L’arbitrage sur France – Espagne : le petit arbre qui cache l’énorme forêt d’erreurs françaises

Le 18 sept. 2015 à 20:04 par Nicolas Meichel

Comme souvent dans les matchs à enjeu qui se jouent sur des détails, l’arbitrage est dans le collimateur des perdants qui cherchent un potentiel coupable pour expliquer leur défaite. C’est classique, et c’était une nouvelle fois le cas hier avec des Bleus frustrés par un traitement particulier réservé à Pau Gasol. Pourtant, ce ne sont pas les arbitres qui ont laissé filer un avantage de 11 points en deuxième mi-temps…

De Vincent Collet à Rudy Gobert en passant par Nicolas Batum, certains membres de l’Équipe de France n’ont pas été tendres avec les hommes au sifflet hier soir. Immédiatement après la défaite, ces derniers ont été critiqués par rapport aux nombreuses fautes accordées aux Espagnols et notamment à Pau Gasol, qui a posé sa tente sur la ligne des lancers francs (18 tentatives au total) dans cette demi-finale dont le finish nous reste toujours en travers de la gorge. Pour le coach des Bleus, “l’arbitrage a maintenu l’Espagne en vie grâce aux nombreux cadeaux qui ont été accordés” tandis que le pivot du Jazz a carrément déclaré texto que c’était “difficile de jouer face à quelqu’un qui peut te toucher mais que tu n’as pas le droit de toucher”. Quant à Nico, même son de cloche que chez son pote Rudy, puisqu’il a lui aussi mis en avant le “favoritisme” qui aurait été accordé à Gasol (il a nuancé ses propos depuis), empêchant ainsi la France de “défendre correctement sur lui”. Bref, les Tricolores l’avaient mauvaise et on sentait vraiment leur frustration et leur agacement concernant les arbitres suite à la rencontre. Alors évidemment, les réactions à chaud sont toujours à prendre avec des pincettes et on imagine que le scénario et le contexte du match ont beaucoup joué dans l’expression de ce “ras-le-bol”, mais le moment était peut-être mal venu pour se plaindre lorsqu’on sait que les Français ont laissé échapper une victoire qui leur tendait les bras.

Bon ou mauvais arbitrage, les Bleus n’avaient en effet pas le droit de perdre les 11 points d’avance qu’ils avaient accumulés dans le troisième quart-temps. Alors oui, les trois mecs en noir n’ont pas été irréprochables et Pau Gasol a eu quelques calls de superstar contrairement à Tony Parker, mais l’essentiel est ailleurs. Si la France est aujourd’hui éliminée de son championnat d’Europe, c’est avant tout parce qu’elle a fait de la m*rde lorsque la température a augmenté. Quand on a le match en main devant 27 000 personnes au taquet et qu’on est incapable de le tuer, c’est un peu fort de café de se regrouper derrière les arbitres, même si c’est une réaction humaine qui se manifeste sur le coup et qu’on a un Gasol intouchable en face. En d’autres termes, les Bleus sont presque passés pour des pleureuses auprès de certains, étant donné qu’ils sont les premiers responsables à regarder dans leur miroir afin de tenter d’expliquer cette défaite.

Concrètement et sportivement parlant, on peut pointer du doigt leur incapacité à s’adapter à la défense de zone espagnole, qui a complètement cassé le rythme des Français en attaque. Sur les dernières minutes de la rencontre, les hommes de Vincent Collet ont clairement déjoué et il n’y avait plus aucune fluidité dans le jeu. D’ailleurs, parlons-en, du coach qui a proposé trop peu d’ajustements défensifs concernant Pau Gasol alors que ce dernier faisait un véritable carnage dans la raquette. Alors oui, Rudy Gobert peut le mettre en difficulté en un-contre-un et il a su montrer une belle discipline dans la gestion de ses fautes, mais on imagine qu’il n’aurait pas refusé un peu d’aide hier soir, même sur les replis défensifs légers qui ont permis à l’Espagnol d’obtenir des points faciles. Ensuite, on peut parler également de la rotation limitée mise en place par Vincent, lui qui a beaucoup utilisé son cinq majeur alors que le banc des Bleus avait souvent réussi à faire la différence depuis le début de l’Euro. Joffrey Lauvergne ? 15 minutes de jeu seulement. Mickaël Gelabale ? 17 minutes, alors qu’il foutait un beau bordel. Evan Fournier et Florent Pietrus ? 6 minutes chacun à peine. Sans oublier de mentionner aussi Charles Kahudi, vissé au banc sur ce match. En bref, même s’il est toujours facile de jouer au directeur d’école après la rencontre, certains choix sont contestables et l’issue aurait peut-être été différente si Collet avait pris d’autres décisions, plus osées et axées sur son banc. D’ailleurs, impossible de ne pas mettre en avant les nombreux lancers-francs ratés ainsi que les mauvaises performances des leaders Tony Parker et Boris Diaw, eux qui sont passés un peu au travers de leur demi-finale. Le premier s’est montré maladroit en attaque et dépassé en défense par Sergio Rodriguez, tandis que le second n’a pas réussi à peser sur le jeu comme il a l’habitude de le faire. Concernant la ligne et la réussite de certains, ce n’est pas pour rien qu’on nous force toute notre enfance à enchaîner les lancers à la fin d’un exercice, c’est aussi pour les rentrer dans les grands moments. On pourrait continuer ainsi et du coup jouer aux entraîneurs spécialisés, mais il n’y a qu’une conclusion qui pourrait et devrait être retenue : tous ces points-là, hélas, n’ont pas grand chose à voir avec l’arbitrage et ont pesé bien plus sur la rencontre.

Évidemment, la déception des joueurs de l’Équipe de France est compréhensible et tout le camp tricolore était frustré de voir Pau Gasol passer son match sur la ligne des lancers francs. Mais est-ce là une raison valable pour critiquer en premier lieu les arbitres et expliquer en partie la défaite ? Vous valez, pouviez et auriez dû faire tellement mieux que ça les gars…

Source image : AP Photo


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