Le mariage raté entre Carmelo Anthony et les Knicks : il est temps de divorcer et quitter New York

Le 14 mai 2016 à 19:40 par David Carroz

Carmelo Anthony New York Knicks

Ces dernières semaines, Carmelo Anthony a laissé paraitre son mal-être suite à une nouvelle saison sans Playoffs. La troisième consécutive, alors qu’il avait été de toutes les campagnes printanières lors de son séjour aux Nuggets. Une situation qui le frustre forcément. Et même si son mécontentement lié à la faible influence que lui donne Phil Jackson concernant le recrutement du futur coach des Knicks se fait moins entendre depuis quelques jours, il n’en demeure pas moins qu’il existe un malaise entre la direction et Melo. Et la sensation qu’il est temps de se séparer entre les deux parties, un peu plus de cinq saisons après leur rapprochement. Sur un sentiment d’échec.

Melo a débarqué en cours de saison 2011 pour faire passer un palier aux Knicks et les rapprocher d’un titre. On en est bien loin aujourd’hui, et les reproches fusent régulièrement pour critiquer Carmelo Anthony. Soliste, pas assez altruiste, scoreur mais pas leader, franchise player en bois. Certains allant même jusqu’à laisser entendre que sa femme aurait un goût de Cheerios. Pardon, on s’égare. Mais une chose est sûre, c’est que l’ailier a certainement tout entendu à son sujet et qu’il est pointé du doigt au moment de faire le bilan des Knickerbockers ces dernières saisons. Il faut dire qu’en choisissant de gratter un contrat maousse à Big Apple, préférant gonfler son porte-feuille au lieu de son armoire à trophée, il a pris un chemin dangereux. Et le pari, s’il s’avère payant pour son banquier, l’est beaucoup moins pour son image ou sa carrière. À bientôt 32 piges, ce n’est pas bon signe.

Pourtant l’alliance n’était pas si dégueulasse, du moins au début. Les Playoffs étaient au rendez-vous et en 2013, Carmelo Anthony menait les pensionnaires du MSG à un bilan de 54 victoires pour 28 défaites (deuxièmes à l’Est), du jamais vu depuis l’époque Pat Ewing. Pour couronner le tout, l’ancien de Syracuse terminait même meilleur scoreur de la Ligue. Tout ça pour se faire sortir par les Pacers en demi-finale de Conférence et régresser depuis. Et ce n’est pas l’arrivée de Phil Jackson dans l’organigramme des Knicks qui a remis les choses dans l’ordre. Au contraire, on a donc l’impression que celui-ci, bien qu’ayant offert beaucoup d’argent à son joueur, ne compte pas sur lui. Ou du moins ne lui accorde pas l’importance que son statut et son salaire pourraient lui conférer. Un détail de plus dans l’histoire d’amour ratée entre Melo et la franchise de son cœur, mais qui semble aujourd’hui être la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Même si les deux hommes se plaisent à assurer que l’avenir se situe à Big Apple pour Carmelo Anthony, les derniers propos de monsieur LaLa Vasquez ne sont plus aussi tranchés et affirmatifs.

Quelle est la définition de succès pour nous en tant que New York Knicks ? Je pense que c’est la question que l’on doit se poser en tant qu’organisation dans son ensemble. Retourner en post-season, c’est le succès pour moi. Et pas seulement entrouvrir la porte pour y être et chopper le huitième spot. Ce n’est pas le succès pour moi. Etre là, avec une certaine notoriété, avoir une chance d’être compétitif pour accéder au tour suivant et même plus, c’est cela le succès pour moi.

La seule chose à laquelle je pense est gagner plus. Que ce soit ici ou ailleurs, c’est la seule chose à laquelle je pense. Je n’ai pas réfléchi à m’engager dans une autre équipe. Je n’ai pas pensé à moi dans une autre équipe. Jamais. Mon cheminement de pensée est, comment améliorer la situation ? Que pouvons nous faire pour améliorer cette situation ? C’est la seule chose à laquelle je pense.

Simple discours de façade pour tenter de mettre la pression à sa franchise ? On peut en douter. Certes, Carmelo Anthony a souvent fait preuve d’égoïsme dans sa carrière. Sur le parquet, comme tout scoreur qui se respecte, et parfois en dehors en grattant de gros chèques. Mérités cependant. Mais avec l’âge, la maturité vient et voir que ses collègues de promo ont raflé quelques titres pendant que lui galère désormais doit forcément trotter dans sa tête. À se demander ce qu’il pourrait faire de mieux pour enfin connaitre cette réussite collective. Et aujourd’hui, il a du mal à imaginer que cela puisse se produire à New York, à son grand dam tant il est attaché à Big Apple. Mais comment en est-on arrivé là ? Un joueur majeur – malgré ses défauts – qui compte briller avec la franchise de sa ville natale. Equipe qui se trouve dans un gros marché donc forcément attractive, avec une salle exceptionnelle et des fans bouillants. Et là, l’association fait un flop monumental. Certains diront que cela n’a rien de surprenant, car Melo n’a pas les épaules pour être le taulier d’une équipe. Facile de lui mettre encore cela sur le dos. D’autres se rappelleront que dès le début, l’histoire d’amour était bancale. Non pas que les deux tourtereaux, Carmelo et NY, ne s’aimaient pas, bien au contraire. Mais les Knicks ont lancé la relation sur de mauvaises bases pour qu’elle puisse être synonyme de réussite.

