Vince Carter parle de l’évolution de la NBA depuis son arrivée dans la Ligue : le doyen en a vu changer des choses

Le 03 mars 2018 à 11:45 par Aymeric Saint-Leger

Vince Carter
Source image : Youtube/NBA

Vince Carter est actuellement dans sa vingtième saison dans la Ligue. Il fait partie de ces sept joueurs à avoir joué deux décennies entières en NBA, et il pourrait égaliser le record de Parish, Willis et Garnett la saison prochaine. Du haut de ses 41 ans, il a vécu deux époques bien différentes de la NBA. Il est revenu sur les changements qu’il a vécu entre sa draft, en 1998, et aujourd’hui.

Ah, ce bon vieux Vinsanity (pardon, pas vieux, il dunke encore à 41 balais, hein). 20 ans de carrière, sept franchises traversées. Drafté par les Raptors, il rejoindra plus de six ans après le New Jersey, où il restera jusqu’en 2008. Après deux passages éclairs à Orlando et à Phoenix, il passera trois saisons avec les Mavericks, trois chez les Grizzlies, avant de débarquer à Sacramento à l’été 2017. Hell yeah. En vingt ans, beaucoup de choses ont eu le temps de changer pour Carter : (beaucoup) moins de cheveux, (un peu) moins de détente, ce qui ne lui empêche pas d’aller encore péter des gros tomars dès que l’occasion se présente. Mais la transformation la plus grande à laquelle il a assisté, qu’il a vécu de l’intérieur, c’est celle de la NBA. En deux décennies, le basket sur les parquets s’est radicalement transformé, même si en fin de compte, il faut toujours mettre un ballon dans un panier. C’est plutôt les manières d’y arriver, ou de l’empêcher, qui ont évolué. Si le jeu offensif a évolué, avec un plus grand volume de shoots, plus de tirs à l’extérieur, de plus en plus lointains, c’est bien la défense qui s’est transformée en profondeur. Certaines règles défensives se sont vues intégrées, ce qui a fondamentalement changé la manière d’attaquer. Les grosses squads qui fracassaient tout ce qui passe par là ont du s’adapter. La vitesse du jeu a bien sûr changé, tant de choses ont évolué. Mais celui qui l’explique le mieux, c’est bien celui qu’on surnomme Half Man Half Amazing, dans une interview relayée par Slam Online.

