Joel Embiid en équipe de France : les rédacteurs de TrashTalk donnent leur avis

Le 18 janv. 2018 à 13:07 par Bastien Fontanieu

Joel Embiid - pari
Source image : NBA League Pass

Comme nous l’avions annoncé récemment, nous voulions effectuer une couverture légère de l’affaire Joel Embiid en équipe de France. Mais parce que les avis peuvent parfois diverger, il a semblé plus pertinent et intéressant de laisser la parole à chacun : la mayonnaise TrashTalk en mode Process, c’est par là.

La beauté de pouvoir bosser en équipe, et d’avoir des rédacteurs de différents horizons, c’est de mélanger les avis, les opinions, et élever le débat en picorant chacun dans l’assiette de l’autre. Telle est la dynamique qui a semblé la plus appréciable pour se poser définitivement sur le dossier Embiid en EDF, sachant que nous n’avions pas couvert cette actualité jusque là. Et parce que cela nous a été demandé, mais aussi parce qu’un Apéro ne suffit pas, nous avons choisi de nous exprimer chacun dans notre coin, mais sur la même feuille et le même sujet. Tour de table des grosses têtes chez TrashTalk.

DAVID

Contre. Le mec fait une réponse polie et ça y est, tout le monde s’emballe. Et le pire c’est la fédé qui court dans le piège. Joel Embiid est un super joueur et un gars qui me fait marrer. Mais quel est son lien avec la France ? Il y est né ? Il y a grandi ? Il y a vécu ? Il est venu passer des vacances ? Bref, aucun lien si ce n’est qu’il parle notre langue. On ne joue pas avec une sélection nationale sans véritable accroche, on a bien vu par le passé ce qui arrivait quand un mec se disait intéressé mais n’avait pas l’amour du maillot bleu ou un lien fort avec cette sélection : que de la frustration pour nous, des insultes pour lui. Je n’ai rien contre naturaliser un joueur – sans pour autant tomber dans l’excès d’un roster composé de binationaux – s’il possède ce lien, comme des Crawford Palmer, mais là il n’y a rien. Rien d’autre qu’une réponse politiquement correcte à une question sur un fantasme sans intérêt. Et encore je ne rentre pas dans les considérations sur son physique qui fait qu’entre les blessures, les réticences de Philly et le prix de l’assurance on risque de partir dans des feuilletons à perturber l’EDF plus qu’autre chose. Par contre, c’est avec plaisir que j’aimerais le voir être une figure de proue du basket africain en revêtant le maillot du Cameroun.

BEN

Contre. J’adore Joel Embiid et je le regarde jouer dès que j’en ai l’occasion. Je trouve qu’il apporte beaucoup de fraîcheur en NBA et il en ferait sûrement autant en EDF – son association avec Rudy dans la raquette donne la chair de poule. Mais je ne peux pas m’empêcher de penser à l’exemple de l’équipe qatarie de handball qui était arrivée en finale de son mondial en 2015 avec un effectif composé de 14 joueurs naturalisés sur les 16 au total. Des supporters espagnols avaient même été payés pour venir encourager le Qatar avec tout ce que l’on imagine de drapeaux et de maillots fournis par la fédération locale. Bien sûr, l’exemple est volontairement extrême et la FIBA n’autorise de toute façon qu’une naturalisation par pays mais quelle réaction aurait-on eu si nos Bleus avaient perdu contre cette équipe ? Ou, si on retourne un peu le problème, ne nous sentirions-nous pas un peu mal à l’aise si nous venions à bout de nos chers voisins espagnols grâce au pivot camerounais lors des prochains championnats du monde ? Je ne veux pas passer des mois à essayer d’imaginer nos résultats si Jojo n’avait pas été naturalisé et que nous étions allés au combat avec le groupe actuel qui a vécu toutes ces joies et ces déceptions ensemble. Faisons avec nos forces et nos faiblesses sans essayer de tricher, la victoire sera encore meilleure.

