Andre Iguodala : un sacrifice au service du collectif

Le 23 nov. 2014 à 21:38 par Benoît Carlier

Arrivé en Californie à l’été 2013 après avoir subi la loi des Warriors au premier tour des PlayOffs avec Denver, Andre Iguodala s’est tout de suite révélé comme un des tauliers du collectif de Golden State. Relégué sur le banc depuis le début de la saison, le natif dans Springfield dans l’Illinois n’en reste pas moins l’un des principaux moteurs du groupe de Steve Kerr. Et si c’était ça le prix du succès pour les Warriors ?

Le sujet d’une expérience singulière…

Le 29 octobre 2014, Andre Iguodala débute un match sur le banc pour la première fois de sa carrière professionnelle. Une décision qui revient à Steve Kerr, le coach rookie des Warriors, cinq fois champion NBA en tant que joueur avec les Chicago Bulls puis les Spurs de San Antonio. Dans un effectif relativement similaire à celui de la saison dernière, c’est évidemment le changement le plus important par rapport à l’équipe alignée par Mark Jackson en 2013-2014. Joueur à tout faire, le swingman est d’abord réputé pour sa défense et appartenait à la All-NBA Defensive First Team l’an dernier. Mais Andre Iguodala est également très habile au tir et n’hésite pas à prendre ses responsabilités en fin de match, comme face au Thunder ou contre Atlanta la saison dernière. Après un mois de compétition, il tourne à 6,8 points, 3 rebonds, 2,5 assists et 1 interception de moyenne en 11 matches. Des statistiques en nette baisse si on les compare à celles des saisons précédentes, mais qui reflètent un état d’esprit exceptionnel de la part d’un des joueurs les plus sous-estimés de la ligue.

En acceptant de sortir du banc, « Iggy » offre à Steve Kerr tout un champ de nouvelles possibilités. Grâce à ses qualités de playmaker qu’il a pu développer lors de ses années à Philadelphie, Andre Iguodala permet de soulager Shaun Livingston et Leandro Barbosa dans le domaine de la création au sein du second unit. Il représente une menace constante pour les défenseurs adverses et parvient toujours à trouver ses coéquipiers sur des passes inspirées, même dans le petit périmètre. Ses qualités athlétiques lui permettent d’être très performant de l’autre côté du parquet et il apporte cette rigueur défensive qui pouvait manquer aux Warriors par le passé. C’est typiquement le genre de joueur dont l’impact n’apparaît pas seulement dans les lignes de stat traditionnelles. Plus qu’un remplaçant de luxe, Andre Iguodala est un véritable meneur d’hommes. Commencer les matches en survêtement ne fait pas partie de sa nature et il va devoir se battre avec son égo pour donner son maximum au quotidien. Ce n’est jamais évident pour un joueur qui avait pris l’habitude d’être starter depuis près de 10 ans (758 matches exactement), surtout que Steve Kerr admet facilement qu’il n’en est encore qu’au stade des expérimentations. À 49 ans, l’ancienne voix de la célèbre chaîne cryptée TNT effectue ses grands débuts dans le coaching. Il faisait part de ses doutes à la veille du lever de rideau de cette saison 2014-2015.

« Il était peut-être notre meilleur joueur, surtout sur les deux dernières semaines. C’est le joueur qui a le plus d’impact dans l’équipe depuis le début des scrimmages. Ces dernières semaines, c’est lui qui décidait quel camp allait gagner en fonction du côté dans lequel il jouait. De ce point de vue, vous pouvez me traiter d’idiot. S’il est vraiment mon meilleur joueur et que je ne le fais pas commencer, peut-être suis-je celui qui a tort. L’argument est tout à fait recevable. »

