Russell Westbrook, historique et frustrant : 51 points, 10 rebonds, 13 passes, 1 gros craquage

Le 20 avr. 2017 à 05:55 par Bastien Fontanieu

C’est de lui, dont on parlait forcément avec énergie jusqu’au bout de la nuit. Auteur d’une performance historique, Russell Westbrook a malheureusement réussi à passer d’un visage époustouflant… à un qui était frustrant.

Tout le paradoxe du meneur évoluant chez le Thunder, en un seul match. Difficile de trouver plus grand mélange de sentiments rassemblés autour d’un seul et même joueur, en l’espace de 48 minutes. Il y a eu de l’enthousiasme, de l’excitation, de la fascination, de la jouissance et de la stupéfaction. Mais il y a aussi eu des soupirs, des interrogations, des remises en cause et de la frustration. Hier soir, c’était le full-Russell Westbrook Show comme on aime souvent le décrire. Un peu de tout et de n’importe quoi, beaucoup de très beau mais hélas aussi de désarroi face à une fin de match qu’on ne pourra oublier. Installons déjà le scénario, pour bien expliquer et comprendre la position inconfortable dans laquelle le All-Star nous mettait, et se mettait. Pendant trois quart-temps, allez deux et les 80% du troisième, ce que Westbrook réalisait était hors du commun. Lui, à Houston, face à une armée diabolique, magnifiquement aidé par ses coéquipiers avec une défense remarquable à l’intérieur comme sur les lignes extérieures, lui et ses potes prenaient 12 points d’avance. Check. Il est 3h56 du matin, OKC se sent confiant et Russell obtient trois minutes de repos, en ayant déjà validé 36 points, 9 rebonds et 11 passes à plus de 50% de réussite au tir. On est donc, sur le papier, aux portes d’un exploit qui ne ferait que cimenter Westbrook dans la légende, et ses gars font le job à ses côtés.

Malheureusement, la suite se transformera en cauchemar, en véritable cauchemar oui, pour le joueur comme son équipe et ses fans. Réussir à ruiner une ligne statistique historique ? C’est le sentiment qu’on a eu en sortie de défaite, en sortie de panique collective et d’attitude forcément reprochable pour le leader. Mais ne sautons pas les étapes et restons sur le fil de la rencontre. Oklahoma City doit jouer sans son meneur en fin de troisième quart, un finish qui lancera le naufrage du bateau piloté par Billy Donovan. Les remplaçants sont perdus, Houston sent qu’il faut saisir cette opportunité, et les 12 précieux points d’avance créés sont soudainement réduits à néant, sous les yeux d’un Westbrook forcément en colère. Lui qui avait fait un chantier mémorable en 29 minutes, il sentait que le money-time allait être une galère sans nom. Seulement, et c’est là que le débat se créera au sein de la communauté basket, l’animal prit alors une décision qui le plongera par la suite dans les abysses : plus un seul ballon pour ses partenaires, s’il faut que le Thunder s’en sorte, ce sera via moi, point barre. Une situation déjà connue cette année, qui avait déjà apporté bien des résultats légendaires (à Denver) mais aussi d’autres plus troublants (à Portland). Et hélas pour la franchise d’Oklahoma City, c’est la seconde voie qui sera réservée aux hommes de Billy Donovan ce mercredi, un foutu money-time se transformant en séance de torture pour Westbrook comme ses coéquipiers.

4 sur 18 au tir dans le dernier quart, 3 tirs seulement rentrés par ses collègues et surtout 6 tentés (!), on était au sommet de la Russell-dépendance. Un jeu qui nous a tant de fois poussé à crier à des heures improbables, mais nous faisait soupirer cette fois-ci. Prenant des tirs d’une difficulté rare sur la défense disciplinée des Rockets, Westbrook mettait les oeillères et pensait certainement bien faire. Beh oui, c’est évident, pour un mec qui voyait son groupe traîner dans la merde en fin de troisième quart, il fallait bien garder la gonfle, non ? C’est justement cette évidence qui poussait les observateurs de la rencontre à devoir choisir un camp. Passer de l’exulte aux insultes, virer du blanc au noir, pointer le majeur alors que c’est un pouce en l’air qui symbolisait la majorité de sa rencontre. La question n’est pas de savoir si Russell a fait le bon choix : d’un pur point de vue collectif et après avoir obtenu le soutien de ses potes pendant 36 minutes, c’est non. Mais en même temps, en voyant une rencontre glisser entre ses mains pendant qu’on est sur le banc, alors qu’on a passé les trois quarts de la partie à un niveau exceptionnel, comment réagirions-nous ? Est-ce qu’on continuerait à abreuver des coéquipiers maladroits, ou bien irions-nous chercher les points par nous-mêmes ? Voilà toute l’énigme qui entoure Westbrook, sa saison et la dépendance de sa franchise envers ses performances, elle qui a dû s’incliner avec tristesse après avoir fait le plus dur.

Et au final ? Russell Westbrook a validé le premier triple-double avec minimum 50 points de l’histoire des Playoffs (51 points, 10 rebonds, 13 passes, 4 interceptions, 4 balles perdues, 17/43 au tir, 2/11 de loin, 15/18 aux lancers)… dans la défaite. Une performance exceptionnelle, malheureusement entachée par ce dernier quart affreux. Qu’aurions-nous fait à sa place ? Chacun son camp, à vous de choisir le votre.