“Être dans une ligue pendant 20 ans… Beaucoup de choses ont changé. Par où commencer ? La défense illégale. Je faisais partie du vieux style où vous pouviez frapper un gars qui courait à travers la peinture. Vous avez maintenant des gars qui peuvent jouer poste 2, 3 et 4 qui font 2m08, 2m11. Vous avez des postes 5 qui shootent maintenant. Le jeu est plus rapide. Je me souviens à l’époque où ils disaient ‘Nous voulons nous débarrasser de la défense illégale, et nous voulons faire de l’espace sur le terrain pour rendre le jeu plus rapide’. Et bien, leur vœu a été exaucé parce que maintenant vous avez cinq mecs qui courent sur le terrain comme des ailiers. Puis, vous avez des meneurs, je veux dire, qui sont dans le top 10, top 15 des meilleurs rebondeurs de la NBA. C’est juste l’évolution du jeu, qui est incroyable. Et maintenant vous voyez que des joueurs possèdent un ensemble de skills, qui ne permettent pas de déterminer leur poste. Vous avez un gars qui peut dribbler, shooter si bien, que vous l’appelleriez probablement un shooting guard, ou un point guard. Maintenant vous voyez des gars comme Durant, qui font 2m08, 2m13, qui peuvent monter la balle, et mener le jeu. Les Ben Simmons de ce monde. Ces gars auraient été considérés comme des ailiers-forts quand j’ai commencé dans cette Ligue. Et quand je dis ailiers-forts, je parle de vrais postes 4, pas de stretch quatre, c’est autre chose. A mon époque, vous n’aviez que Dirk, qui était sans doute plus un stretch 4 qu’un pur ailier-fort. Mais maintenant c’est comme ça, le jeu est ouvert. Quand j’ai débuté, il n’y avait pas de choses aussi rares qu’une raquette ouverte. C’était souvent bondé dans la raquette, parce que vous aviez votre ailier-fort et votre pivot dans la peinture. Maintenant vous pouvez voir des raquettes grandes ouvertes, et il est possible de driver de partout. Ça fait partie de l’évolution du jeu, c’est différent maintenant. Vous savez, on m’a posé cette question avant : ‘Pensez-vous que les joueurs d’aujourd’hui s’en sortiraient dans la NBA que vous avez connue lorsque vous êtes arrivé ?’ Honnêtement, je ne pense pas. Je veux dire, certains gars pourraient s’adapter, s’ajuster à ce style de jeu, mais d’autres ne pourraient pas, parce que le jeu va si vite d’un côté et de l’autre maintenant. Il y a 20 ans, les joueurs avaient le droit de mettre les mains sur vous, on avait le droit de vous balancer, de vous percuter. Et ce qui est considéré comme une faute flagrante aujourd’hui était une faute normale. Donc c’était genre ‘Hey, lève-toi et continue à jouer’. Ou des fois, vous vous faisiez bousculer, vous regardiez l’arbitre, et il disait ‘Joue au basket’. Donc c’est juste un jeu différent, et je pense que beaucoup de gars, mentalement, n’auraient pas pu encaisser l’impact physique tout au long du déroulement d’une saison de 82 matchs, et cela devenait pire en Playoffs ! Il y avait tellement de différences entre le basket pratiqué en saison régulière et celui pratiqué en Playoffs. Quand vous arriviez en Playoffs, c’est au moment où vous vous asseyez après une saison, après une série de Playoffs, que vous avez peut-être perdu, et vous vous dites ‘J’ai besoin d’un mois juste pour récupérer du combat physique.’”

Comme le dit si bien Vince Carter, tant de choses ont changé. Ce qui le marque peut-être le plus, c’est l’intensité physique de la NBA. Ce n’est pas le plus grand, pas le plus costaud, mais même lui arrivait à faire sa loi dans la NBA de la fin des années 90 (il y en a eu, des posters…). Ceci dit, le temps est passée, tant de choses ont changé, mais Vinsanity est toujours là. Certes, son impact a fortement baissé depuis quatre ans, mais le doyen de la Ligue tourne encore à 5,3 points à 41,2% au shoot, 2,3 rebonds et 1,3 passe en 17,2 minutes par match. On est loin de ses moyennes en carrière (17,8 unités à 43,7% au tir, 4,5 prises et 3,3 caviars en 31,6 minutes par match). Mais l’essentiel n’est pas là. Vince est un sage, avec une expérience indiscutable, et tous les jeunes joueurs qui ont eu la chance de le côtoyer sur les dernières années ont sans doute pu apprendre énormément auprès d’un, si ce n’est le meilleur dunkeur all-time. Carter est surtout le témoin de la transformation de la Ligue, et accrédite la thèse qu’on ne peut pas juger entre les époques, on ne peut pas comparer les meilleurs joueurs d’époques différentes (coucou les gens qui débattent sur Jordan-LeBron). Simplement apprécier chaque époque, s’adapter comme a su le faire Air Canada, démonteur de cercles en début de carrière, shooter émérite au crépuscule de celle-ci. Et pour boucler la boucle, on rêve, la saison prochaine, d’un possible retour où tout a commencé, dans la salle qui va si bien à Carter, le Air Canada Centre.

Les années 90, les années 2010. Deux époques antagoniques en termes de style de jeu. Peu ont la chance de tout connaître de ces décennies, Vince Carter, lui, les a vécues. À 21 ans, ou quasiment deux fois plus, il restera le joueur insane qu’on apprécie tant. Profitons-en, le joueur incroyable, l’artiste qu’il est toujours ne va pas tarder à tirer sa révérence, en ayant connu tant d’évolutions pendant (au moins) deux décennies entières dans la Ligue.

Source texte : Slam Online