C’était il y a seulement 10 ans – Utah Jazz : un Russe, un chauve et un Turc vont chez les Mormons…

Le 14 juil. 2016 à 22:20 par Francois M

2006, ça sonne comme hier mais c’était il y a 10 ans. Avoir un MySpace ou un Skyblog était alors top tendance et Daniel Powter cavalait en tête des charts avec “Bad Day”. Alors imaginez un peu à l’échelle NBA, sachant que les joueurs ne restent en moyenne pas plus de 5 ans dans la Ligue. Des dizaines de journeymen ont écumé les terrains pendant ce laps de temps. Certaines stars d’aujourd’hui étaient encore des petits jeunes à potentiel, d’autres rentraient à peine en high school.

Ben Simmons et Brandon Ingram avaient tout juste 8 ans et les jeunes draftés serraient encore la main de David Stern. La NBA venait d’instaurer le Dress Code pour en terminer avec l’invasion du bling-bling et de la culture street, ce qui donnera naissance à des monstres de style – prenez-le comme vous voulez – comme Russell Westbrook. Même la carte des franchises NBA était différente. TrashTalk revient sur cette saison si proche et si loin à la fois, en faisant le bilan pour chaque franchise.

Aujourd’hui, c’est au tour du Utah Jazz… 

Bilan : 41-41, 9ème à l’Est

Le 5 : Deron Williams (rookie) – Matt Harpring – Andrei Kirilenko – Carlos Boozer – Mehmet Okur

Le banc : Keith McLeod – Gordan Giricek – Devin Brown – Mitt Palacio – Jarron Collins – Greg Ostertag

Le MVP : Andrei Kirilenko, 15,3 points, 8 rebonds, 4,3 passes, 1,5 interception, 3,2 contres. All-Defensive First team.

Au début de la saison 2005-2006, le Jazz a déjà entamé depuis deux ans sa reconstruction, déclenchée par les départs après deux décennies au sommet du duo magique Karl Malone – John Stockton. Même si le coach légendaire Jerry Sloan est resté en place, tout la Ligue s’imaginait un effondrement immédiat. Cependant, avec l’ailier russe Andrei Kirilenko déjà présent, ainsi que les ajouts de Carlos Boozer à la free agency et Mehmet Okur en provenance de Detroit, la franchise mormone présente déjà un groupe solide. Certes, la précédente s’est terminée par un bilan de 26-56, mais qui est principalement dû aux blessures de Kirilenko et Boozer, qui ont manqué 70 matchs à eux deux. La franchise enchaîne les bonnes décisions en échangeant trois picks de Draft pour récupérer le 3ème choix de Draft et sélectionner le meneur Deron Williams. Si tout le monde reste en bonne santé, l’équipe est construite pour aller en Playoffs.

Mais comme d’habitude les “si” et les blessures ne font pas bon ménage. Boozer est out pour les 49 premiers matchs de la saison, tandis que le reste de l’effectif enchaîne les pépins physiques, sauf le rookie Deron Williams et l’intérieur Mehmet Okur. Le premier produit un boulot solide pour sa première saison, tantôt dans le 5, tantôt sur le banc, il aligne 10,8 points, 4,5 passes, 41% du parking en 29 minutes. Le second devient le métronome de l’équipe : seul joueur à jouer les 82 matchs – pour la deuxième saison d’affilé -, il voit son temps de jeu augmenter de 7 minutes par match et récompense la confiance à son coach. Puisque son compagnon de raquette chauve est blessé, le Turc a plus d’espace à l’intérieur et passe ainsi de 12,9 points la saison précédente à 18 points sur la campagne 2005-2006, le tout en tirant à 34,5% du parking, atout rare pour un géant de plus de 2 mètres 10 et 130 kilos. Cependant le leader de ce groupe est l’ailier Andrei Kirilenko, à seulement 24 ans. Complet comme très peu de joueurs dans l’histoire de la NBA, AK47 – un surnom qui crache du feu, on est d’accord – a surpris toute la Ligue en augmentant encore son volume de jeu au départ du duo légendaire, ce qui lui a permis de décrocher une sélection au All Star Game 2004. Le Russe est un vrai couteau suisse en attaque et en défense, c’est du jamais vu, tant dans l’aspect visuel que dans les statistiques. Avec son envergure et un sens de l’anticipation exceptionnel, il est le deuxième contreur de la NBA, de très peu, alors qu’il joue ailier. Le soucis est qu’il commence à avoir des tensions avec l’entraineur Jerry Sloan : lui et ses coéquipiers expriment leur mécontentement quant à son style de coaching. De l’autre côté, le proprio Larry Miller se plaint du manque d’implication de ses joueurs. Malgré ces désaccords et toutes les blessures, le Jazz manque les Playoffs de très peu : en course jusqu’à trois matchs de la fin de la saison, ils finissent avec un bilan équilibré de 41-41.

