Preview des Indiana Pacers 2014-2015 : une seule jambe vous manque et tout est dépeuplé (ou presque)

Le 09 oct. 2014 à 18:20 par Nathan

On aimait bien les Pacers. Oui, on les aimait bien. Ils étaient rugueux, un peu old school, avec un côté vaniteux qui allait si bien avec leurs tronches de lascars. Mais tout ça, c’était avant. Maintenant, les Pacers c’est un peu les Celtics d’avant 2008, mais sans Paul Pierce, ou le Jamel Comedy Club sans Jamel Debbouze. Bon d’accord, ça n’existe pas ; mais ça fournit quand même un élément de comparaison suffisant pour nous permettre de dire ceci :  Indiana en 2015, ça va pas être joli joli.   

Que s’est-il passé l’an dernier ?

Ce qu’il s’est passé ? Permettez-nous de sauter par-dessus l’ensemble des événements de la saison dernière pour aller à l’essentiel : le tragique de l’existence, un drame, une bombe atomique. Non, pas Paul George, on voit ce que vous avez dans la tête – un peu de patience. Non, cette bombe s’appelle Lance Stephenson. La seule bombe humaine capable de faire exploser, sans contact physique, la tête, non seulement de ses adversaires sur le terrain, mais aussi de ses coéquipiers dans le vestiaire. Un télépathe le mec. Un magicien de la psychologie, un sorcier du psychisme individuel. Avant les méfaits dont on vous passera les détails (qui sont sanglants, assurément), les Pacers c’était du jeu dur, sérieux, lent mais léché. Les gars détruisaient tout sur leur passage. 40 victoires en 51 matches : les meilleurs. Et puis Lance Stephenson a pris de l’importance. Il a commencé par danser sur scène, sans ballon. Il a poursuivi en insultant ses coéquipiers ; on prenait cela pour de la folie, mais tout était savamment orchestré par le petit chaman afin de foutre le bordel dans son équipe. Un diable, une plaie. L’ambiance au sein des Pacers se délite. Le coach Frank Vogel en prend pour son grade. Roy Hibbert aussi. On les dit trop mous, trop softs. En coulisses, le démon en personne contemple son œuvre avec un rictus. L’équipe devient méconnaissable : elle transfère son go-to-guy traditionnel (Danny Granger) contre Evan Turner en provenance de Philadelphie. Il parait que c’est Stephenson lui-même qui a signé le contrat. Indiana perd des matches, se fait peur contre des petites équipes. Elle échouera en finale de conférence contre Miami, et on verra Lance Stephenson accomplir le geste de sa carrière : enfourner quelques particules d’oxygène dans l’oreille du meilleur joueur du monde, au lieu, comme on est en droit de l’exiger, de se concentrer à mettre un ballon dans un panier.
Oui on y arrive : Paul George. Ahhhh, ça nous fait mal de parler de lui et de sa jambe (ou plutôt des deux parties de cette dernière). C’est que c’était le seul, avec David West, qui pouvait faire face à Lance Stephenson. Lui ne semblait pas atteint par les pouvoirs de son coéquipier, et par chance, il s’agissait aussi du meilleur joueur de l’équipe. Ce type, à 22 ans, c’était une superstar, un héros, un boss, un 360 windmill en plein match. On parle de lui au passé : c’est exact, car Paul George n’est plus. Il est resté coincé entre 5 centimètres du parquet et la base d’un panier aux Etats-Unis. Pas longtemps hein, quelques millièmes de secondes : suffisamment pour le transformer en autre chose, pas le Paul George qu’on a connu, ça c’est sûr. Une blessure qui change beaucoup de choses pour la suite des Pacers : on y reviendra.

P.S : on aurait pu parler d’Andrew Bynum, mais c’est tellement insignifiant qu’on peut juste dire : “euhhh, ba il était là, enfin c’est possible, on sait pas en fait.”

Résumé des transferts de l’été

  • Ils arrivent : Rodney Stuckey (Detroit Pistons), CJ Miles (Cleveland Cevaliers), Shayne Whittington (Western Michigan), Damjan Rudez (Saragosse), Chris Singleton (Washington Wizards), Arinze Onuaku (Cleveland Cavaliers), Adonis Thomas (Philadelphie Sixers)
  • Ils s’en vont : Lucifer, pardon Lance Stephenson (Charlotte Hornets), Evan Turner (Boston Celtics), Rasual Butler, Andrew Bynum (hôpital)

Après la blessure de Paul George, les Pacers se sont activés cet été pour tenter d’arrêter l’hémorragie. Emmaüs a bien voulu leur prêter Rodney Stuckey et CJ Miles, deux extérieurs portés sur le scoring. Le reste, c’est du déchet ramassé en faisant les fonds de poubelles. Le problème, c’est que ça équilibre mal le départ de Lance Stephenson et Evan Turner, qui, même si le premier est en grande partie responsable de la chute des Pacers, et le deuxième la cause d’un délitement du collectif, n’en restent pas moins des joueurs vachement plus solides que Miles et Stuckey. On fait ce qu’on peut avec ce qu’on a, comme on dit.