… qui dispose toujours de la confiance de son coach

Source : Noah Graham -Getty Images

Source : Noah Graham – Getty Images

D’un point de vue statistique tout d’abord, Andre Iguodala subit une chute notable dans tous les compartiments importants du jeu et ce n’est pas seulement dû à la réduction de son temps de jeu. Entouré de coéquipiers plus faibles, « Iggy » attire davantage l’attention des défenseurs et force légèrement son shoot en ce début de saison (il tire à 45,5% dont 32% derrière l’arc). Mais son sacrifice a permis à Harrison Barnes de poursuivre sa progression entamée un an plus tôt, lorsqu’il était devenu le facteur X des Warriors pendant les PlayOffs de 2013. De nouveau titulaire, le produit de North Carolina a repris confiance malgré un temps de jeu assez similaire à la saison dernière (29,6 minutes contre 28,3 en 2013-2014). On sent le 7ème pick de la Draft 2012 nettement plus impliqué depuis qu’il est repassé « devant » Andre Iguodala dans la rotation des Warriors. Il tourne à 12 points, 5,5 rebonds et 1,5 passes par match et participe au festival à 3-points de son équipe grâce à une adresse qu’on ne lui connaissait pas (44,8% from downtown) qui prouve ce net regain de motivation depuis le début de la saison. Mais comme beaucoup de joueurs aiment à le préciser, ce qui est plus important encore que de commencer un match sur le terrain, c’est d’être présent dans le money time, moment pendant lequel Andre Iguodala est toujours privilégié à Harrison Barnes. Ce dernier basculant alors au poste 4 face à des formations de petite taille ou étant carrément relégué sur le banc. Si ce cas de figure ne s’est pas encore beaucoup présenté pour Golden State jusqu’à présent, « Iggy » était bel et bien sur le parquet lors de la dernière minute décisive de la victoire face à Portland (95-90) ou pour verrouiller les succès contre Houston (98-87) et Brooklyn (107-99). Preuve supplémentaire de ce statut privilégié que détient Andre Iguodala, son coach l’a assis sur le banc pour les six dernières minutes du match face à Utah vendredi dernier, alors que la victoire était déjà assuré pour la Dub Nation. Harrison Barnes, lui, a vécu le garbage time sur le terrain.

Sous contrat avec les Warriors jusqu’en 2017, Andre Iguodala fait toujours partie des plans d’avenir de la franchise californienne. Il a même été nommé capitaine de l’équipe par Steve Kerr, en collaboration avec Stephen Curry, pour lui prouver combien le club apprécie son attitude.

« Le sacrifice qu’il a fait pour cette équipe symbolise l’état d’esprit de ce groupe. Si nous voulons gagner parmi l’élite, il faut savoir se sacrifier. Andre en est le plus bel exemple en acceptant son nouveau rôle. » – Steve Kerr.

Un effort que ne cache pas Andre Iguodala, qui envisageait probablement cette saison autrement avant le training camp des Warriors au mois d’octobre.

« C’est une sorte de sacrifice. Parfois, vous voulez être égoïste et avoir vos shoots. Vous voulez être sûr d’avoir vos minutes de jeu. Nous sommes tous humains. Parfois je préfèrerais faire ceci ou cela, mais en tant que capitaine je passe outre en me concentrant sur nos véritables objectifs. »

Un sacrifice qui s’avère payant pour le moment, les Warriors profitant de la relative stabilité de leur effectif pour jouer les premiers rôles de la conférence Ouest, juste derrière Memphis, grâce à un bilan de 9 victoires pour 2 défaites dont des succès importants face à Portland, contre les Clippers et à Houston notamment.

Leader dans l’âme, Andre Iguodala a su mettre son égo de côté pour le bien de l’équipe. Le sixième homme des Warriors commence seulement à s’acclimater à un rôle encore tout nouveau pour lui. Malgré des statistiques qui diminuent, « Iggy » reste une valeur sûre de l’effectif de Steve Kerr et continue d’avoir un impact énorme sur le jeu par son sens du sacrifice et ses qualités de basketteur uniques, notamment en défense. Il ne faudra pas s’étonner en fin de saison si Golden State fait trembler les plus grosses écuries de la conférence Ouest. Et « Dédé » y sera probablement pour beaucoup.

Source : CSN Bay Area

Source image : Montage via Getty Images


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