ALEXANDRE

Pas pour. Ce n’est évidemment pas contre Joel Embiid qui est un joueur fabuleux et qui apporterait forcément sur le plan sportif à l’Equipe de France. Mais je ne suis pas pour le principe de naturalisation d’une manière générale (quand il s’agit d’une sportive ou d’un sportif qui n’a rien ou pas grand chose à voir avec le pays) car cela enlève beaucoup à ce que ce sont vraiment les sélections nationales : une équipe formée des meilleurs éléments d’un pays. Une sélection ne peut pas se comporter comme un club qui recrute.

GIOVANNI

Ni pour, ni contre, mais arrêtons cette tempête dans un verre d’eau.
1) Il me semble tout d’abord que Joel Embiid a simplement répondu poliment à une question un peu gênante et que tout le monde se met à tirer des conclusions un peu vite. Alors on se calme et on en discute, au lieu de partir dans des débats qui n’ont pas lieu d’être.
2) Certaines sélections profitent du système depuis longtemps pour « s’offrir » les services d’un joueur américain naturalisé. Certains exemples font montre d’un attachement avec le temps (JR Holden), d’autres ne sont que des mercenaires mais tout le monde est content. C’est le jeu. Tariq Kirksay ou Crawford Palmer sont des exemples réussis en France, mais l’ajout d’un joueur étranger n’est pas systématiquement gage de bonheur.
3) Attention à la jurisprudence Noah, pas sûr que ce soit une idée merveilleuse de se positionner sur un mec dont on ne connaît pas les réelles intentions, qui plus est très fragile, en galère pour jouer une saison complète et probablement propriétaire du contrat le plus relou de NBA en matière de petites astérisques.
4) Mais comment faire avec une raquette Gobert/Embiid ? Jusqu’à preuve du contraire, on ne reste pas une nation qui compte pendant des années sans un roster de compétition, ce qui induit des doublons sur les postes et encore heureux, il faudrait quand même se rappeler, avec tout mon amour pour lui, que notre pivot titulaire s’appelait encore Ronny Turiaf il y a quelques années.
5) Conclusion : si la FFBB arrive à attirer Embiid en Bleu ? Exceptionnelle nouvelle, mais à prendre avec des pincettes. Si la piste est abandonnée ? Le vivier est suffisant en France pour ne pas s’obliger à aller faire ses courses ailleurs, même si chacun est dans son droit et que ce n’est en aucun cas critiquable.

BASTIEN

Compliqué de dire “pour” ou “contre”. En fait, c’est surtout ce qu’il y a autour de l’affaire qui me dérange. Ma position sur le dossier en lui-même est assez simple, en voyant l’excellent système de formation français qui grandit et produit des joueurs fabuleux chaque année, je n’ai pas envie de mettre de bâtons dans les roues de cette machine en contournant le principe de sélection nationale. Maintenant, c’est ce qu’il y a autour qui me tracasse. Premièrement, le clivage qui existe entre ceux qui sont pour et ceux qui sont contre. On n’est pas obligés de se pointer des fusils à la gueule pour une histoire de ce genre, on parle d’un joueur de basket qui a répondu avec improvisation à une question un poil farfelue, et c’est limite si certains allaient se tabasser pour une question identitaire, voire d’exploitation. Il y a là-dedans quelque chose de très révélateur, plutôt malsain, et assez malheureux à observer. Deuxièmement, l’incompréhension qu’il y a chez certains envers Embiid. C’est un joueur fabuleux, qui veut vivre les plus grandes compétitions au monde, aimerait porter ses couleurs mais garde ses options ouvertes. Si on se mettait 30 secondes à la place du type, on comprendrait nettement mieux ses déclarations, et par conséquent le fait que la fédé daigne répondre au téléphone. Et enfin, ce serait bien qu’on laisse justement les médias faire leur taf, que cela plaise ou non. Si ça fait chier certains d’avoir ce genre de sujet mis sur la table, je peux le comprendre, mais entre mettre une affaire sous le tapis en levant les yeux au ciel ou avoir de vrais débats passionnés et constructifs pour mieux avancer ensemble, le choix me semble aisé. Peut-être que cela arrivera, peut-être pas, mais y’a encore plus de boulot dans notre façon à tous d’aborder ces sujets sensibles que dans notre FFBB chérie.


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