Effectif 2014-2015

  • Meneurs : George Hill,  CJ Watson, Donald Sloan
  • Arrières : Rodney Stuckey, CJ Miles, Paul George
  • Ailiers : Chris Copeland, Chris Singleton, Salomon Hill, Damjan Rudez, CJ Fair
  • Ailiers-forts : David West, Luis Scola, Adonis Thomas, Lavoy Allen, Arinze Onuaku,
  • Pivots : Roy Hibbert, Ian Mahinmi, Shayne Whittington

En gras, le cinq majeur probable. C’est tellement le bordel au secteur extérieur qu’on insiste sur le fait que c’est seulement probable.

La question de la saison : Larry Bird arrivera-t-il à lâcher un sourire ?

“Je me demande si j’ai bien fermé la porte avant de partir, tiens…”
(Source : NY Post)

Allez, au moins un sourire en coin. Un rictus, un léger mouvement de lèvres. Un commencement d’un sourire alors ? Le front qui se plie, les traits des yeux qui s’allongent…tu peux pas faire ça Larry ? La série contre les Hawks a été l’occasion d’apprécier à quel point Larry Legend pouvait être stoïque, placide ; avec une tronche proprement indéterminée : depuis qu’il est président des Pacers, on ne sait pas s’il est content, en colère, s’il s’en fout ou s’il pense tout simplement à autre chose. Avec sa posture magnifiquement froide, ses yeux de bovins regardant dans le vide, laissant passer à peine plus d’émotions que les lobs de ses oreilles (qui, comme vous vous en doutez, ne jouent qu’un rôle très réduit dans l’expression d’un visage), Larry Bird affichait un charisme dont la stabilité semblait à toute épreuve. La grande question est : trouvera-t-il une raison de se réjouir cette saison ? Aura-t-on la chance (que dis-je : l’honneur), d’assister à ce moment, si rare dans l’histoire d’une vie, d’apparition de cette déformation du visage qu’on nomme généralement sourire ? Rien n’est moins sûr depuis le départ de son poulain dont-on-ne-doit-pas-dire-le-nom et la blessure de PG24.

Candidat sérieux au transfert : Roy Hibbert et son envahissant arrière-train

Transfert possible

“Mais t’avais dit qu’on ferait des knackis…”
(Source : ESPN)

Deux mètres dix-huit centimètres de dépression. Cent vingt kilogrammes de crise existentielle, d’abandon de la volonté, de trépas des forces vitales. Roy Hibbert, qui n’a de Roy que le nom, nous a montrés, de manière éclatante, l’importance capitale du mental, le primat fondamental de l’esprit sur la matière, de la volonté sur le corps. Des gaillards aussi mastocs que lui dans la peinture, il y en a deux, peut-être trois, dans toute la ligue. Mais ces quelques autres pivots taillés comme une armoire à glace, constituent chacun une menace proportionnelle à leur gabarit (ou à peu près, ne soyons pas trop rigoureux en de telles circonstances). Le problème avec Hibbert, c’est qu’à la  fin de la saison dernière, son apport était peu ou prou comparable à celui du porteur de serviettes, la qualité du service exceptée (parce que le porteur de serviettes, lui au moins il fait son boulot, et il applaudit ses coéquipiers). Mou, mollasson, pas réveillé : voilà les premières impressions qu’on avait en regardant le gros pivot balourd. “Adieu ! c’qui lui faudrait c’est un bon jus d’sardine au réveil, que j’te dis !” – “Je vais t’en foutre une que tu vas te bouger le derrière, té ! ” ou encore ” Non mais, j’men vais te l’dire : c’est que j’lui mettrais bien une torgnole pour le sortir du lit, pas moins !” : autant de phrases choquantes et parfaitement vulgaires, martelées aux quatre coins du globe, qui sont arrivées aux oreilles du doux et sensible Roy Hibbert. Il paraîtrait qu’il a fait des efforts pour mieux coller à l’image qu’on exige d’un joueur de NBA : traitement à base d’hormones ; interdiction des dessins animés et des jeux vidéos (à part les GTA et les Mortal Kombat) ; visionnage obligatoire, pendant un petit déjeuner composé essentiellement de steak-frites, de l’intégrale des combats de bouledogues entre 1998 et 2008. Ce traitement, révolutionnaire parait-il, devrait faire sentir ses effets dans les jours qui suivent. Wait and see.