La saison 2005-2006 n’est donc pas une saison marquante de l’histoire du Jazz, mais elle laisse entrevoir le potentiel de cette équipe. Une saison de transition, gâchée par les blessures mais qui permet aux différents éléments de se mettre en place. Les dirigeants ont très bien géré l’après Stockton – Malone en enchaînant les bons paris et les choix de Draft intelligents. Ils n’ont pas essayé de tout casser après 2003 et ce fût une bonne idée. En effet, la saison suivante les blessures vont épargner l’effectif, et le duo D-Will – Boozer va rappeler aux Mormons les plus belles années de leur franchise. Le meneur double ses stats à la passe en flirtant avec le double-double de moyenne tandis que l’intérieur débarrassé de ses blessures poste 21 points et 11,7 rebonds de moyenne. Comme Mehmet Okur continue sur son rythme, la raquette du Jazz est sélectionnée au All-Star Game. Qualifié en Playoffs, Utah surprendra toute la NBA en se hissant jusqu’en Finale de Conférence. Quand on parle d’une reconstruction réussie.

Le moment marquant de la saison : 3 janvier 2006, Andrei Kirilenko lâche des statistiques d’un autre monde face aux Lakers privés de Kobe Bryant.

Andrei Kirilenko est un ovni statistique dans l’histoire de la NBA. C’est bien simple, sa performance face aux Lakers, le 5×6, qui consiste à remplir toutes les lignes statistiques avec au moins 6 unités, n’a été réalisé que par Hakeem Olajuwon dans la NBA moderne. Personne d’autre, à part peut-être certains dinosaures du temps où l’on ne comptait pas toutes les lignes statistiques, n’a réalisé une telle performance. Face à des Lakers sans Kobe – qui score cette année là plus d’un tiers des points de son équipe -, certes, mais l’exploit est là : 14 points, 9 passes, 8 rebonds, 7 contres, 6 interceptions. Face à des concurrents pour les dernières places en Playoffs, le Russe offre une victoire 90-80 aux siens qui les refait passer à un bilan de 50% et donc devant les Lakers au classement.

L’actuel président de fédération russe de basket était un monstre défensif, et de l’autre côté du terrain un précurseur pour des joueurs comme Nicolas Batum ou Chandler Parsons. Il a participé à l’établissement de cette tendance du 3 couteau-suisse et défenseur tellement recherché par les franchises. Quand on regarde son niveau de jeu All-Star à 22 ans, on ne peut que regretter qu’il ne se soit pas plus épanoui en NBA, notamment en raison d’un caractère en acier trempé et d’un enchaînement de petites blessures. AK-47 n’en reste pas moins une légende du basket international, et a laissé son nom inscrit à plusieurs endroit dans les livres de records NBA.

10 ans après, le Jazz a tourné la page du duo Williams – Boozer, mais étant toujours dans la course aux Playoffs, sans jamais sombrer dans le fond de la Conférence. C’est la marque de fabrique de la maison, une stabilité exceptionnelle permise par une gestion intelligente. Après quatre années sans goûter aux joutes de post-season, le Jazz est attendu de pied ferme l’an prochain. Le groupe qui a échoué à se qualifier à 2 matchs près est prêt à passer un cap : les jeunes jouent ensemble depuis longtemps et progressent d’année en année, le coach Snyder a établi une rigueur défensive d’élite et enfin ils sont parvenus cet été à ajouter trois précieux vétérans à leur effectif. Et puis avouez, ça serait le feu de voir Babac enrhumer LaMarquise Aldridge au poste en Playoffs…

Source image : allthatjazzbasketball.blogspot.com


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