faire passer. Ce qu’il souhaitait instaurer par-dessus, c’était la culture du travail.

“Pour apprendre à gagner, la douleur est un passage obligatoire. J’ai dit ça aux joueurs en leur montrant la plaque de métal sur ma hanche. Il faut donner une partie de soi à ce sport si tu veux faire partie des meilleurs. L’argent, la gloire et tout le reste c’est super. Mais pour gagner, il faut souffrir. Si j’ai été dur avec eux ? Je les faisais travailler. Il n’y a rien de mal à bosser. Si tu veux faire partie de l’élite, il faut travailler. Si ton objectif est d’être un joueur correct en revanche, tu n’en as pas besoin.”

Dans le cercle des entraîneurs, Jason Kidd s’est fait une réputation grâce à son exigence. Il en demande beaucoup à ses joueurs pour en tirer le meilleur et n’hésite pas à les faire travailler le plus possible. Presqu’aucun entraîneur n’organiserait un entraînement en sortie de back-to-back ou quelques heures avant Noël. Jason Kidd, lui, l’a fait. L’entraîneur était dur avec son groupe parce qu’il considère que c’est dans l’effort et la douleur que se forgent les champions. D’autant plus qu’il avait à disposition un groupe bourré de talents et qui est attendu au sommet de la Conférence Est d’ici quelques années. Giannis Antetokounmpo est un franchise player en puissance et a tout d’un futur MVP, Khris Middleton brille par sa polyvalence, Jabari Parker a déjà montré qu’il pouvait dominer grâce à son physique ultra-athlétique et ce malgré les blessures, Malcolm Brogdon a été élu rookie de l’année en 2017. Diriger un projet aussi jeune et prometteur est un challenge excitant et nombreux sont les entraîneurs qui aimeraient être en charge d’une telle équipe. La jeunesse est vraiment ce qui caractérise les Bucks, au niveau des joueurs comme du staff. Le GM actuel des Bucks, Jon Horst, a 34 ans, soit onze ans de moins de moins que Jason Kidd. Mais la jeunesse n’a pas que des bons côtés et selon Jason Kidd, il s’est heurté aux faiblesses de celle-ci. À savoir l’instabilité et l’impatience.

J.K. : “Peut-être que je n’ai pas tout expliqué. Mais les propriétaires de la franchise sont jeunes donc ils vont faire des erreurs. Ils finissent leur première saison avec 41 victoires [en 2014-15, ndlr] donc qu’est ce qu’ils attendent ensuite ?

Bleacher Report : “Une progression continue.”

J.K : “Mais ça ne fonctionne pas comme ça. Le plan initial a été brisé dès lors qu’on a bouclé cette saison à 41 victoires. Après ça, tout le monde s’est dit ‘c’est ce qu’on doit faire tous les ans’. Mais personne n’a jamais réalisé cela avant à part le coach. Et l’entraîneur a dit ‘On a encore du chemin à parcourir.’ Mais personne n’a écouté.”

La saison dont parle Kidd était sa première à la tête des Bucks qui, à la surprise générale, ont fini la saison régulière à la sixième place en 2015. L’année était prometteuse et les dirigeants ont donc placé la barre haute pour les saisons à venir. Sauf que la saison suivante, les Bucks échouent à se qualifier en Playoffs et cette année, les Bucks sont inconstants et incapables d’enchaîner les victoires alors que la franchise visait le top 4 à l’Est. Les résultats n’ont pas suivi les ambitions, et ça, Jason Kidd l’a sûrement payé. Il a pourtant tout mis en oeuvre pour faire progresser son groupe en appliquant un management rude pour les joueurs. Mais ça aussi, il en a fait les frais. De ses trois années à Milwaukee, il restera son engagement. Il n’y a qu’à voir la déception de Giannis lors de l’éviction de Kidd pour le comprendre : il s’engageait pleinement dans tout ce qu’il entreprenait. Il donnait tout pour ses joueurs, il leur souhaitait le meilleur et c’est pourquoi il était dur avec eux. Alors peut-être qu’il souriait rarement, qu’il n’était pas très chaleureux mais son implication était totale pour des Bucks qu’il aura su mettre sur les voies menant au sommet.

Un entraîneur est jugé sur ses résultats, c’est immanquable. Les dirigeants le choisissent pour qu’il rapporte des victoires à l’équipe et si les résultats ne suivent pas, l’entraîneur n’a plus de légitimité à exercer ses fonctions, aux yeux des fans comme des dirigeants. Juger l’aventure de Jason Kidd aux Bucks à travers ce prisme serait réducteur par rapport à ce qu’il a voulu mettre en place. En instaurant une culture du travail et de l’effort, Kidd a donné une partie de soi et de sa philosophie mais il a surtout posé des bases solides pour la progression et la maturation de ce groupe. Et si les Bucks parviennent un jour au sommet de l’Est , ils se diront que c’était un mal pour un bien.

Source texte : Bleacher Report