Bryon Russell a peut-être mangé le plus grand shoot all-time, mais il a squatté l’histoire à sa façon

Le 31 déc. 2017 à 09:26 par Bastien Fontanieu

bryon russell michael jordan
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Il y a des carrières, comme celle-ci, dont on oublie souvent les détails car un moment s’élève au-dessus des autres. Dans le cas de Bryon Russell, impossible de ne pas penser au tir de Michael Jordan sur sa tête, lors du Game 6 des Finales NBA de 1998.

Bien des titres sont distribués chaque année, que ce soit sur la NBA actuelle ou sur les classements all-time. Meilleur dunk de tous les temps ? Meilleure action de la saison ? Meilleur move de l’histoire ? Meilleure déclaration de l’année ? Quand on se penche sur ces débats interminables et qu’on en vient à certaines sections, les arguments les plus féroces sont avancés. Sauf que dans le cadre de la photo la plus mémorable de l’histoire de la Ligue, peu sont capables de rivaliser avec le fameux shoot de Jordan à Utah, permettant aux Bulls de remporter leur sixième titre. Cette action, ce push-off, ces échanges innombrables entre fan du Jazz ou de l’Illinois sur la présence d’une faute offensive ou non, le fait que ce soit le dernier geste de Michael avec le maillot de Chicago, tout est rassemblé pour la première place soit réservée. Mais si le numéro 23 est célébré pour son sang-froid la majeure partie du temps, le numéro 3 présent en premier plan sur l’action est tout aussi historique, tout aussi inoubliable. Monsieur Bryon Russell, coriace défenseur et éternel membre de cette séquence devenue légendaire. Ainsi va le sport, malheureusement pour quelques âmes esseulées. Certains rentrent dans les plus grands récits all-time en étant à l’origine de l’action, d’autres en font de même en terminant dans le siège de la victime. Et si Fred Weis a lui aussi eu droit à cette triste notoriété grâce à un certain Vince Carter, Russell est dans la même famille à cause de ce coup de poignard indescriptible signé Jordan.

Ce n’est pas une façon de “forcer” la chose, c’est une réalité qui existe encore aujourd’hui. Demandez à un new-yorkais s’il connaît Fred Weis, et il y a de fortes chances pour qu’il hoche de la tête. Demandez à un habitant de Chicago s’il connaît Bryon Russell, et il esquissera un sourire. Quand Michael lui-même parle de vous dans son discours d’entrée au Hall of Fame, que ce soit positivement ou négativement vous êtes dans la place. Alors certes, Jojo n’y était pas allé de main morte, en rappelant l’anecdote selon laquelle en 1994 ce bon Bryon avait affirmé à Sa Majesté qu’il regrettait de le voir à la retraite car il lui botterait le cul en cas de comeback, mais Russell n’avait fait que son devoir. Il avait ouvert sa bouche et décidé d’assumer comme si souvent. Il avait ensuite défendu, durement, sans peur, sans relâche, acceptant de se faire punir car la loi de la jungle en NBA marche ainsi. Cette confiance ? C’est notamment celle qui permettait au joueur d’être un élément clé dans les belles années Jazz des années 90. C’est ce statut de 3&D à l’ancienne qui lui offrait la possibilité de participer aux plus grandes joutes de la fin de cette décennie. Puis de rejoindre Jordan à Washington, dans une saison 2002-03 qui fût la dernière de la légende en carrière. Inconcevable pour certains, se faire tuer par Michael puis lui serrer la main quelques années plus tard. Well, chacun sa façon de voir l’histoire. Il y a ceux qui auront trop peur de finir dans la mauvais spot et tomber sous les critiques, et ceux qui accepteront le challenge torse bombé tout en acceptant les conséquences. Peut-être qu’un jour, on ne ricanera plus en parlant de Bryon Russell, et qu’on le félicitera pour avoir tenté. Tenter quoi ? De défendre sur l’action la plus iconique de l’histoire de la NBA. Plutôt chouette comme strapontin dans les mémoires.

Dans certains grands moments sportifs, un bourreau est célébré pour son génie de l’instant, mais il est rarement seul. Pour le contre de LeBron, il y avait le lay-up d’Iguodala. Pour le tir de Robert Horry, il y avait le saut de Chris Webber. Et pour le shoot de Jordan à Utah, il y avait la glissade de Bryon Russell. Bon anniversaire, c’est mérité.