Défaut d’utilisation : Taj Gibson trop fort pour le banc des Bulls ?

Le 02 nov. 2014 à 22:00 par David Carroz

Avec Joakim Noah, Pau Gasol, Taj Gibson et Nikola Mirotic, Tom Thibodeau a des problèmes de riches pour composer son frontcourt. Si le rookie espagnol part clairement avec une longueur de retard sur les 3 autres – tout en passant avant Nazr Mohammed et Cameron Bairstow – Thibs va devoir faire des choix dans la raquette. Pour l’instant, les choses sont claires : ‘Jooks’ et Pau sont les titulaires, Taj Gibson est le 6ème homme. Un rôle suffisant pour l’ailier-fort de 29 ans ?

J’ai deux joueurs qui méritent de commencer les matches. – Tom Thibodeau.

Cette phrase, pourtant prononcée la saison dernière au sujet de la concurrence entre Boozer et Gibson reste d’actualité. Si le barbu a quitté le navire en étant amnistié par les Bulls, il a été remplacé par Pau Gasol, signé lors de la free agency. Pourtantde nombreux observateurs imaginaient l’intérieur issu de l’Université de Californie du Sud enfin redevenir titulaire après sa saison rookie en 2009-10 (70 matches débutés dans le 5 majeur sur ses 82 joués). Cette année-là, il avait tourné à 9 points à 49%, 7,5 rebonds et 1,3 contre en un peu moins de 29 minutes pour les Bulls. Mais déjà âgé (24 ans à la Draft), il semblait destiné à un rôle de remplaçant ou d’energizer pour l’avenir. D’où le recrutement du lot de consolation du margé estival 2010 avec Boozer.

Sauf qu’après 4 saisons à grappiller du temps de jeu et des responsabilités au détriment de Carlos Boozer, le statut de Taj Gibson a bien changé aux Bulls. S’il terminait les matches la saison dernière, ce n’est pas seulement car il défendait mieux que “Boozi-Boozi”, mais aussi parce qu’offensivement ses progrès ont été immenses depuis ses débuts en NBA. L’an dernier, le second derrière Jamal Crawford pour le titre de meilleur sixième homme de la ligue affichait 13 points à 47,9%, 6,8 rebonds et 1,4 contre en 28,7 minutes. Ramenées à 36 minutes, cela revient à 16,5 points, 8,5 rebonds et 1,7 contre. Des stats qui n’auraient pas grand chose à envier à celles d’un Serge Ibaka par exemple. Bien sûr, il est encore loin de prétendre concurrencer des joueurs tels que Blake Griffin ou LaMarcus Aldridge. Mais il n’en demmeure pas moins l’un des meilleurs ailiers forts des deux côtés du parquet.

Pourtant les Bulls ont décidé de faire venir Pau Gasol cet été, alors que Joakim Noah et Taj Gibson se voyaient déjà rejoints par Nikola Mirotic dans la raquette et que le vétéran Nazr Mohammed prolongeait aussi son bail dans l’Illinois. De son côté, l’Espagnol avait aussi d’autres propositions, entre autres des Lakers, des Knicks, des Spurs, du Thunder ou encore du Heat. La raison de son choix ? Être dans une équipe qui a le calibre pour jouer le titre. Et celle de la proposition des Bulls ? Signer un joueur qui a le calibre pour jouer le titre. Bref, chacun cherchait l’autre pour la même raison. De quoi rendre facile l’intégration de Gasol ?

Et bien non, car comme précisé avant, avec Noah et Gibson dans les parages, attention à l’embouteillage. Tom Thibodeau en a bien conscience, et il n’hésite pas à aborder le problème pour rassurer le trio à chaque occasion, précisant qu’il considérait chacun d’eux comme un titulaire et que les trois pouvaient finir les matches. Sauf qu’ils ne pourront pas le faire ensemble. Ils devront donc savoir se sacrifier pour le bien de l’équipe.

Il y aura des fois où Pau pourra être sur le banc, où Taj pourra être sur le banc, où Jo pourra être sur le banc, ils doivent faire passer l’équipe en premier. Quand ils sont sur le terrain, faire tout ce qu’ils peuvent pour aider, et quand vous n’y êtes pas alors encourager vos partenaires, savoir ce qu’il se passe sur le terrain, être un bon coéquipier. Et nous avons toujours eu un excellent état d’esprit ici, et je pense que le mérite en revient au leadership de nos principaux joueurs du noyau qui sont ici. – Tom Thibodeau.