Souvenez-vous, saison 2010-2011. Le contrat de Carmelo Anthony aux Nuggets va toucher à sa fin et tout le monde s’accorde à dire qu’il ne restera pas dans le Colorado lors de la free agency. Son coeur est déjà à New York. Les rumeurs de trade reviennent avec insistance et finalement, au lieu d’attendre le marché estival, les Knicks envoient Danilo Gallinari, Wilson Chandler, Raymond Felton, Timofey Mozgov et un premier tour de Draft aux Nuggets pour faire venir Melo. Soit tous les soldats ou presque qui auraient été le supporting cast du troisième pick de la Draft 2003. Peur de se le faire griller ? Manque de confiance ? Quoiqu’il en soit, cette précipitation au lieu de préparer une offre en juillet qui aurait permis de signer Carmelo Anthony tout en restant compétitif sur le plus long terme a malheureusement fixé de mauvaises bases qui se paient aujourd’hui. Si pendant deux ans et demi le couple a pu sauver les apparences, les lacunes se sont faite sentir dès 2013. Les Knicks – et Melo aussi certainement – voulaient gagner tout de suite, et ils n’ont pas pris le temps de construire un foyer solide pour vivre ensemble. Si bien que dès que les vétérans qui apportaient un peu de sérénité sont partis, la relation a paru moins stable. Les défauts de Carmelo Anthony sont ressortis au grand jour, tout comme ceux dans l’organisation de la franchise.

C’est alors que le couple a fait appel à un psy pour remettre de l’ordre et retrouver la joie de vivre ensemble. Avoir de nouveau des projets communs et se rappeler cette étincelle qui avait poussé Melo dans les bras des Knicks. Le médecin choisi est réputé et on attend beaucoup de lui. Bien trop d’ailleurs, car au lieu de rapprocher les uns et les autres, il a surtout creusé le fossé. Ancré dans ses principes, Phil Jackson n’a pas remis de l’ordre entre Melo et les Knicks. Non, il façonne la franchise et son jeu à son image. Du moins il essaie, sans se soucier du bien être de sa star ou de l’évolution de la Ligue. En lui offrant 124 millions en 2014, il n’a pas oeuvré pour le bien de Melo, ni des Knicks. Il est rare qu’un joueur aille de lui-même demander à sa franchise de réduire son salaire. C’était au Zen Master de faire rentrer cette idée dans la tête de l’ailier afin de renforcer au mieux l’équipe. Au lieu de cela, il a posé une rustine pour que l’ancien de Syracuse se sente mieux à l’instant T, sans vision sur le long terme pour le couple. Et depuis, les choix sportifs restent souvent des énigmes, à tel point qu’on se demande vraiment dans quelle direction veut aller Phil Jackson. Non, le Triangle n’est pas une réponse, en tout cas pas sérieuse ni suffisante.

Aujourd’hui, cela se paie cash. Tant et si bien que cet été, Carmelo Anthony pourrait bien envoyer les papiers du divorce et on ne serait pas surpris que Phil Jackson les signe en montant un échange. Si Melo dispose toujours de sa clause lui permettant de refuser un trade, rien ne garantit maintenant qu’il l’utilisera à tout prix. La free agency sera déterminante et il observera les mouvements orchestrés par Phil Jax. Autant dire que cela n’a pas bien commencé concernant la recherche du coach. On attend – tout comme Carmelo Anthony – de voir qui prendra finalement en main les hommes de Big Apple. Mais aussi qui seront ces hommes. Car il faudra se renforcer sur le parquet pour être compétitif, l’année d’expérience supplémentaire de Kristaps Porzingis ne fera pas tout. Sauf que lorsqu’on regarde les agents-libres, il n’y a pas tant de monde que cela. Et surtout, on se demande qui sera prêt à tenter le challenge new-yorkais, aucune garantie sportive ne pouvant appâter le chaland, la notion de “big market” ne faisant plus autant rêver que par le passé. Et comme New York ne dispose pas d’un cap space énorme non plus (septième plus grosse masse salariale de prévue si Afflalo et Derrick Williams ne mettent pas fin à leur contrat), on ne voit pas une grosse marge de manoeuvre. Pas de quoi donner à envie à Carmelo Anthony de poursuivre et de tenter de recoller les morceaux avec New York, n’en déplaise à LaLa.

Voilà pourquoi un divorce est dans l’air du temps. Melo a montré cette saison qu’il pouvait s’effacer. Si sa moyenne de points est la plus faible depuis son année sophomore, c’est aussi parce qu’il n’avait jamais pris aussi peu de tirs depuis cet exercice 2004-2005. À l’inverse, ses 4,2 passes sont un record en carrière, et ses 7,7 prises son second meilleur total. Une preuve qu’aujourd’hui, Carmelo Anthony est moins croqueur et plus tourné vers le collectif pour gagner ? Son attitude sur le parquet semble l’indiquer. Reste à savoir qui en profitera lors des prochaines années : les Knicks ou de nouveaux prétendants qui viendront mettre fin à ce mariage ? Une aubaine pour Melo qui pourrait jouer pour un contender, mais aussi pour les Knicks qui pourraient reconstruire autour d’un vrai leader. Kristaps, on espère que tu as les épaules solides.

Source image : @TheBigD05