Pourquoi DeMar DeRozan n’est-il pas pris un peu plus au sérieux dans la course au MVP ?

Le 06 janv. 2018 à 10:17 par Bastien Fontanieu

DeMar DeRozan
Source image : NBA League Pass

La question a été posée sur l’Hexagone comme ailleurs ces derniers temps, car l’étonnement semble se propager dans les caboches de certains. Leader incontesté d’une équipe au top de sa forme, DeMar DeRozan n’est pas pris au sérieux dans la course au MVP. Et pourquoi ça ?

Les critères, pourtant, sont respectés. Cette réalité imposée par le natif de Compton est incontestable, lui qui enchaîne les grosses perfs comme Kendrick enchaîne les syllabes sur ses tracks. Nous allons d’ailleurs les dérouler, afin de vérifier en quoi le dossier DMDR10 mérite de grimper dans la pile des plus gros clients. Et à commencer par les chiffres personnels. Pour ce qui est de la production individuelle, on parle actuellement du 7ème meilleur marqueur de la NBA (25 points), dont le pourcentage de réussite au tir est le meilleur depuis sa saison rookie (48,5%), record personnel à distance (36,8%), ce à quoi on peut ajouter une distribution à la pointe de son prime (5 passes par match). Avec une ligne pareille, DeRozan cause avec les plus grands du circuit, même si certains affirmeront qu’il était encore meilleur la saison dernière. C’est un débat ouvert, disons plutôt que DeMar était plus productif (27 ppg), mais il est bien plus efficace cette année. En y ajoutant des performances big time comme ses 52 points contre Milwaukee ou ses 45 unités à Philadelphie, l’animal fait le buzz à titre individuel. Un élément important pour n’importe quel candidat MVP. Et si on peut déballer des tonnes de statistiques afin de souligner à quel point DeMar est en feu cette saison, on préférera simplement garder ce dernier élément en tête. James Harden, LeBron James, DeMarcus Cousins, Kevin Durant, Giannis Antetokounmpo, Russell Westbrook et Damian Lillard sont les seuls à fournir minimum 24 points et 5 passes par soir. DeRozan ? Membre de ce club également, sauf que lui possède un meilleur bilan que quasiment tous les copains cités à l’instant.

Et c’est là que joue l’argument collectif. Si DMDR n’a peut-être pas la puissance numérique des énormes stars actuellement au-dessus de lui, le bilan des Raptors a de quoi fermer le clapet de certains. On pense notamment aux copains comme Giannis, Westbrook et même Harden, puisque Toronto vient de rattraper Houston au classement général. En étant intraitables à domicile et capables de faire du sale en déplacement, les Canadiens devraient filer un push à leur leader dans cette course au trophée individuel le plus convoité. Quelques 27 victoires pour 10 défaites seulement, seuls les Celtics et les Warriors font finalement mieux à l’heure actuelle. Et jusqu’à preuve du contraire, ce n’est pas Kyrie Irving qui va subitement prendre la place de DeRozan dans la lutte pour le MVP. On peut également ajouter le fait que les Raptors ont été capables de sortir les canines quand il fallait (victoire à Houston, à Portland, contre Washington), la présence de la franchise dans le Top 5 des classements offensifs et défensifs aujourd’hui, et vous obtenez ce que de nombreux votants attendent : un leader au top de sa forme, dans une équipe au top de son jeu.

Mais alors, pourquoi aussi peu de crédit dans la course de DeRozan pour le MVP ?

Plusieurs raisons à cela. Et quitte à reprendre les éléments avancés ci-dessus, autant avancer leur penchant sur la table. On parlait des Raptors en tant qu’équipe clinquante, elle qui vient de taper deux fois les Bucks et de réaliser un mois de décembre remarquable, récompense à l’appui pour Dwane Casey. Sauf qu’on parle de Milwaukee ici, une cylindrée aussi sérieuse qu’aléatoire, loin de l’élite. Peut-on faire la liste des main events lors desquels Toronto a chié dans la colle ? Boston, Golden State, San Antonio, Oklahoma City, que des défaites contre ces superpuissances, et dans lesquelles DeRozan a été plus que moyen. Même les Wizards, qui étaient mentionnés précédemment, sont venus s’imposer au Canada sans John Wall. Ce qui n’est pas “la faute” de DeMar, loin de là, mais les grands rendez-vous restent dans la tête des gens et jusqu’ici les dinos n’ont pas été à la hauteur. D’où l’importance du mois à venir, avec la venue -enfin !- de powerhouses au Air Canada Center. Si les Raptors assurent ces rencontres et DeRozan est productif, on pourra difficilement continuer à le laisser un rang en-dessous. Surtout que, deuxième point majeur en parlant de rang du dessous, l’arrière reste encore et toujours considéré comme un membre du groupe “non-superstar”.

Et cela vient de plusieurs raisons. Le manque d’exposition médiatique en étant à Toronto, le manque de bling-bling dans son jeu, lui qui endort davantage de monde à coup de backdown à mi-distance plutôt que de monter au tomar sur ses adversaires. Le manque de punch statistique aussi, il faut bien en parler. Quelle fût la réaction la plus répandue, lorsque DeRozan claqua 45 points à Philadelphie ? “Comment ça, c’est son record en carrière ?!” La pointe à 52 unités était énorme contre Milwaukee, mais c’était une première. Régulier sans monter dans de folles hauteurs, l’Olympien n’a pas cette capacité à pouvoir envahir les pages des journaux avec des lignes statistiques venues d’ailleurs. Il ira difficilement chercher les 10 passes, les 10 rebonds, ou les 50 points. DeMar, c’est 20-30-20-30-20-30, ce qui n’a rien d’excitant pour les votants comme pour les fans. Demandez à Duncan ce qu’il pense de la régularité, ce n’est pas pétillant donc “ça fait chier“, et DeRozan en paye en partie le prix. C’est ce qui explique notamment cette absence du groupe nommé “superstar”. Les LeBron, Harden, KD, Curry, Giannis, Westbrook, que ce soit dans le type de jeu proposé et dans les chiffres tapés, il y a quelque chose d’exceptionnel qui leur permet d’atteindre le sommet de la hiérarchie mondiale. Si DMDR veut sa place dans ce type de club, la voie est toute tracée mais son jeu n’est probablement pas compatible avec ce désir. Du moins, actuellement.

Fabuleux cette saison, patron d’une équipe en pleine forme, DeMar DeRozan devrait être davantage respecté. Ce qui est le cas, on le voit de plus en plus dans la façon dont il est décrit, moins robotique que ces deux dernières années. Maintenant, difficile de le ranger plus haut dans la course au MVP, pour des raisons aussi numériques, individuelles et collectives que techniques. Si on était lui, on se moquerait de ce type de reconnaissance : retourner en finale de Conférence aiderait bien plus son image à l’avenir.