Taj Gibson fait d’ailleurs partie de ces joueurs dont l’état d’esprit est irréprochable. Toujours pro et dévoué pour le collectif, il n’a jamais hésité  à dénoncer les rumeurs qui l’annonçaient mécontent de son statut de sixième homme, insistant sur l’importance de l’équipe. Finalement, tout l’inverse d’un Pau Gasol qui réclame ses minutes en fin de match.

J’aime être sur le parquet quand le match est en jeu. C’est ce pourquoi j’ai été payé toute ma carrière.

Ce n’est pas bon signe quand tu es dans cette position (d’être sur la banc en fin de match) parce que le coach ne te fait pas confiance pour contribuer lors de ces minutes. Donc basiquement il ne te fait pas confiance. Il fait confiance en quelqu’un d’autre pour faire le job. Donc ce n’est pas un bon signe pour toi. – Pau Gasol.

L’honnêteté est une qualité, mais dans un collectif comme celui des Bulls, une telle façon de penser ne peut-elle pas poser de problèmes ? En tout cas, la gestion du temps de jeu et le l’égo de Pau Gasol, tout comme ceux de Taj Gibson, par Tom Thibodeau sera un des éléments prépondérants de la réussite des Bulls cette saison. En effet, malgré son état d’esprit irréprochable, rien ne garantit que Taj Gibson accepte de voir son rôle diminuer lui qui était le meilleur joueur chicagoan lors des derniers quarts-temps l’an dernier (de l’aveu même de Tom Thibodeau).

À 29 ans, il est dans les plus belles années de sa carrière. Continuer en tant que remplaçant ne l’enchante plus forcément, même s’il ne fera sûrement pas de vague pour le bien de l’équipe. Mais il faudra se méfier de son attitude sur le parquet, lorsqu’il recevra la balle en attaque, à ce qu’il ne cherche pas à trop en faire pour impressionner son coach et gagner des minutes. Ni lui ni les Bulls ne seront gagnants si la frustration gagne l’intérieur et que cela se ressent lors des matches. Jouer lors des derniers quarts était une des raisons qui lui permettaient d’accepter son rôle de 6ème homme. Qu’en sera-t-il si les minutes du money time diminuent pour lui ?

Actuellement, la question ne s’est pas posée. Très en jambe lors de la victoire facile des Bulls face à New York (22 points à 10/12, 8 rebonds), Taj Gibson a été plus en retrait face à Cleveland, légèrement touché à la cheville (10 points à 5/9, 3 rebonds) et ménagé face aux Wolves. Il n’empêche qu’aujourd’hui, à moins que Pau Gasol ne retrouve son meilleur niveau, le joueur né à Brooklyn mérite de finir. Meilleur défenseur, la différence de niveau offensivement entre les deux joueurs ne justifie pas de privilégier l’Espagnol. Pau sera-t-il prêt à l’accepter comme Carlos Boozer a pu le faire, c’est-à-dire sans élever la voix malgré la frustration ?

Une chose est sûre, après l’état de santé des troupes, le plus grand défi de Tom Thibodeau sera de maintenir Pau Gasol et Taj Gibson heureux et performants sur le terrain. S’il a toujours été un maitre pour tirer le meilleur de ses joueurs en les poussant à tout donner, il va devoir se montrer fin psychologue pour éviter les drames. Dans son entreprises, les succès sur le parquet seront autant d’atouts pour le conforter dans ses choix et pour maintenir une atmosphère positive au sein de l’équipe.

Taj Gibson arrive à un tournant de sa carrière. Excellent coéquipier, il a atteint aujourd’hui un niveau qui peut lui permettre de prétendre à être titulaire dans une équipe jouant le titre. Barré une fois de plus par un ailier fort à l’expérience et à la réputation supérieures aux siennes, il se retrouve dans un rôle de 6ème homme pour lequel il parait régulièrement trop doué. Comme d’autres avant lui (Manu Ginobili, Toni Kukoc) qui ont su embrasser cette fonction mais qui étaient présents sur le parquet lors des instants les plus importants des matches. Qu’en sera-t-il de Taj Gibson ?

 

Source image : sportsmockery.com


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