Bulls 95/96 – 72 victoires pour l’histoire : Ron Harper, le slasher devenu défenseur et coéquipier modèle

Le 27 nov. 2015 à 19:07 par Alexandre Martin

Ron Harper chicago bulls 1996 72-10

1995-96, les Bulls entrent dans la légende. Avec 72 victoires en saison régulière et le titre au bout, ils ont tatoué un énorme Taureau sur la peau de la NBA. 20 ans plus tard, TrashTalk vous propose une série d’articles pour célébrer ce parcours d’exception.

Quand les Bulls signent Ron Harper – alors agent-libre et dans la ligue depuis 8 ans – en septembre 1994, c’est tout d’abord pour tenter de remplir l’immense espace laissé vide au poste 2 par le premier départ en retraite de Michael Jordan un an plus tôt. A Chicago, Harper va découvrir un rôle très différent de ce qu’il a connu auparavant, un rôle qu’il va épouser parfaitement au cours des saisons qui suivirent.

Pour bien comprendre d’où vient Ron Harper, comment il va se fondre dans le collectif si fort des Bulls en y apportant un écot considérable et ainsi devenir une des pièces essentielles de ces 72 victoires amassées sur l’exercice 95-96, il faut s’intéresser à sa carrière depuis le début. Ronald “Ron” Harper est né à Dayton dans l’Ohio. Il y a fait son lycée puis est allé à la Miami Université d’Oxford dans… l’Ohio. C’est donc tout naturellement que les Cavaliers ont drafté cet enfant du pays en 8ème position en 1986, d’autant que l’ami Harper montrait déjà de sacrées aptitudes sur les parquets NCAA. D’ailleurs, en trois saisons et demie à Cleveland, il a confirmé son talent offensif. Du haut de ses 198 centimètres et depuis le poste d’arrière, Harper était un shooteur moyen mais un slasher pur, un finisseur doué près du panier qui savait parfaitement prendre le moindre espace que les défenses lui laissaient pour filer vers le cercle. Ainsi, dès son sixième match NBA, il a franchi la barre des 30 points et il fait même partie des rookies ayant passé celle des 40 points. Et comme en plus il ne se préoccupait pas que du scoring mais participait au rebond, à la création tout en étant un sérieux chapardeur de ballon, Ronald finit sa première saison avec des moyennes très impressionnantes pour un nouveau venu : quasiment 23 points, accompagnés de 4,8 rebonds, 4,8 passes décisives, 2,5 interceptions et 1 contre de moyenne en un peu plus de 37 minutes de jeu ! Croyez-le ou non, il n’a pas été élu rookie de l’année même avec de telles statistiques. L’honneur est revenu à Chuck Person qui, il faut le reconnaître, avait envoyé du lourd également avec les Pacers.

Sur ses huit premières saisons, chez les Cavaliers donc puis chez les Clippers (de 1989 à 1994), Harper a découpé des défenses et même s’il a régulièrement été obligé de délaisser les parquets pour squatter l’infirmerie – notamment à cause de chevilles ou de genoux fragilisés par plusieurs entorses – il a proposé quelque chose comme 19 points, 5 rebonds, 5 assists et 2 interceptions sur cette période. C’est du sérieux, ce sont des stats à la Brandon Roy par exemple… Mais pourtant au cours de ces années, collectivement, ce ne fut jamais l’extase pour Ron. Jamais il n’a passé le premier tour de Playoffs (quatre campagnes) même si ces moyennes statistiques restaient à peu près identiques en post-season. Voici certainement la raison principale qui l’a poussé à rejoindre les Bulls à l’aube de la saison 1994-1995, sachant pertinemment que son rôle ne serait plus le même. Lors ce premier exercice avec les Taureaux, Harper joue toujours arrière aux côtés de B.J. Armstrong le sniper mais la balle est le plus souvent dans les mains de Scottie Pippen ou de Toni Kukoc qui – en l’absence de Jordan – sont respectivement devenus patron et lieutenant de ces Bulls amoindris mais toujours compétitifs. Et pour une fois, ce bon Ronald va découvrir le goût d’une demi-finale de Conférence. Pas plus cependant malgré le retour du big boss en toute fin de saison…

Mais Harper y a pris goût et quand, à l’aube de la saison 1995-1996, Phil Jackson lui explique qu’il compte sur lui en tant que titulaire à la mène – puisque “Mike” va récupérer son poste d’arrière et qu’il n’est pas trop question de lui demander de s’asseoir sur le banc – et qu’il attend de lui un apport bien spécifique, Ron va accepter sans hésiter. Il va même prendre très à cœur ce nouveau rôle car il a bien compris que cela pouvait l’emmener très loin, très haut. A partir de là, celui qu’on surnomme “Hollywood” va modifier drastiquement son jeu. Il va devenir, en très peu de temps, un défenseur craint dans le périmètre car sa taille, sa longueur de bras et sa mobilité sont de vrais soucis pour les meneurs de la ligue. Il intercepte, prend du rebond et met une grosse pression mentale sur son adversaire direct qu’il travaille au corps et souvent à fond étant donné que son temps de jeu moyen est autour des 24 minutes. Et puis, Harper était un vrai Taureau dans l’âme, pas du genre à baisser les yeux devant un Knick, un Pacer ou tout autre “ami” de l’époque. Une attitude qui lui vaudra d’ailleurs une vraie connexion sur et en dehors des parquets avec Dennis Rodman et le respect de tous les fans de “Windy City” qui adorent clairement son dévouement pour la cause Bulls. Harper n’était pas ce qu’on appelle un bon perdant – il nous l’a rappelé récemment – il détestait perdre même et c’est aussi sûrement pour ça qu’il a épousé avec autant de passion et d’envie ce rôle qui l’a condamné au niveau stats (7,4 points par match en 95/96) mais qui l’a couvert de bagues et lui a permis d’être un des hommes de bases de cette équipe de Chicago qui a marché sur la ligue lors de cette saison et les deux suivantes.

Les grandes équipes ont besoin de stars les plus performantes possible mais elles ne peuvent être véritablement efficaces et dominatrices que si ces joueurs qui attirent la lumière donnent le meilleur d’elles-mêmes tout en étant entourées de gars ayant parfaitement compris les tâches qu’ils doivent accomplir pour gagner. Jordan était le patron, Pippen le lieutenant de luxe, Rodman le fou avide de rebonds et de gros défis sous le cercle, Kukoc le sixième homme au talent immense et Harper lui, était LA pièce parfaite pour accompagner “Mike” dans les lignes arrières faisant ainsi de ce backcourt le plus difficile à attaquer de toute la NBA… et pas simple à défendre non plus !

Ron Harper n’est que trop rarement cité quand il s’agit d’évoquer les 72 victoires de Chicago cette saison-là tout simplement parce que les boxscores ne peuvent pas retranscrire l’impact infernal qu’il a eu sur tous les meneurs qui l’ont croisé. Les stats ne peuvent pas répercuter la fatigue physique et mentale ressentie par les Penny Hardaway, Mark Jackson, Terrell Brandon ou autre Tim Hardaway lorsqu’ils ont eu à affronter l’ami Ronald. Elle était là aussi la force de ces Bulls, dans ces gars de l’ombre qui mettaient les mains dans le cambouis sans rechigner et qui était prêts à tout laisser sur le parquet du moment que la victoire était au bout…

Petit mix sur le bonhomme…

Dans la même série, articles précédents :

Bulls 95/96 – 72 victoires pour l’histoire : Nick Anderson et le Magic réveillent les prédateurs

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Source image : montage par @TheBigD05 pour TrashTalk


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