Candidat sérieux à la surprise : la jambe gauche de Frank Vogel

Ce genre de choses, ça arrive sans qu’on s’y attende. Un faux mouvement, une glissade, une peau de banane. Hop, c’est la catastrophe. Ça va trop vite, ça va trop fort. Si la jambe de Paul George n’a pas tenu le choc, comment celle d’un homme de cabinet pourrait-elle tenir ? Nous, on voit bien coach Frank Vogel céder sous la pression infligée par Larry Bird. Avec un effectif vraiment réduit, pas facile d’afficher les mêmes ambitions que l’année dernière. Pire, sa jambe gauche commence à lui faire mal : et la douleur empire au fur et à mesure des défaites. C’est comme si le mal dans sa jambe était prémonitoire : la rupture des croisés sera synonyme d’un limogeage en bonne et due forme. Frank Vogel arrivera-t-il à garder le contrôle sur son équipe et, donc, sur l’intégrité de son corps ? Prolongé il y a peu,  il a la confiance du staff, et c’est sans doute la meilleure chose qui soit arrivé aux Pacers cet été.  Ouais c’était vraiment la merde, on sait. 

Meilleur et pire scénario possibles

  • Les Pacers tiennent la baraque pendant la convalescence de Paul George. Roy Hibbert est transformé depuis son traitement à base d’hormones et devient un chien enragé sur le terrain. David West prend le rôle du leader vocal. Rodney Stuckey est la principale satisfaction chez Indy, qui a définitivement fait une bonne affaire. A la mi-saison, l’équipe affiche un bilan quasiment équilibré et pointe à la 7ème place à l’Est. Pendant ce temps, Paul George récupère plus vite que prévu. C’est vrai qu’entre temps, des scientifiques ont découvert avec stupéfaction l’existence réelle de Superman et de la kryptonite. Ce dernier matériau s’est trouvé, par hasard, être un excellent solidifiant pour les os. Une gélule le matin avec un verre de lait, et le tour est joué ; dans peu de temps, le jeune américain moyen prendra régulièrement sa dose de kryptonite avant d’aller à l’école. Paul George adore ça et en avale des rochers entiers. Les Pacers récupèrent leur superstar pendant le All-Star Week-end. On se montre prudent avec lui mais il ne tarde pas à reprendre son niveau. Le retour d’un scoreur à l’extérieur rajoute de la force à une équipe qui misait ses atoux dans le secteur intérieur. Les Pacers ont de nouveau du poids dans la conférence Est : ils affichent un bilan très honorable de 47 victoires – 35 défaites. Malheureusement, l’effectif est encore trop court pour viser mieux qu’une demi-finale de conférence, perdue contre les Bulls.
  • La blessure de Paul George a des effets dévastateurs. Sportivement, les Pacers ne valent plus rien : en perdant leur meilleur joueur, Indiana perd sa meilleure raison de jouer – chercher la victoire. Mais en plus de cela, les conséquences mentales sont désastreuses. Larry Bird et Frank Vogel prennent des cours du soir pour améliorer la sécurité de leurs joueurs. Les dispositifs de sécurité chez les Pacers dépassent ceux qu’on peut trouver à l’aéroport de New York et à la Maison Blanche. Coach Vogel devient pire qu’un moniteur d’auto-école. Les entrainements se déroulent sans contacts, et le parquet est remplacé par un énorme tatami, afin de prévenir tout risque de blessure. Genouillères, casques, protèges-tibias : tout ce qui a été créé en matière de protection corporelle est utilisé par le staff pour assurer la protection des Pacers. La phobie des blessures, qui s’était développée d’abord chez les têtes pensantes de la franchise, descend maintenant jusqu’aux joueurs eux-mêmes. Ils ne veulent plus jouer, de peur de voir leur intégrité physique menacée. L’ombre de Paul George plane sur le Bankers Life Fieldhouse. Les spectateurs viennent au stade comme s’ils allaient au cinoche voir un film d’horreur. Comme en face d’un film qui fait peur à deux francs cinquante, les fans sursautent à chaque rebond, à chaque contact, de peur (de désir ?) de voir un joueur se casser quelque chose. Il faudra une gueulante d’Adam Silver pour que tout rentre dans l’ordre. Les Pacers redeviennent la risée de la ligue et attendent le retour de Paul George, retour qu’il faudra repousser puisque la star s’est cassée l’autre jambe à son premier jour d’entrainement, en glissant sur une genouillère  laissée par inadvertance dans le vestiaire. Le verdict est sans appel : pas de basket cette année, et l’année d’après non plus.

Le pronostic de la rédaction : 38 – 44

Les prédictions sont difficiles concernant les Pacers : c’est une toute autre équipe. Même le secteur intérieur a “changé” d’une certaine manière, malgré le fait qu’il n’y ait pas eu de transfert cet été, car il aura certainement plus de ballons que l’année dernière. Libéré des pouvoirs démoniaques de Lance Stephenson, et du leadership de Paul George (la faute à une jambe tombée, si l’on ose dire, au mauvais endroit au mauvais moment), les David West, Roy Hibbert et Luis Scola vont avoir plus de poids : mais feront-ils l’affaire ? Difficile de répondre à ce genre de question de manière univoque : la plupart des rédacteurs penchent vers un bilan équilibré ; d’autres voient les Pacers finir en positif (44 victoires), d’autres enfin plutôt en négatif (35 victoires). En moyenne, c’est finalement un bilan négatif qui ressort : mais restons optimistes, Lance Stephenson est parti foutre le bordel ailleurs…


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